• ANNONCER LA PAIX ET PRÊCHER L’ÉVANGILE - M-F

    ANNONCER LA PAIX ET PRÊCHER L’ÉVANGILE - M-F1. Circuler et être présent!

    La prédication franciscaine de François et des premiers frères est bien loin de ce que nous imaginons, autant pour le style que pour les contenus. Il ne s’agit pas d’abord de sermons et d’homélies. Un texte de Thomas de Celano, son premier biographe, permet de remettre les faits en perspective. Celui-ci écrit : « Il ouvrait chacun de ses sermons par un souhait de paix avant de transmettre à l’assistance la parole de Dieu; il disait : Que le Seigneur vous donne la paix! Cette paix, il la souhaitait toujours et avec conviction, aux hommes et aux femmes, à tous ceux qu’il rencontrait ou croisait sur sa route. »*
    François d’Assise est bien sûr un prédicateur ambulant; comme les Apôtres il vit simplement, va de village en village, s’arrête volontiers dans les maisons. Il reçoit sur place l’hospitalité et le gîte. Il circule et il demeure. Il est là, il écoute et, parfois, il parle. Avec les gens, il partage l’expérience qui lui brûle le cœur : connaître le Christ Jésus et éprouver son Amour.

    2. D’abord la paix et la réconciliation!

    L’époque et le milieu de François n’ont jamais été en paix de tout son vivant. Les conflits civils et politiques étaient constants. Le milieu et la culture étaient marqués par une hostilité ouverte et destructrice. Il ne s’était pas fait chevalier pour rien. Guerres et activités militaires l’ont occupé un certain temps mais sans succès ni suite. C’est dans le contexte d’une déception militaire que François mûrit son passage d’un royaume politique et économique au Royaume de Dieu avec une vision du Bien et de ses valeurs.
    Une chose est évidente, François d’Assise a des priorités et un ordre dans sa manière de témoigner de l’Évangile. De la présence, François passe ensuite au rassemblement des personnes et des situations. Être là avec tout le monde et avec le vécu de tout le monde. Où qu’il soit et avec tous les publics, le petit pauvre d’Assise s’en tient à une vision de fond : la paix dans ses dimensions les plus urgentes et les plus durables : le Royaume de Dieu et sa justice.
    Dans sa salutation si courtoise, il y a aussi une volonté de réconciliation avec et pour tout le monde. Se donner et offrir la grâce de faire la paix en soi et avec les autres, même avec le poids de la vie personnelle, sociale et culturelle. Faire la paix et prendre le temps de la rendre désirable et de l’accomplir sans précipiter les solutions surtout quand les enjeux ne sont pas compris et les remèdes bien examinés.
    Dans la salutation proverbiale de François et des frères, il y a une référence transparente au Seigneur dont ils sont les ambassadeurs. La paix offerte n’est pas seulement la leur. Elle risquerait d’être parfois généreuse, mais à long terme passagère. C’est la paix du Seigneur dont ils sont les porteurs et les artisans. Ils ne la partagent pas comme si elle était acquise, mais justement pour la rendre possible grâce à leur ministère. Ils s’affichent ainsi pour ce qu’ils sont : des envoyés et des participants à une mission essentielle.

    3. Prêcher tout l’Évangile!

    Je demandais, il y a quelques années, à un confrère franciscain si de nos jours nous annoncions vraiment l’Évangile du Christ Jésus. Il est demeuré interloqué comme si ma question était un jugement. La question était et demeure légitime. Elle l’est pour François d’Assise et son époque et tous les milieux qu’il visite. Pourquoi la tradition se rappelle-t-elle de lui comme d’un « homme évangélique et apostolique »? Thomas de Celano rapporte : « Et cela eut souvent pour effet, avec la grâce du Seigneur, d’amener ceux qui, réfractaires à la paix, étaient ennemis de leur propre salut, à embrasser la paix de tout leur cœur, à devenir eux aussi des fils de la paix et des conquérants du salut éternel. »*
    L’image d’un siècle « chrétien » ne correspond pas à la description qu’en font les biographes de François. Ils soulignent largement l’existence de classes sociales sans profondeur religieuse et spirituelle, ignorantes des vérités élémentaires sur l’Absolu et dans bien des cas décidément hostiles à l’ordre de penser et d’agir inspirés par la tradition chrétienne. Dans ce contexte qui n’offre guère d’authenticité et de cohérence, François découvre Jésus, devient son disciple et commence un long chemin de pénitence. Il apprend à être témoin et serviteur avant d’envisager même un engagement plus manifeste de prédication et d’enseignement. D’abord éprouver la foi par la conversion, la foi et la pénitence; longuement se consacrer à la « foi qui opère par la charité » dans des gestes de diaconie et de service.
    François a choisi pour lui-même et ses frères de « vivre et d’observer le Saint Évangile de Notre Seigneur Jésus Christ » comme les Apôtres de la première heure. Pour la forme et le fond, pour le message et pour la manière d’être et de vivre. François est un praticien de l’Évangile qui va, itinérant, de village en village et de maison en maison, un témoin. François ne porte pas un message dont il serait distant. Il partage une expérience qui bouleverse sa vie. Lui et ses frères sont des pénitents, des convertis. Ils sont les premiers touchés par la présence et le salut dans le Christ Jésus. Ils annoncent ce qu’ils vivent et les fait vivre. Le Seigneur les touche et leur apporte une paix indicible. Dans cette rencontre, leur vie et leur quotidien prennent un tout autre sens et une toute autre profondeur. Ils vivent enfin une parole qui est le pain de leur âme, une vie « en abondance », la vie éternelle (Jean 10,10).

    4. Une perle rare : le salut!

    Au milieu des gens et dans des circonstances si différentes, François et ses frères vivent et annoncent l’Évangile… et le salut : une humanité et un univers à qui toute réconciliation est accessible et possible, des personnes qui sont des interlocuteurs de Dieu dans le Christ Jésus, des appelés à éprouver leur cœur et leur vérité : vivre à l’image et à la ressemblance de Dieu. L’Évangile est d’abord la personne et la vie de Jésus comme lumière et chemin pour le renouveau de qui que ce soit, même aux heures de mensonge et de péché. Il y a là moyen de recommencer et enfin commencer. Il est grand temps de le faire.
    Lui-même pénitent- tourné vers Dieu-, François propose à des milliers d’hommes et de femmes de considérer avec attention la présence et la proposition de salut qu’est l’Évangile de Jésus, de la méditer, de la choisir et d’en tirer les conséquences par une vie de conversion, exigeante et durable. Le propos est sans détour mais simple : découvrir la Vie en plénitude. Dans ce cheminement et ce mode vie, les convertis-pénitents comprennent que l’Évangile est adressé à toute personne humaine et à toute créature. De la terre au ciel. L’Évangile est total et il est universel. Il rend possible la famille humaine. Il permet de bâtir la demeure de Dieu « parmi les hommes ».

    Gilles Bourdeau, OFM
    Novembre 2018

    *Thomas de Celano, Vie de saint François, Chapitre 10, 23b, Paris, Les Éditions franciscaines, 1967, p. 47
    Source : H.S. 11-20-Rep. RC

    ---------------------
    *Autorisation de reproduction accordée à Richard Chamberland pour son site http://fraternite-ofs-sherb.eklablog.com/
    le 28 février 2021
    Source : Hors-série en Mission avec Jésus, Missions des Franciscains, 2020, texte publié dans la Revue des Missions des Franciscains, Vol. 96, no.3, novembre 2018.

    Richard Chartier
    Directeur, Bureau des Missions des Franciscains, Province Saint-Esprit du Canada, rédacteur en chef de la Revue Missions des Franciscains et agent de projets du Bureau des Missions des Franciscains.

    ---------------------------

    Articles récents
    « Cardinal Cantalamessa: le Carême est le temps de la conversion - VAHomélie du 3eme dimanche du carême - 7 mars 2021 »

    Tags Tags : , , , ,
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :