• Bonjour !

    Voilà déjà le mois de mai, dans un printemps hâtif, tout débordant de bourgeons, d'éclosions et de promesses, même avec la surprise de quelques flocons de neige.  Comment ne pas découvrir les signes de vie, devant tant de beauté?   Que les crocus, les tulipes et les pissenlits te chantent toute mon affection, en attendant les lilas et les pivoines!

    Avec tendresse,

    Laurette.

     

    Note : Laurette est présentement à l'Hôtel-Dieu de Québec. Elle a une embolie rénale droite. 

    Elle va mieux et elle est très bien soignée. Ils la garderont encore quelques jours

    sous observation afin qu'elle puisse reprendre son quotidien parmi vous dans la

    joie et l'espérance!

     

    Nous t'accompagnons Laurette dans ta guérison.

    Son petit-fils

    Matthieu

    Union de prières, Richard

     

    C’EST LE PRINTEMPS

     

    Au printemps 

    Bourgeon-du-primtemps.jpg Tout a couleur de l'espérance

    Que l'on se batte dans la rue

    Ou qu’on y chante !

    (Jean Ferrat)

     

    Le printemps c'est la saison d'appel à la vie, au renouveau.  Il s’installe avec toute sa vitalité et ses  débordements de sève.  Symbole de la présence du Ressuscité au coeur du monde! Il suffit d’apprendre à lire les signes de vie qu’il souffle dans notre histoire et de chercher comment y répondre.

     

    Jésus  de Nazareth n’avait qu’une passion : le Royaume de son Père !  Un Royaume qui n’est pas un lieu qu’on peut encercler, mais plutôt un lien, un  amour sans limite qui émerge dans notre vie de tous les jours et qui nous fait faire du neuf.  Un amour qui nous fait retrouver sans cesse le goût de nous remettre debout, ce qui veut dire ressusciter, et d’aider nos compagnons et nos compagnes de route à en faire autant.

     

    C’est ainsi que le Concile Vatican II nous incite fortement à renouer avec la nouveauté de l’évangile.  Ce concile n'appartient pas seulement au passé. Il est encore très actuel et il indique le chemin à parcourir pour faire de l'Église une vraie communion où tous et toutes sont responsables de leur baptême et de l'annonce de la Bonne Nouvelle du Christ ressuscité.  Dans la tourmente qui secoue l’Église ces temps-ci, comme il est important de nous mettre à l’écoute de l’Esprit qui nous fera découvrir les appels pour le monde d’aujourd’hui ! 

     

    Le bon pape Jean XXIII expliquait que l’idée d’un concile avait germé dans son cœur « comme une humble fleur cachée dans les prés ».  L’humble petite fleur, toujours cachée, n’a pas fini de hanter nos rêves.  Dans la force de l’Esprit qui fait toute chose nouvelle, elle ne cesse  de rallumer nos cœurs et de nous entraîner sur des chemins d’espérance.

     

    Jésus ressuscité entre dans notre vie par les moments de joie intense et par les moments de tristesse.  Il y entre pour y mettre une graine d'espérance, dans toute situation, dans toute voie sans issue.  Il est là, avec nous pour pleurer, avec nous pour nous relever, avec nous pour nous rappeler que depuis ce jour de résurrection, il est possible de vivre debout. On ne ressuscite pas seulement après la mort, mais aujourd’hui.

     

    Si nous vivons ainsi, en ressuscités, le monde, en nous regardant, ne pourra pas dire uniquement :« Voyez comme ils sont sages et disciplinés », mais bien : « Voyez comme ils s’aiment » !

     

    Laurette Lepage

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  • QU’ÉCLATE LA VIE !

     

     

    poulet-Paques.jpg Pas de poussin, sans coquille brisée, pas de feuille, sans bourgeon éclaté, pas de vin, sans raisins broyés, pas de papillon sans cocon déchiré, pas de Pâques, sans Vendredi saint.

     

    Dieu a lancé l’humanité sur le chemin de la vie, mais parfois, tout  semble bloqué.  Des choses et même des personnes nous déçoivent. Trop de cris percent nos oreilles, trop d’horreurs nous obligent à détourner notre regard.  Même Dieu nous déçoit par son silence et son absence.  Et nous nous écrions :  « Où allons-nous? »

     

    En ces moments, nous sommes plus du côté de la mort que de la vie, mais pourquoi ne pas regarder autour de nous ?  En ces jours de printemps, ne voyons-nous pas la vie qui éclate ?  Des pousses, des bourgeons, des germes sont là, parfois invisibles, mais réels.  Mais pour que cela arrive, il a fallu un hiver durant lequel la nature dormait.

     

    Il en est de même de notre vie.  Quand  l’âge ou la maladie arrêtent les activités et fait tomber les projets, quand la souffrance traverse notre vie, quand notre espérance est à bout de souffle, pensons que la réussite d’une existence ne se mesure pas à l’activité que l’on déploie, ni aux projets que l’on fait, mais à ce que l’on donne par amour. Dieu nous a rejoints dans nos souffrances, pour nous dire qu’elles n’ont pas le dernier mot sur nous : « Si le grain de blé ne tombe en terre pour y mourir, il reste seul.  C’est quand il meurt qu’il porte beaucoup de fruits » (Jn 12, 24).

     

    Tant que nous donnons par amour, notre vie a du sens, notre vie est réussie, tellement réussie, que c’est cette vie que Dieu ressuscite.  Car Pâques, c’est cela.  Jésus a tellement réussi sa vie que Dieu l’a ressuscité.  L’amour, et uniquement l’amour, donne du sens à l’existence.  Nous sommes invités nous aussi, à être des ressuscités ici et maintenant, en posant des gestes qui accouchent d’un peu plus de vie. 

     

    Nos déserts de solitude requièrent tendresse, attention et amour.  Ce défi peut être relevé tous les jours, par un sourire, un geste, une parole.  Pâques c’est cela.  Pour que la vie éclate et ait à jamais le dernier mot, il a fallu que le grain tombe en terre. C’est peut-être cette étape-là que nous oublions.  Elle est pourtant le «Passage» obligé. 

     

    Joyeuses Pâques !

     

    Laurette Lepage

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     et encore...  

     

    Joyeuses Pâques !

    Regarde !

    La pierre du tombeau a basculé
    Elle laisse passer le Vivant.

    Entre ciel et terre,

    Déchirure de lumière
    Éclatée en millions d’étincelles.

    Joyeuse nouvelle portée au monde

    Comme levain, semence et feu.

    Dieu-passant

    Dieu-passage
    Dieu-Pâque !

    Dieu pour toujours

    Au milieu de nous!
    Alleluia !


    Laurette

     

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  • Bonjour !

    Comme disait mon ami, Dom Fragoso, du Brésil: "Ma Mère (l'Église), je l'aime, mais je n'aime pas ses verrues", c'est à ma manière que je le dis aussi,  dans "Moi, pourquoi je reste ?"

    Avec tendresse,

    Laurette


    MOI, POURQUOI JE RESTE ? - Laurette

     

     

    laurette_lepage.jpg L’Église catholique, je ne l’ai pas choisie.   Je suis née dedans comme je suis née au Témiscamingue, dans la province de Québec.  J’y ai grandi dans la peur du Dieu qu’on m’a présenté, comme j’ai grandi sous la férule du régime de Duplessis.  C’était comme ça !   Ah! si je m’en souviens!  L’œil de Dieu qui nous surveille, nous contrôle et nous punit !  Le Dieu de mon enfance n’était pas pour moi une Personne, un Père, mais un Oeil !   Grand Dieu !  Tout ce qu’il fallait faire pour ne pas déplaire à cet OEIL ! ..

     

    Oui, c’est l’Église qui m’a faite, mais c’est aussi l’Église qui m’a changée. À mesure qu’en elle, j’ai découvert le Dieu de Jésus-Christ, l’Évangile, le renouveau catéchétique, le Concile Vatican II, là, j’ai changé complètement de Dieu !  Le Dieu « empereur » est devenu le Dieu « Amour », incarné en Jésus, et semé en chacun(e) de nous.  C’est toute la différence !     Dieu n’apparaît pas, il transparaît, disait Maurice Zundel.

     

    Hélas ! dans cette Église que j’aime et qui a changé aussi, je ne reconnais pas toujours le Dieu de l’Évangile et les attitudes de Jésus.  Et j’en suis déçue, peinée, et parfois, en colère.  Malgré tout, je veux bien continuer de vivre dedans, avec ses défauts et ses manques (les miens aussi!), mais je ne peux pas  me taire!  Quelque chose me brûle en dedans.  Et quand je regarde Jésus, je me console en pensant que lui aussi a dit avec force, son désaccord avec les autorités religieuses de son temps. Il n’a pas ménagé sa critique contre ce qui pouvait encombrer, fausser ou pervertir la religion voulue par son Père.  Et quand on lit Matthieu 23, 13-30, Jésus est intraitable: « Malheur à vous, guides de la Loi et Pharisiens hypocrites... serpents, race de vipères... votre maison sera laissée vide » . Le Dieu de la vie n'a d'autre dogmatique que celle de l'amour, celle du service.   Il me semble que la foi en Jésus ne peut que désirer la critique des croyants qui veulent une Église à l’image de l’Évangile.

     

    Le soir de l’accession au cardinalat de Mgr Ouellet, j’étais perchée, en haut du jubé de l’église St-Roch, aux dernières places, derrière les colonnes, avec les pauvres et les  « minables » de la société.  J’y ai entendu une seule parole, qui m’est restée et qui semblait être tout un programme :  « Repartir du Christ ».  Mais au fur et à mesure qu’après, se défilaient les discours et les gestes posés, il fallait constater que nous ne repartions pas du Christ, mais plutôt du Concile de Trente, effleurant à peine Vatican II.  Mais où est-il donc l’Esprit promis par Jésus, qui nous fait entendre aujourd’hui, le message intouchable de l’Évangile ?  L’Église n’est-elle pas appelée à s’incarner dans l’histoire en marche ?  Le Royaume de Dieu ne marcha pas à reculons.   Dieu n’est pas bloqué dans les années’30.  Il marche avec nous aujourd’hui, dans le monde post-moderne que nous habitons, avec nos avancées et nos reculs, avec nos générosités et nos faiblesses et surtout, avec cette étincelle de Lui, semée en nous comme une boussole qui nous indique le sens.  Il est urgent de trouver un nouveau langage pour dire que l’Évangile est une Nouvelle, BONNE pour tout le monde !

     

    J’ai mal à mon Église quand on porte sur le peuple québécois un regard négatif, comme s’il était le champion du divorce, de l’avortement, du suicide, de l’abandon de la  religion, sans s’apercevoir de sa générosité, de sa recherche de sens, de sa créativité et de sa prodigieuse hospitalité.

     

    J’ai mal à mon Église quand  j’entends un langage de peur qui a de quoi éteindre toutes les flammes :  peur du modernisme, peur du relativisme, peur de la culture de la mort.  Plutôt qu’une morale d’interdiction et de condamnation, pourquoi pas une morale d’invitation, d’appel, d’évolution ?  « N’aie pas peur », disait Jésus. Il disait encore : « Si tu veux »... « Lève-toi, prends ton grabat et marche ».

     

    J’ai mal à mon Église quand je vois condamner ou bâillonner les théologiens « progressistes », de même quand je vois mettre en veilleuse la théologie de la libération.  

     

    J’ai mal à mon Église quand, dans le langage de Vatican II, on a fait la promotion du laïcat et que dans la pratique, il n’y a pas grand-chose de changé.  Les laïcs n’ont pas plus de pouvoir ni d’autonomie qu’avant, même s’il y a plus de liberté de parole.  Ils doivent accepter tout sans récriminer, comme si l’Esprit de Dieu était seulement dans la hiérarchie. 

     

    J’ai mal à mon Église quand le peuple de Dieu manque de prêtres et qu’on refuse le sacerdoce ministériel à des baptisé(e)s capables d’assumer cette responsabilité. 

     

    J’ai mal à mon Église quand on refuse toujours la communion eucharistique aux divorcés remariés et qu’on abolit les si belles célébrations communautaires du pardon avec absolution collective, alors que les gens venaient, plein l’église.  

     

    Même si je ne me sens pas toujours confortable dans mon Église catholique romaine, je me console en pensant que cette vieille Mère Église flotte encore, contre vents et marées, depuis 2000 ans, avec la seule parole qui la tient debout : « Voici que je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du temps (Mt 28, 20).  Je me console aussi en pensant que pour son Église, Jésus semble avoir voulu une structure égalitaire, ressemblant davantage à celle d’une famille dans laquelle l’autorité est exercée au service des autres :« Si quelqu'un veut être le premier, il sera le dernier de tous et le serviteur de tous » (Mc 9, 35).  Jésus n’a pas créé de hiérarchie, n’a pas décrété de dogmes, n’a pas imposé de droit canonique.  Il n’a parlé que de la bonté de Dieu.  Il n’a  prêché que le partage, le pardon et la paix.    

     

    Mais au-delà de la structure, l’Église est aussi le Corps du Christ.   Cette Église mystérieuse, faite de pierres vivantes, fraternelle et sans exclusion, elle a un visage visible.  Je la touche aussi, surtout au ras du sol et dans les marges, dans les groupes restreints, dans la multitude des réseaux de solidarité qui s’engagent pour un monde de justice et de fraternité.  Mais cela ne va jamais de soi : je crois que nos communautés humaines seront toujours imparfaites, fragiles et source de déceptions. 

     

    La vraie communauté est invisible à nos yeux : c’est la communion des saints où, avec nos différences et nos préoccupations, nous sommes uni(e)s dans le même Corps du Christ.  Oui, je reste, parce que l’Église, c’est d’abord nous, temple de pierres vivantes, où il n’y a ni mortier ni ciment, car ce qui nous tient ensemble, c’est Jésus, pierre angulaire. C’est son amour qui nous cimente les uns aux autres.

     

    Je reste dans l’Église d’aujourd’hui et de toujours parce que je garde toute ma confiance en Jésus le Vivant, parce que je désire toujours traduire en actes, tant bien que mal, son Évangile, et que je veux vivre en communion avec tous mes frères et sœurs

    Laurette Lepage


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  • PLACE AUX FEMMES !

    (Journée internationale de la femme - 2010)

     

    Si le Royaume des cieux ressemble au levain qu’une femme met dans trois mesures de farine jusqu’à ce que la pâte soit levée (Mt13, 33), le Royaume des cieux ne ressemble-t-il pas aussi à toutes ces femmes qui enfouissent dans notre monde le levain de leur espérance?  Elles marchent sur les routes planétaires pour conférer à la vie les couleurs de l’amour, de la paix, de la justice, de la joie d’être ensemble.  Le levain, c’est du concentré d’amour !    Alors, comment ne pas faire confiance à demain ?

     Laurette.

     

    journee-intern-femme.jpg « N’essayez pas de déplacer des montagnes,

    Apprenez à les contourner.

    Soyez humble devant ce qui ne peut être vaincu ».

    (Divine diablesse)

     

    Jésus n’a pas peur des femmes.  Il les prend aussi comme disciples.  Elles sont là, avec lui sur la route, actives, consolantes ou consolées : la merveilleuse cananéenne, la pécheresse qui parfume les pieds du Maître, la samaritaine assoiffée d’eau vive, Jeanne, l’épouse du ministre des finances d’Hérode, Salomé et les autres.  Et là, à Béthanie, chez Marthe et Marie, Jésus peut presque entrer sans frapper, tant il est le bienvenu.  Le cœur y est, la générosité aussi.

     

    Les femmes avaient été maltraitées et rabaissées par les hommes, parfois de manière très grossière et cruelle, mais Jésus est l’homme parfait que Dieu veut donner en exemple à toute l’humanité. Pas une seule fois dans les quatre évangiles, Jésus n’a rabaissé une femme.  Plusieurs fois, il a raconté des paraboles au sujet des femmes, et toujours, il a élevé leur statut.  Il traitait les femmes de façon si égale qu’il passait pour un « révolutionnaire ».  En s’opposant à des siècles de tradition, Jésus conversait avec les femmes en public, les instruisait, les guérissait, prenait leur défense et exhortait les hommes à les respecter.  Des femmes faisaient partie de ses disciples les plus fidèles.   Elles l’ont soutenu jusqu’à la crucifixion.  Et elles ont été les premières à le reconnaître après sa résurrection et à l’annoncer.

     

    En agissant ainsi,Jésus ne rejoignait-il pas le premier chapitre de la Bible, où l’homme et la femme sont créés par Dieu de façon simultanée et égale ?  « Dieu créa l’homme à son image.  À l’image de Dieu il le créa; Homme et Femme il les créa » (Gn 1, 27).  C’est l’ensemble des deux qui constitue l’homme à l’image de Dieu.  Et il n’existe aucune concurrence entre les deux images de Dieu.  Elles ne se font pas d’ombre.  Ensemble, elles font rayonner et la paternité et la maternité spirituelles de Dieu

     

    L’Église chrétienne primitive poursuivit la mission de Jésus dans le même esprit, avec les hommes et les femmes, travaillant côte à côte.  Ils priaient, enseignaient, prêchaient, guérissaient, fondaient des communautés.   Ce n’est que quelques siècles plus tard que cette idée de l’égalité entre les hommes et les femmes s’est perdue, de même que d’autres éléments essentiels du christianisme primitif.  Si donc, le christianisme, au cours des siècles, a longtemps manifesté une méfiance plus ou moins grande à l’égard des femmes et si, trop souvent encore, il limite leurs fonctions et leur influence, telle n’était pas l’attitude du Christ.

     

    Si Jésus revenait dans l’Église catholique actuelle, selon ce qu’on lit dans les évangélistes, ce n’est pas sûr qu’il serait apte à devenir prêtre...  Sa prise de position en faveurs des femmes, sa fréquentation de ceux et celles qu’on excluait du culte, sa préférence pour les pauvres et les essoufflés de la vie ne le rendraient-il pas passible d’excommunication ?

    Laurette Lepage

     

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  • Voici des commentaires que Laurette a reçu suite à sa Lettre à mon Église

    Bonjour !

        Qu'il fait bon de nous sentir les coudes, dans ce tournant difficile de notre Église!  Puisse donc le "feu" évangélique qui circule aussi dans ses marges dissidentes, réveiller un peu la dormance de l'ordre établi !  "Bienheureux les catholiques troublés, car ils sont vivants !", écrivait Dominique Quinio, rédactrice de la rédaction de La Croix.

    Bonne lecture !

    Laurette

    « Vivre en Église, c’est, au nom du Christ,

    être des inventifs qui se retroussent les manches,

     partagent leur fragilité et leur force,

     par passion pour ce monde où Dieu se tient ».

    Véronique Margron

    (Lettres aux catholiques troublés –La  Croix-Bayard)

     

    Bonjour,

    Voici quelques échos, extraits des quelque cent réponses entourant la  « Lettre à mon Église », adressée le 3 janvier 2010, au Cardinal Ouellet.  Par souci de discrétion, je n’ai pas identifié les personnes qui ont bien voulu partager leurs préoccupations, leurs déceptions, leur colère ou leur espérance.  Si les plaies du Crucifié continuent de se mêler à nos larmes, sa Résurrection nous met debout dans l’espérance.  N’est-ce pas là l’éveil d’un temps nouveau ?

    Laurette

     

    ÉHOS DE « LETTRE À MON ÉGLISE »   

     

    Je viens de lire ta lettre au cardinal. J'apprécie son contenu et je partage tes malaises. Je vois que toi aussi tu aimes notre Église et que tu voudrais qu'elle secoue un peu plus vite la poussière qui la recouvre de plus en plus, surtout depuis les années‘80.  Je viens tout juste de lire un livre de Albert Nolan, Jesus today, a spirituality of radical fredon, 2006. Il est sans doute traduit en Français. Tu l'aimeras sûrement.

     

    Pour ce qui est de moi, je travaille dans la formation de futurs prêtres, la majorité africains noirs, dans ma petite société, et je t'avoue que ce n'est pas facile d'aller à  contre-courant. La curie romaine a repris tellement de pouvoir!  Mais à côté de l'Église-Institution, il y a l'Église prophétique témoin engagée pour la justice et la paix. Cette dernière finira bien par faire bouger l'autre un de ces jours. Il ne faut pas perdre l'espérance, car, comme tu le dis si bien, une nouvelle Église est en train de naître et nous avons la joie d'en être témoins.

     

    S'il y a encore des églises pleines dans le Tiers-monde, ce n'est peut-être pas parce que les gens sont encore traditionnels, mais sans doute plutôt parce qu'ils ne sont pas tombés dans le piège de l'individualisme à outrance, comme l'explique bien Albert Nolan dans son livre.

     

    Bonne lecture et garde ton espérance et ta foi bien vivantes, encore plus ton Amour! Fraternellement.

     

    ***

     

    Je viens de découvrir ta nouvelle perle en cette nouvelle lettre que tu viens d’adresser à notre cher cardinal Ouellet.

     

    Évidemment, tu ne recevras pas le moindre accusé réception et encore moins une réponse polie, car tu frappes en plein dans le mille et la moindre réponse à l’allure mini positive pourrait être un ombrage d’acceptation. Le pauvre, il est lui-même irréductiblement pris dans le système.

     

    Tu sais, Laurette, mon expérience de vie et tout simplement la constatation que chacun peut faire montre que dans le système hospitalier le patient est de trop, dans le système scolaire, l’élève est de trop. De même, il est vrai que pour l’Église institution le chrétien allumé est de trop.

     

    Heureusement il y a l’Église mystique, qui elle, rattachée directement à Dieu, peut insuffler au croyant allumé un esprit nouveau. Toutefois, celui-ci dérange  et est rejeté par l’institution, tout comme Jésus l’a été.

     

    L’automne dernier j’ai assisté à la présentation au public d’un jeune homme qui se destinait à la prêtrise.  Il était jeune, beau, illuminé…etc, et une partie de son équipe de formation était sur place. Évidemment l’ensemble était formidable et le jeune homme présentait les qualités exigées par l’Institution. Je lui ai souhaité bonne chance, mais je lui ai aussi dit que j’aimerais le rencontrer dans 5 ans, question de savoir à quel point il aura personnalisé sa prêtrise et se sera adapté aux besoins du monde d’aujourd’hui.

     

    Malheureusement ou heureusement, ce jeune homme a repris sa route laïque aujourd’hui.

     

    Voilà Laurette, merci de cette nouvelle lettre, adressée à notre primat, merci surtout de ton espérance dans ce monde éteint, mais où la braise demeure heureusement très vive.  

    ***

     

    J'ai bien reçu votre lettre # 2 au cardinal.  Sachez qu'elle ne restera pas lettre morte de notre coté à Second Regard.  On va assurément s'en reparler à votre retour du Brésil.

     

    ***

     

    Merci pour la transmission de ce message aux propos familiers qui vient d'une personne dont l'âge surprend... C'est la preuve que nous pouvons rester jeune en raison des idées qui nous transportent.

     

     Félicitations Mme Lepage! Comme vous voyez votre lettre ne reste pas sans réponse. Elle anime le coeur d'un chercheur de Dieu comme je le suis en cette période de l'Épiphanie.  Continuez à chercher et à témoigner de la présence de Dieu comme vous le faites!

     

    ***

     

    Bravo et félicitations pour votre lettre à l’EMINENCE de Québec. . Elle décrit très bien la situation et replace les choses à la bonne place. Par mégarde j'ai égaré celle du 7 novembre 2007. Est-il possible de me la refiler ?. J'ai envoyé  celle du 3 janvier à un ami et aimerais être capable de lui adresser aussi celle  de 2007.

      

    ***

     

    Merci de tout coeur  chère Laurette, pour avoir eu le courage d'écrire  votre lettre  à M. le Cardinal Ouellet.  Merci de dire en notre nom à tous et à toutes, ce que nous percevons et ressentons depuis longtemps...  Croyez-moi, Laurette, les larmes coulent le long de mes joues  en lisant et relisant votre lettre ... parce qu'elle traduit  simplement et sereinement les sentiments qui m'habitent, m'étreignent,  tout en me sentant totalement impuissante.

     

    Vous avez le charisme d'écrire et vous le mettez au service des personnes qui souffrent   d'une situation qui perdure et malheureusement s'installe. Et, par surcroît, votre âge (87) ,  vos expériences antérieures vous permettent de vous exprimer plus librement sans être rabrouée. Merci mon Dieu!  Bref, merci de tout coeur  de l'initiative prise  par amour de l'Église de Jésus

    ***

     

    Je me sens avec toi, parmi tes "baptisés allumés" (j'adore cette expression).   Faisons notre propre Église et allons de l'avant!!  Je suis très heureux de voir ton audace se répéter face à la GSR "Grande Structure Rigide"  Ultreïa!

     

    ***

     

    Tu m'épates par ta force et ton sens de la Vie. Tu nous dis qu'il ne faut pas baisser les bras et s'endormir! Merci et un très beau voyage. Reviens nous en forme. On en a encore besoin. Prenez bien soin de vous tous.

     

    ***

     

    Bravo, mille foi bravo, d'exprimer ainsi ce que nous ressentons (et que j'ai moi-même dit plutôt maladroitement à Mgr lors de rencontres éditoriales).

     

    ***

     

    J'ai bien lu ta lettre et j'appuie. Je l'ai envoyé à mes amis.  Une suggestion: si tu demandais un geste précis comme aller à telle rencontre, créer un comité de révision ou donner ton point de vue sur un sujet ou l'autre, le cardinal pourrait peut-être se positionner plus facilement. As-tu envoyé ta lettre aux médias de ta région?

     

    Penses-tu encore qu'on peut convertir cette Église? j'ai des doutes.  Amicalement, je t'envoie le crédo de Maurice Zundel, pas mal fort et si loin des préoccupations de l'Église actuelle

    ***

     

    Quel cri prophétique! Quel courage! Quelle souffrance qui n`en peut plus. Ton message s`adresse à nous tous.  Je l`accueille comme une poussée de l`Esprit.  Un appel incontournable à la conversion. Je dois te dire que dans mon humble service, c`est ce que j`essaie de vivre avec beaucoup de gens pauvres.  Je te remercie de tout coeur et je bénis le Seigneur.

     ***

     

     Quelle audace! Courageuse aînée!  Merci pour ce partage, "souffle" de l'Esprit qui "souffle" où il veut et souvent où il peut....   

      

    ***

     

     En lisant ton texte j'en ai eu les larmes aux yeux. Pour moi, le Vatican doit exister mais la curie romaine (ou maintenant l'opus Dei), cette dernière doit disparaître au plus sacrant. Pour ma part tout ce qui vient de la curie, c'est la poubelle au plus vite. Mon seul maître est "JESUS" et nul autre. Si on avait compris son message dès le début de la chrétienté, tous auraient embrassé ce message d'AMOUR irrésistible qu'est celui du Christ. Juste avant sa montée au paradis, il nous a donné un seul commandement à suivre soit "aimez-vous comme moi je vous ai aimés" Or comment comment Jésus nous a-t-il aimé?

     

    Et bien il s'agit pour moi de lire sans cesse un peu tous les jours quelques pages des évangélistes et de découvrir avec de plus en plus d'emballement comment Jésus nous a aimés. Alors son commandement : « : faites la même chose », comme elle est facile cette doctrine emballante de Jésus et que tous peuvent suivre peu importe leur quotient intellectuel.

     

     Lorsque tu lui dis, "fini les éminences, monseigneur etc"  comme j'aurais aimé que tu lui dises bien clairement : vous,  Marc Ouellet, vous n'avez droit de revendiquer qu'un seul titre" Marc, apôtre de Jésus." Notre roi de l'univers qu'était Jésus ne portait ni or ni couronne royale ni vêtement autres que portaient les gens du peuple. Êtes-vous au-dessus de Jésus pour vous vêtir d'ornements royaux et luxueux  tels que l'on voit dans l'opéra "Boris Goudounov"? J'en connais un qui s'est cru au-dessus de Dieu soit:lucufer et l'on sait ce qu'il lui est arrivé.

     

    Donc c'est en vous abaissant dans la plus stricte Humilité et fini les joutes d'opéras, que vous vous grandirez.  Voilà ma chère Laurette le ton que j'aurais employé, Revenez au temps de Jésus et de ses disciples ou apôtres, c'est le seul chemin pour la renaissance d'une nouvelle dépouillée de la curie et que l'esprit saint remplira de fécondité au-delà de tout ce que nous pouvons espérer. 

     

     Comme tu le vois, ma chère Laurette, nous pensons la même chose, mais je suis plus direct et draconien que toi. 

     

    ***

     

    Ta lettre exprime très bien nos malaises et nos aspirations.  J'ai voulu partager cette réflexion avec des amis-es.  Quelques personnes ont réagi.  Je te fais parvenir ce qu'elles m'ont confié.  J'ai effacé leurs noms et adresses par souci de discrétion. Je tenais toutefois à ce que tu saches ce que ta lettre inspire et t'inviter à continuer d'interpeller.  Parmi ces gens, d'humbles personnes, des gens engagés en Église, des prêtres, des religieuses, des évêques.

     

    Merci d'être là pour nous et avec nous.  Oui, oserons-nous affirmer notre liberté?

     

    ***

     

     Pour ton information, sache que depuis sa mise en ligne le 8 janvier, ton article a été vue 438 fois a 23h11 le 12 janvier.  Bravo !  il est de loin l’article le plus lu.

     

    ***

     

    J'ai eu l'opportunité de lire la lettre que vous avez adressée au cardinal Ouellet.  Je tiens à vous dire que vos propos sont très justes et vrais et que notre église, hélas, me déçoit grandement.  J'espère que le dit évêque, aura au moins la politesse d'accuser réception de votre lettre.

     

     Notre église, hélas, se renferme et refuse la réalité du monde actuel.  L'accueil y est pitoyable et le discours,  autoritaire et moralisateur, continu... Les ecclésiastiques sont loin des laïcs, du monde ordinaire.  Nous, les femmes, qui avons toujours assuré  la transmission de la foi  et qui sommes dévouées au service liturgique et autres, nous ne sommes pas entendues, pour ne pas dire ignorées.

     

    Ce monde d'hommes se contente d'appliquer la loi du droit canon : ça c'est important.... J'ai eu l'expérience de n'être pas entendue, d'être ignorée comme vous, suite à une lettre de réflexion, adressée à notre évêque, concernant le maintien ou le retrait de l'absolution collective dans notre diocèse.

     

     Je pense que nous devons, malgré tout, continuer notre route  et croire que l'Esprit souffle où il veut et qu'Il est plus fort que tout. ..Je vous félicite  pour votre courage et votre témoignage, et je pense que votre parole sera un jour retentissante... 

     

    ***

     

    Merci beaucoup pour la lettre que je viens de recevoir.  Tu as bien raison, je partage avec toi les idées quI y sont énoncées.  En passant, je dois t'avouer que je ne connais pas Laurette Lepage.

     

    La période que nous traversons nous montre une Église complètement absente au monde.  C'est malheureux.   Il me semble qu'il n'y a pas si longtemps, même si on la sentait essoufflée, on la savait là et très préoccupée des problèmes du monde de son temps et ses interventions trouvaient encore quelques échos. La division que je pressens parmi les évêques me fait mal.  Tu sais, jai été plus de 45 ans dans leur milieu.

     

     Il est clair que la centralisation romaine, avec un Ratzinger que je comprends mal, les éclaboussures de Ray Lahey (Je te confie que c'était un gars que j'admirais ! ), les retours en arrière dans bien des diocèses,etc.m'affligent. 

     

     Ici, sous l'inspiration d'un de mes jeunes prêtres, des pas sont faits en avant avec les petits groupes, mais j'ai crainte que ces petits groupes oublient qu'ils sont dans " le monde ». . Un monde où l’Esprit Saint est à l'oeuvre en chacune de ses composantes et, comme et, comme le dit Laurette Lepage, au coeur de chacun de ses membres ,  qu'ils soient dans l'Église officielle ou en dehors. Les laïques sont l'Église : il ne faut pas non plus l'oublier.

     

    Nous aurions bien des choses à nous dire : parlons-en à Celui qui tend l'oreille à nos prières et continuons de garder " la joie dans l'espérance" 

     

    ***

     

    L'Épiphanie vous a apporté lumière, courage et audace pour réclamer de notre évêque, une Église plus ouverte à l'Évangile, à Jésus et à son Esprit.  Vous êtes vraiment une prophète d'aujourd'hui, saisissant avec foi et espérance les grands besoins de notre monde.  De nombreux chrétiens, comme vous, ont mal à leur Église.  Malheureusement, les prophètes n'ont jamais été acceptés en haut-lieu, mais ils ont apporté espérance au peuple de Dieu.   C'est ce que vous faites, avec vos talents et la jeunesse de votre âme.

     

    Merci, chère Laurette, de nous partager votre passion pour l'Église. Puissiez-vous, cette fois-ci,  recevoir une réponse pleine de douceur et de tendresse !   Votre coeur en sera ravi; c'est ce que je vous souhaite.

     

    ***

     

     

     

    Et pour le dessert....

     

     

    Bonjour,  Mme Laurette

     

    Je suis un «jeune » évêque de 87 ans, et je viens de terminer la lecture de votre  «LETTRE À MON ÉGLISE » du 3 janvier 2010.  C'est le Père Jean-Paul Asselin  qui m'a fait ce beau cadeau.  Car ce fut un vrai plaisir de lire cette lettre.. J'y ai retrouvé le souffle du Concile Vatican II.

     

    Avec un courage respectueux, vous dites à votre évêque, dans quelle Eglise vous voulez vivre.  Notre Église, elle est un peu comme Nicodème : elle est vieille et elle se demande si elle peut renaître. Ce sont des personnes comme vous, qui la feront renaître.  Merci, d'être cette bâtisseur de l'Eglise de demain !

     

    Je suis un des très rares évêques survivants, des quatre sessions du Concile... Dernièrement, pour célébrer le 50e anniversaire de l'annonce du Concile, je me suis commis à publier un magazine sur le Concile.  Histoire de nous remettre à l'heure du Concile, de nous RE-CONCILIER.  Je pourrais vous en envoyer une copie si vous le désirez.  Depuis la parution de ce magazine, j'ai repris la route : j'en suis à ma 28e rencontre-conférence.

     

    Je me recommande à votre prière.  Au service de la même Église,

     

    Paul-Emile Charbonneau

    Vieux Père du Concile et ex-évêque de Hull.


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  • laurette_lepage.jpg

    Bonjour,



    « Il est des moments, où les rêves les plus fous semblent réalisables, à condition d'oser les tenter » (Bernard Werber). Si j’ouvre cette seconde lettre au Cardinal, c’est qu’elle porte l'inquiétude de nombreuses personnes sans voix ou qui n’osent pas parler, mais qui vivent la même souffrance ou qui n’ont plus d’espoir. Oserons-nous affirmer notre liberté tout en demeurant signes d’un amour fraternel ?






    Québec, 3 janvier 2010.

     

    Cher Monseigneur Ouellet,

     

     Le 7 novembre 2007, je vous adressais une lettre à laquelle je n’ai jamais eu de réponse, mais je me console en pensant que des lettres comme la mienne, vous en avez reçu bien d’autres.  Et, que répondre ?..  En gros, je vous parlais de « mon mal à l’Église, du décalage entre le message tout de fraîcheur et de liberté de l’Évangile et le discours abstrait, lourd et moralisateur d’une institution qui semble agoniser ».  J’avais alors 84 ans.  J’en ai aujourd’hui 87, mais je n’ai pas beaucoup vieilli, puisque je reviens encore avec les mêmes malaises.

     

    Ce matin, jour de l’Épiphanie 2010, en méditant les paroles de la liturgie : « Debout, Jérusalem !  Resplendis : elle est venue ta lumière », j’ai peine encore à retrouver mon espérance.  Face à la crise que nous vivons, ou plutôt, à la mutation d’un monde qui change à jamais, je me sens partagée et coincée entre la tendance de revenir aux bonnes vieilles recettes du passé pour surmonter la crise, et la conscience toujours croissante, qu’il y a une autre manière de traduire la foi  et d’être Église dans le monde d’aujourd’hui.

     

    Au fond, ce qui se joue au plan ecclésial, c’est une lutte entre Vatican II et un retour en arrière.  Faute de regarder en avant et d’inventer du nouveau, on tâche de « repatcher » ce qui est en train de crouler : fermetures d’églises, re-regroupement des paroisses, importation d’un clergé étranger, etc.  Le tout, appuyé  par un discours de la peur du modernisme, du relativisme, de la culture de la mort.  Quel contraste avec la Bonne Nouvelle de Jésus qui, au contraire, n’est que joie, respect, tendresse, guérison des peurs et des détresses, espérance à travers toutes les situations !

     

    Heureusement, les laïcs catholiques sont de plus en plus nombreux à sortir de la peur et à engager leur foi dans le monde d’aujourd’hui et souvent, à côté ou en dehors de l’Église officielle.  Depuis Vatican II, l’intelligence de la foi s’est développée avec les études, l’accès à la Bible, le partage en petits groupes.  Et que dire des effets de l’internet, des moyens de communications toujours plus sophistiqués ?  Mais l’institution ignore souvent ou suspecte encore les responsabilités prises hors de son contrôle.  On préfère un christianisme replié sur les rites. 

     

    Les chrétiens d’aujourd’hui ne veulent plus être traités comme des enfants. Selon eux, le langage de l’Église est devenu désuet, ennuyeux, répétitif, moralisant, totalement inadapté à notre époque.  Le discours répété à satiété sur le mariage, l’avortement, l’euthanasie, l’homosexualité, le mariage des prêtres, les divorcés remariés, ne touche plus personne.  Il ne suffit pas de répéter de vieilles rengaines, mais d’inventer un nouveau langage qui redise la foi de façon pertinente et signifiante pour le monde d’aujourd’hui.  Nos chrétiens ont appris à penser par eux-mêmes et ne sont pas prêts à avaler n’importe quoi.  Parce que la foi qu’on leur présente est abstraite, cérébrale, dogmatique et parle très peu au cœur et au corps, plusieurs vont chercher ailleurs la nourriture qu’ils ne trouvent pas dans nos églises.  Ils ont soif de sens.  Ils veulent entendre une parole de vie et de liberté et souhaitent une véritable co-responsabilité dans une Église « peuple de Dieu ».  La force révolutionnaire de la semence n’est-elle pas déjà là, plutôt que dans une église de brique ?  Même dans la rue, ils font église, quand ils ont le geste gratuit d’amour pour l’autre, l’inconnu, l’étranger. 

     

    Au passage de 2010, c’était beau de voir la Grande-Allée, à Québec, véritable temple à ciel ouvert, où des milliers de personnes, oubliant toute frontière, saluaient dans la fête, la nouvelle année.  C’était beau aussi de voir, autour d’une table familiale, des gens partager, jusqu’aux petites heures, leur rêve de voir une Église plus proche de la vie et du vrai monde. Quand aurons-nous, dans ces petits groupes, un prêtre, homme ou femme, issu de cette même communauté, pour célébrer l’eucharistie, à la fin d’un tel partage, comme aux premiers temps ?  L’année sacerdotale ne serait-elle pas une occasion unique de répondre à ce souffle de l’Esprit qui se manifeste dans ces appels latents de notre monde d’aujourd’hui  ? .

    Les ministères ordonnés, si encouragés par le Concile, et les vocations sacerdotales n’émergeront-ils pas parmi les petits groupes et les communautés vivantes, plutôt que dans les séminaires ?   Cela impliquerait bien sûr, une relation plus profonde d'amitié entre prêtres et laïcs.   Moi, disait le Christ, je vous appelle mes amis parce que je vous ai révélé mes secrets. Pour qu'il y ait de l'amitié il faut aussi savoir communiquer ses sentiments, partager sa vie spirituelle et éliminer les clôtures. On ne peut appeler un ami « excellence », « éminence » ou « monseigneur »; nous sommes tous frères ! Adieu donc, les trônes, les mitres et les encensoirs !   II y a de quoi rêver, en pensant à Celui qui a lavé les pieds de ses amis pendant qu'ils étaient tous à table...

     

    Vatican II a voulu pour l'Église une nouvelle image de dialogue et d'ouverture. Hélas ! cette image est de plus en plus repoussée. On règle les problèmes, non par les dialogues et la discussion ouverte, mais uniquement par les directives dictées d'en haut. La centralisation romaine est encore plus forte qu'avant le Concile. Les Églises locales n'ont plus d'autonomie et les évêques ne peuvent que recevoir des ordres du pape et de la curie.  C'est du côté de la collégialité que Vatican II a essuyé son plus grand échec.

     

    Face à ce constat plutôt accablant, l'Église se console en constatant un certain renouveau dans son aile la plus traditionnelle, ainsi que dans les pays du tiers-monde. Puis elle met sa confiance dans le Seigneur qui l'a soutenue pendant vingt siècles et qui a les promesses de la vie éternelle.  Mais prend-elle en considération la Constitution Lumen Gentium qui reconnaît que la communauté est animée par l'Esprit qui parle au plus intime, dans la liberté de conscience et que c'est en s'adressant à chacun(e) que ce même Esprit guide le Peuple de Dieu ?

     

    Devant ces déceptions et la lenteur des pas en avant, il ne faut pourtant pas baisser les bras.  La pire attitude serait la résignation.  L’espoir et la volonté d’agir s’imposent.  Même  si  les raisons de se plaindre et de se lamenter ne manquent pas, il faut le courage d'agir avec détermination, à la base, pour que se façonne une Église plus vivante.  Car l'Église n'est pas seulement le pape, la curie romaine et les évêques. Il n'y a rien qui empêche les gens de suivre Vatican II et d’agir selon ses élans et ses principes.   Mais des baptisés allumés, ça fait peur !

     

    C'est avec joie que je découvre autour de moi, mais dans les marges, une Église très vivante, en dépit des temples presque vides.  Pendant qu'une Église s'éloigne de nous, se replie sur le passé et nous devient étrangère, une autre Église montre de nouvelles pousses où la Vie nous incite à creuser notre rencontre avec Jésus de Nazareth, dans nos communautés et dans la lutte pour un monde plus juste et plus humain. « Debout les pauvres, car le Royaume des cieux est en vos mains ! ».  C'est ainsi que les gens que je fréquente à la base, me gardent chevillée aux cris et aux espoirs de notre monde, là où l'on découvre un Autre Visage   Pour moi, ces lieux sont les pierres d'attentes de l'Église de demain.  Je continue pourtant, comme je le disais au début, coincée entre les vieilles outres et les nouvelles, et cela est inconfortable !

     

    Cher Monseigneur Ouellet, des cris comme celui-ci, vous en recevez de toutes les sources et sur tous les tons. Pouvons-nous encore espérer quelque chose de cette Église, ou vaut-il mieux s'accrocher à cette parole de Jésus : « Laisse les morts enterrer leurs morts et toi, va annoncer le royaume de Dieu » (Le 9, 59) ?

     

    Dans l'espérance que le vin nouveau coulera bientôt dans des outres neuves, nous nous laissons réconforter par cette parole de saint Paul : « Tenez bon, c'est pour que nous restions libres que le Christ nous a libérés » (Ga 5, 1). Et si le Souffle nous fait vivre, que le Souffle aussi nous prenne dans son sillage (5, 25) !  Allons, suivons les Mages et cherchons encore l'étoile, même si la fatigue, l'usure, se mettent souvent en travers de nos pas.  La foi ne craint pas, même si parfois c'est la nuit...

     

    Laurette Lepage


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  • paix-et-justice.JPG
    Bonne année

     Sainte année 2010 !

     

    laurette_lepage.jpg Une année s'achève, une autre prend la relève. Et celle-ci entame une nouvelle décade...  On s'embrasse, on mange de la dinde, de la tourtière, du foie gras...  Et disons-le, ces fêtes familiales ou amicales sont une merveilleuse occasion de rapprochement, de partage et de dépassement provisoire.  La fête casse les habitudes et brise l'usure du temps.  Pas de fête sans plaisir, sans exubérance, sans débordement!  Une fête trop raisonnable n'est plus une fête.

     

     Mais cette joie parfois débridée, ferait-elle oublier le fait que nous avons tous pris une année de plus et que nous sommes des voyageurs en route... vers l’autre rive ?  Cette date est inscrite au calendrier, mais pas à notre agenda...  Cette joie ferait-elle oublier aussi que des personnes sont exclues du rendez-vous et que pour d'autres, ces fêtes sont quasi insupportables: amours brisées, chômage, itinérance, maladie ?

     

    Devant la fuite du temps, on ne peut rien retenir.  Tout passe :  la beauté, la jeunesse, la gloire…  D'un autre côté, dans le temps, nous ne vivons jamais que pour l'avenir :  nos attentes, nos projets, nos rêves.   C'est l'espoir qui fait vivre, dit-on.  Et n'est-ce pas le sens de l'éternité qui est accroché à tous ces moments fugitifs ?

     

    Qu’en sera-t-il de l’année qui vient ?  L'essentiel, ce n'est pas de savoir de quoi demain sera fait, mais surtout ce que nous allons faire aujourd'hui pour demain.  Tous les jours, à la télé, nous regardons comme un spectacle habituel, les annonces de réchauffement planétaire, de pays sans eau, de famines, de catastrophes naturelles et de guerres pour le pouvoir et l’argent.  Et nous oublions que nous sommes partie prenante de ce qui advient.  Nous sommes aussi liés à notre environnement qu’à un cordon ombilical.    De  plus, nous sommes des acteurs responsables de notre destin, capables d’agir sur le cours des événements.  Ce monde demeure mystérieusement dans les mains de Dieu.  Un monde qu’il a créé et confié à notre propre effort pour le parfaire.

     

     Alors, de quoi sera fait demain ?   Il serait si facile de nous prendre tous par la main, au lieu de créer des murs, des frontières entre nous... Il serait si vital de gérer les ressources de notre planète pour l’ensemble du monde, au lieu de permettre à quelques-uns de vivre dans la démesure en asservissant des milliers d’autres...

     

    Dans cette espérance d’un monde plus beau à faire ensemble, souhaitons-nous, selon la vieille formule : « Bonne année, bonne santé, le paradis à la fin de vos jours ».  Et pourquoi pas « le paradis dès ici-bas », puisqu'il est déjà présent dans cette paix du coeur, cette joie profonde accordée à qui aime Dieu?

     

    Avec tendresse,

     

     Laurette.


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  •  

     

    Joyeux Noël!
    Bonne année!

     

      

    joseph-jesus  Dieu vient se nicher

    comme l’être vivant dans une “matrice”,

    en dehors de toute notion de mérite,

    simplement parce que c’est  la vie,

     la Vie de l’Esprit”..

                                                                                                          (Lytta Basset)

     

    Chers parents, ami(e)s, complices,

     

             Noël !  L’heure où Dieu  prend corps humain., L’heure où Dieu  se mêle à notre  voyage, dans l'espace où se développent nos guerres et nos paix, nos incertitudes et nos rêves.  Il n’a plus qu’un nom : celui que lui-même se donne : Emmanuël, Dieu avec nous.  Un Dieu si proche qu'il prend notre visage, qu'il épouse nos soucis et nos peines, nos épreuves et nos espoirs.

     

    En ces temps où notre humanité chancelle dans le cauchemar de ses peurs et de ses angoisses, il fait bon regarder au-delà de nos chemins de terre et entendre ces mots de la liturgie comme une note de réveil:   “Redressez-vous et relevez la tête, car votre délivrance est proche” (Lc, 21, 28).

     

    De mon côté, mes 87 ans tout frais sonnés, n’ont pas ralenti beaucoup mes élans.  À preuve, ce voyage au Brésil (un groupe de sept), en janvier, pour le pèlerinage international des Fraternités du Serviteur souffrant, à Santa Fé.  Encore une fois, je rends grâce pour l'année qui se termine, ponctuée de  tant d'événements qui nous ont rassemblés dans la solidarité et l’engagement.  Il suffit de nommer la célébration des 20 ans de la Fraternité de l’Épi et  la publication de mon  livre « Debout les pauvres ! ».

     

    Les activités demeurent encore intenses, continues, au milieu d’un quotidien tricoté serré : l’écriture, la correspondance, les appels téléphoniques, avec des nouvelles petites et grandes, des cris à écouter, des peines à consoler, des joies à partager. Il y a aussi les rencontres mensuelles des groupes de Maucice Zundel, de Foi et Partage, du Foyer de Charité, des Heures bénédictines, et bien sûr, celles, hebdomadaires, de l’Épi.  Rencontres toujours vivifiantes et porteuses d’une joie profonde.  Cette vie débordante m’est, tout compte fait, une source de tant de joie, de solidarité et d’amitié !

     

    Et pour couronner la semaine, je réserve ce vendredi  intouchable de poustinia, pour une rencontre silencieuse et priante avec le « Bien-Aimé ».  C’est là que je vous rejoins le plus personnellement.

     

    Il me reste donc à vous souhaiter une année 2010, toute de paix et de sérénité. Que le Seigneur fasse briller son visage sur vous et sur tous les habitants de la terre, spécialement les plus démunis!

     

    Joyeux Noël  !  Bonne année !

     

    Laurette
    Lepage 

     

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  • RELEVEZ  LA TÊTE !

    C’est de nouveau l’Avent !  Cette période nous laisse toujours avec un double sentiment. Nous savons que nous allons vers Noël et cela évoque pour nous la joie.  Mais nous savons aussi que nous entrons dans une période de frénésie commerciale et, plus encore, une période où la solitude et la pauvreté se feront encore plus cruellement sentir.

    Les textes apocalyptiques que nous lisons ces dimanches-ci ne peuvent être pris dans une chronologie d’événements à venir. Il faut tout simplement les lire au présent.  Et l'actualisation de ces récits est vraiment facile. Il suffit de constater les bouffées d’inquiétude, souvent amplifiées. que nous apportent quotidiennement les médias : la pandémie de la grippe A (H1N1), la guerre mondiale, le trou d'ozone, la pollution nucléaire ou chimique, le sida, le réchauffement de la planète...  C’en est assez pour dire ce qui, en ce moment, alimente nos angoisses. Il n'est pas nécessaire de lire l'avenir dans une boule de cristal.  Les récits apocalyptiques racontent le présent. Comment voulez-vous que ce ne soit pas la fin ?

    Avec Luc, nous avons donc une série de signes sous les yeux pour dire que oui, nous sommes bien dans les temps de la fin. Tout ceci fait que nous n'allons pas être orientés par le récit des crises et des angoisses, mais nous allons être orientés par ce qui a commencé et qui va être terminé.  C'est l'espérance qui va nous diriger.

    « Redressez-vous et relevez la tête : votre délivrance est proche » (Lc 21, 28).  Quand les épreuves commenceront à s'accumuler, quand toute issue sera fermée, quand la violence semblera victorieuse, quand tout appui se sera éloigné, quand Dieu lui-même vous paraîtra trop absent pour écouter, trop lointain pour répondre, redites-vous: "La délivrance est proche; le Fils de l'Homme vient nous sauver!" La foi n'est pas seulement une espérance pour l'avenir, elle nous donne dès aujourd’hui, la possibilité de vivre sans les peurs et sans les angoisses. Nous devrions peut-être regarder un peu moins la télévision qui nous rend malade de ses angoisses et lire davantage la Bonne Nouvelle de Jésus qui vient vers nous avec la paix.  

    Noël est une fête contre la peur, contre toutes les peurs, contre toutes les angoisses. Ne nous laissons pas dérober le message de paix, de douceur, de  pardon et de joie que nous apporte l'enfant dans la crèche. Regardons plus loin, plus haut, inscrivons nos vies dans le temps ouvert par celui qui est venu, et soyons tendus vers lui, car il vient encore.

    Noël est une fête contre la peur et ce n'est pas seulement le moment un peu sensible de la nuit de Noël qui doit le dire, mais ce sont nos actions. Osons donc la solidarité et le partage. Soyons pour nos proches, des signes qui aident à vivre et à croire.  Nous serons ainsi des étoiles dans la nuit de notre monde.  Est-il vrai que Dieu vient vers nous ?

    Laurette Lepage 


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  • ICI ET MAINTENANT

    « Si tu vas au bout du monde,
    tu trouves des traces de Dieu,
    si tu vas au fond de toi,
    tu trouves Dieu lui-même »
    (Madeleine Delbrel).

     
    Nous avons tous entendu parler du hic et nunc, ces mots latins qui signifient « ici et maintenant ». Par cette expression, les sages d’antan nous parlaient du moment présent, ce point de jonction entre le passé et le futur, où la pensée doit s’établir pour trouver la paix. « Ici et maintenant » est une expression qui est passée bien sûr dans notre langage postmoderne, mais qui s’est émoussée au point de ne plus signifier aujourd’hui qu’une impatience fébrile : « Je veux tout et tout de suite ».

    Vivre ici et maintenant, c’est habiter vraiment notre vie. C’est prendre conscience en soi, qu’on est déjà habité par une Présence, qu’on la nomme silence, expérience d’être, ou tout simplement, Dieu. 

    Vivre ici et maintenant, c’est accepter de bon cœur le réel, tel qu’il est maintenant et non comme nous le rêvons. L’accepter avec ce qui  plaît ou déplaît : soleil ou pluie, rencontres dynamisantes ou difficiles, santé ou maladie, réussites ou limites.  Tout cela, voilà notre vie, c’est le lieu de la Présence de Dieu, le lieu où il nous fait signe. 

    Vivre ici et maintenant, c’est rester attentif au réel, en évitant de nous projeter dans un ailleurs imaginaire ou de nous installer dans un passé idéalisé. C’est encore ne pas nous laisser envahir par les regrets, les impatiences qui surgissent à la moindre occasion, quand les choses ne vont pas ainsi que nous le désirerions.

    L’accueil du réel « ici et maintenant » se joue dans les toutes petites choses : une marchette devant moi quand je suis pressée, une visite qui modifie mes projets, l’imprimante de l’ordinateur qui bloque. Tout cela me provoque. C'est un long apprentissage qui me permet d'entrer en souplesse dans ce quotidien.

    Quand le cœur s’accorde à cette attention au moment présent, nos humeurs et impressions cessent d’être nos maîtres. Alors s’établit en nous cet instinct spirituel qui nous (fait) réagir au bon moment, de la bonne manière, avec le regard de Dieu.  Il est des hommes et des femmes, pour qui le temps n'existe plus. Ils ont appris une grande vérité, celle de l’ici et maintenant, du hic et nunc! Instant présent où hier, aujourd'hui et demain ne sont plus que l'éternité commencée...

    Laurette Lepage
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