• Pour tenter de « dire » l’indicible…

    L’incrédulité de Thomas

    L’incrédulité de Thomas
    Rembrandt, 1634

    Huile sur bois, 51 x 53 cm
    Musée Pushkin, Moscou

    Jésus apparait à ses disciples : Jean 20, 19-31 
    Les lectures : Actes  4, 32-35 ; Psaume 117(118) ; 1 Jean 5, 1-6 
    Les citations bibliques sont tirées de la Traduction liturgique officielle.

    Les récits d’apparition du Christ ressuscité sont nimbés de mystère et ce, dans nos quatre évangiles ! Comment raconter l’indicible ? Chacun des évangélistes joue l’équilibriste quand il rapporte une expérience au-delà des mots, celle de ces rencontres entre le Ressuscité et les disciples. Il doit à la fois affirmer la réalité de la résurrection de ce Jésus crucifié et traduire l’altérité de sa présence. Les récits oscillent donc entre continuité et nouveauté : ce Jésus Vivant est bien le même, l’homme de Nazareth qu’ils ont suivi, mais sa corporéité et la façon d’entrer en relation avec lui sont désormais radicalement nouvelles !

    Dans ces deux récits d’apparition que nous sert Jean, en ce deuxième dimanche de Pâques, la continuité est bien établie par le fait que le Ressuscité, deux fois plutôt qu’une, montre les plaies guéries de sa crucifixion. « Pas de doute, Thomas ! C’est bien lui, vivant ! » Toutefois, la double mention de la maison verrouillée lors des deux visites de Jésus sous-entend la radicale nouveauté de sa présence aux disciples. Son corps n’étant plus soumis aux lois physiques, il peut venir à sa guise rejoindre les disciples éblouis. La mystérieuse nouvelle corporéité de Jésus après sa résurrection est aussi souvent évoquée par la difficulté qu’ont ses témoins oculaires à le reconnaître d’emblée, comme ce sera le cas de Marie de Magdala dans le récit d’apparition qui précède l’évangile de ce dimanche (Jn 20,15[1].

    Première apparition : de la paix, de la joie, du souffle…

    La veille de sa mort, dans la nuit des confidences de la dernière cène, Jésus avait bien promis à ses disciples le don d’une paix profonde que le monde ne peut donner (Jn 14,27 ; 16,33), de même qu’il leur avait donné l’assurance que leur affliction se changerait en joie lorsqu’ils le reverraient (Jn 16,20.22). Paix et joie ! Voilà que cette double promesse se réalise sous nos yeux lorsque Jésus ressuscité leur apparaît au soir du troisième jour. Il fallait l’événement pascal, sa victoire sur le monde, pour que cela advienne. La première parole du Ressuscité en est donc une de paix et celle-ci est source de joie dans le cœur des disciples.

    Parce qu’elle ouvre une porte d’éternité à l’aventure humaine, la victoire de Jésus sur la mort recrée l’humanité. Aussi, Jésus ressuscité, au soir même de sa résurrection, le premier jour de la semaine [2], pose-t-il un geste créateur rappelant celui qu’avait posé Dieu à la création du premier homme au livre de la Genèse (Gn 2,7[3] : il souffle sur ses disciples le souffle divin, l’Esprit-Saint. Ce souffle, outillera les disciples pour la mission pour laquelle ils sont envoyés, réalisant encore une fois une promesse de Jésus la veille de sa mort, soit celle de l’envoi de l’Esprit Paraclet (Jn 14,16.26 ; 15,26-27 ; 16,7.13-15).

    Seconde apparition : profession de foi et béatitude

    Huit jours plus tard, c’est-à-dire encore un dimanche, une seconde apparition aux disciples et à Thomas. Indéniablement, l’auteur de l’évangile cherche à induire auprès de ses destinataires (sa communauté d’abord et tous les lecteurs futurs de son évangile) l’idée que le jour et le lieu privilégiés de la rencontre du Ressuscité est bien le dimanche à l’occasion de leurs rassemblements liturgiques en mémoire de Lui ! Toute cette seconde apparition a d’ailleurs davantage pour but de parler aux destinataires de l’évangile que de rapporter le vécu des disciples. Thomas nous sera utile parce que l’incrédule devenu croyant devient le prototype de tous les chrétiens à venir qui feront ce même passage à la foi. Si Thomas a dû voir avant de croire, est-il coupable pour autant ? C’est lui qui, dans tout l’évangile de Jean, formule la profession de foi la plus parfaite ! Et de plus, il permet au Ressuscité de formuler la béatitude honorant l’expérience croyante de l’écrasante majorité des disciples jusqu’à la fin des temps, c’est-à-dire ceux qui n’auront pas eu cette chance d’avoir été témoins oculaires de Jésus sorti vivant du tombeau.

    Afin que, par votre foi, vous ayez la vie en son nom…

    Voilà les mots de la première conclusion de l’évangile de Jean [4]. Ils sont sûrement ceux qui fermaient l’évangile dans une mouture plus ancienne du texte de Jean. Le ton est personnel, on y entend presque la voix du témoin à la source du quatrième évangile, le disciple que Jésus aimait. Pour lui, tout de la vie de Jésus a valeur de signe et surtout sa mort-résurrection. Aussi, de son propre aveu, a-t-il dû opérer un tri dans ce qu’il a choisi de raconter selon un but bien précis : nous faire croire ! Signe de quoi ? Signe que Jésus est ce Messie promis à Israël, accomplissant les Écritures, bien sûr ! Mais plus profondément, son but est que nous saisissions, comme lui l’a fait en reposant la tête sur la poitrine de Jésus lors de la dernière cène, d’où est Jésus ! Il est de Dieu, il est Dieu fait chair, ce qu’affirmaient d’emblée, au Prologue (Jn 1,1-18), les premiers mots de l’évangile. Et de croire que Jésus est tel, nous fait entrer dans la vie véritable, une vie en plénitude selon les mots de la prière de Jésus, rapportés par Jean : Or, la vie éternelle, c’est qu’ils te connaissent, toi le seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus Christ. (Jn 17,1)

    [1] Autres occurrences de cette difficulté à reconnaître Jésus : Mt 28,17 ;  Lc 24,16 ; Lc 24,37-43 ; Jn 21,4.

    [2] Dans la première création, au livre de la Genèse (Gn 1,1 -2,4), Dieu crée en six jours et se repose de son œuvre le septième jour. La mention du « premier jour de la semaine » renforce l’idée qu’une nouvelle création commence avec la résurrection du Christ.

    [3] Pour le bibliste familier avec le texte grec de l’Ancien Testament (Septante), le rapprochement entre Gn 2,7 et Jn 20,22 est d’autant plus aisé à observer qu’il s’agit du même verbe grec, conjugué au même temps et à la même personne dans les deux cas.

    [4] L’évangile de Jean comporte un 21e chapitre, qui relate une 4e manifestation du Ressuscité. D’aucuns croient en effet que ce 21e chapitre est un ajout postérieur servant d’épilogue, au terme duquel chapitre, l’évangile sera conclu une seconde fois (Jn 21,24-25).

    Patrice Bergeron

    Source : Le Feuillet biblique, no 2571. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l’autorisation du Diocèse de Montréal.

    source http://www.interbible.org/interBible

    -------------------------

    Articles récents- OFS-Sherb

    votre commentaire
  • L’évangile selon Carey

    John 3:16

    La référence biblique sur le casque de Carey Price

    Le fils médiateur et le jugement : Jean 3, 14-21
    Les lectures : 2 Chroniques 36, 14-16.19-23Psaume 136 (137)Éphésiens 2, 4-10
    Les citations bibliques sont tirées de la Traduction liturgique officielle.

    L’extrait de l’Évangile selon Jean proposé par la liturgie de ce dimanche est très important pour Carey Price. En 2016, il a inscrit « John 3:16 » sur son casque pour évoquer ce verset biblique : Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle (Jn 3,16). En entrevue, le gardien de but du Canadien de Montréal a dit que c’est le verset biblique le plus important pour lui. En effet, les Églises évangéliques présentent ce verset comme une synthèse de l’ensemble du message biblique. Essayons de mieux le comprendre par un regard sur l’ensemble de ce passage.

    Qui parle?

    Coupé des versets précédents, l’extrait lu dans la liturgie ne révèle pas qui énonce les paroles. Un regard rapide dans l’évangile montre qu’il est situé à la fin du dialogue entre Jésus et Nicodème, un notable juif. Dans cet échange, Jésus parle du royaume de Dieu en termes de naissance en utilisant un mot grec à double sens :« anôthen ». Ceci peut être traduit par « naître à nouveau », ou par « naître d’en haut ». Nicodème interprète ce mot de façon très littérale comme un appel à une nouvelle naissance. Jésus rectifie le tir en affirmant qu’il faut naître d’en haut par l’Esprit/le souffle.

    Curieusement, le dialogue entre ces personnages cesse autour du verset 13 pour laisser place à un monologue au sujet du Fils qui est descendu du ciel, envoyé par le Père pour être élevé afin de sauver le monde. Mais, qui énonce ces paroles? Est-ce que Jésus continue de parler seul jusqu’au verset 21? Dans un tel cas, Nicodème cesse tout à coup d’intervenir et laisse Jésus parler sans l’interrompre. Ce style est pourtant très différent du dialogue qui précède. Une autre option est de voir qu’il s’agit plutôt de la voix du narrateur de l’Évangile qui se permet de continuer l’échange en précisant pour les lecteurs l’identité de Jésus et sa mission selon l’angle particulier qu’il présente par cet évangile.

    La question de l’attribution de ce texte à Jésus ou au narrateur permet de voir que les discours attribués au personnage de Jésus chez Jean sont très proches des commentaires du narrateur de l’Évangile. Ce détail permet de voir que nous n’avons pas accès au verbatim de ce qui s’est passé un jour lors de la rencontre entre Jésus et Nicodème, mais bien d’une réinterprétation de cet évangile par laquelle l’auteur fait parler Jésus comme lui. Le résultat est que contrairement aux autres Évangiles, le personnage de Jésus chez Jean parle beaucoup de lui-même. Et, il le fait en transmettant la théologie propre à cet Évangile.

    Un peu de christologie johannique

    Cet extrait permet de saisir le regard particulier de Jean sur l’identité profonde de Jésus. Il est le Fils de l’homme descendu du ciel (v. 13) qui par la suite, doit être élevé (v. 14). Une image est proposée pour comprendre cette élévation : le serpent que Moïse a élevé au désert. Dans l’Antiquité, le serpent était un symbole de vie éternelle parce que périodiquement, il mut en laissant sa peau morte pour continuer sa vie. Plus précisément, l’épisode du serpent élevé par Moïse évoque une scène du livre des Nombres (21,4-9) où pendant la traversée du désert, plusieurs personnes sont en danger de mort après avoir été mordues par des serpents. La solution offerte par le Seigneur est que Moïse élève un serpent sur une hampe. Quiconque regardait ce serpent avait la vie sauve. L’analogie offerte par cette image est que Jésus lorsqu’il sera élevé sur la croix aura aussi une portée salvifique. Cette analogie met l’accent sur la différence entre la vie offerte par Moïse et son serpent et Jésus. Alors que pour l’épisode de Moïse, il s’agit d’un retour à la santé, pour Jean, le salut offert par l’élévation de Jésus permet une vie éternelle.

    Il y a un lien intrinsèque entre l’identité de Jésus et sa mission. Jésus est l’envoyé du Père qui sera exalté afin d’apporter la vie éternelle. La beauté de ce texte est qu’il enracine la mission de Jésus dans l’amour de Dieu qui envoie Jésus dans le monde par amour.

    Entre l’ombre et la lumière

    L’Évangile selon Jean aime bien offrir des images duelles et antithétiques. Le verset 19 indique que Jésus est la lumière, mais que les hommes ont préféré l’obscurité. Il y a un choix à faire entre l’ombre et la lumière. Du côté de l’ombre se trouvent ceux qui font le mal (v. 20) et craignent d’être démasqués par la lumière. Jésus est du côté de la lumière puisqu’il veut manifester en plein jour l’œuvre de Dieu. L’avantage de cette image duelle est de susciter une réponse de ses lecteurs et lectrices. Nous sommes placés devant le choix entre la lumière qui symbolise la vie éternelle offerte dans la foi en Jésus et l’obscurité qui représente le rejet de l’envoyé du Père. 

    Une synthèse qui en évoque une autre

    Si vous connaissez l’Évangile selon Jean, vous avez peut-être remarqué qu’il y a beaucoup de liens entre ce passage et le prologue. En effet, dès les premières lignes de cet Évangile, des clés sont offertes pour comprendre l’enjeu principal. Le Verbe était avec Dieu (v. 1-3); en lui est la vie (v. 4); cette vie est comme une lumière qui brille dans les ténèbres, mais les ténèbres ne l’ont pas compris (v. 4.7-11); le critère de séparation est de croire ou non en son nom (v. 12). Le narrateur qui transmet l’essentiel de l’évangile dans le prologue revient à la charge au chapitre 3. Il complète le discours de Jésus à Nicodème en redisant autrement ce qui avait déjà été évoqué de façon poétique dans le prologue. Alors que le prologue affirme que le Verbe est la vie, le chapitre 3 révèle que la vie offerte aux personnes qui croient en Jésus est « éternelle ».

    En plus de ce regard vers le début de l’Évangile, l’image de l’élévation du Fils de l’homme permet un regard prospectif vers la suite. Elle anticipe la crucifixion de Jésus qui, pour Jean, n’est fondamentalement pas une forme de torture et d’exécution, mais le lieu où se manifestera l’exaltation du Fils qui est élevé vers son Père.

    Cary Price a bien raison. On peut difficilement dire que ce passage n’est pas une bonne synthèse de l’Évangile. Espérons que la lecture de ce passage lui permette de sauver quelques buts et la saison du Canadien... bien que ce soit, bien entendu, d’un autre ordre que le salut offert en Jésus Christ.

    Sébastien Doane

    Source : Le Feuillet biblique, no 2567. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l’autorisation du Diocèse de Montréal.

    source http://www.interbible.org

    -----------------------------

    Articles récents- OFS-Sherb

    votre commentaire
  • Punition divine et excréments

    Fresque du prophète Malachie

    Fresque représentant le prophète Malachie

    Le texte qui suit, du prophète Malachie, utilise une image grossière pour passer un message important. Les prophètes de la Bible ne sont pas très politiquement corrects.

    1 Maintenant, à vous, prêtres, cet avertissement : 2 Si vous n’écoutez pas, si vous ne prenez pas à cœur de donner gloire à mon nom, dit le SEIGNEUR de l’univers, je lancerai contre vous la malédiction et maudirai vos bénédictions. – Oui, je les maudis, car aucun de vous ne prend rien à cœur. 3 Me voici, je vais porter la menace contre votre descendance. Je vous jetterai du fumier à la figure, le fumier de vos fêtes ; et on vous enlèvera avec lui. 4 Vous saurez que je vous ai adressé cet avertissement pour que devienne réelle mon alliance avec Lévi, dit le SEIGNEUR de l’univers. 5 Mon alliance avec lui était vie et paix, car je les lui accordais ainsi que la crainte pour qu’il me révère. Devant mon nom, il était frappé de saisissement. 6 Sa bouche donnait un enseignement véridique et nulle imposture ne se trouvait sur ses lèvres. Dans l’intégrité et la droiture, il marchait avec moi, détournant beaucoup d’hommes de la perversion. 7 – En effet, les lèvres du prêtre gardent la connaissance, et de sa bouche on recherche l’instruction, car il est messager du SEIGNEUR de l’univers. 8 Vous, au contraire, vous vous êtes écartés du chemin. Vous en avez fait vaciller beaucoup par votre enseignement. Vous avez détruit l’alliance de Lévi, dit le SEIGNEUR de l’univers. 9 À mon tour, je vous rends méprisables et vils à tout le peuple, dans la mesure où vous ne suivez pas mes voies et où vous faites preuve de partialité dans vos décisions. (Malachie 2, 2-4)

    Une pédagogie de…

    La pédagogie employée par le Seigneur est un peu douteuse. Elle ressemble aux propriétaires de chiens qui, pour leur apprendre la propreté, les forcent à mettre leur museau dans leurs excréments. Cette stratégie utilise une intimidation, une humiliation et une vulgarité qui ne correspondent pas à l’image habituelle du Dieu de la Bible.

    Des prêtres de…

    Ce passage du livre de Malachie vise les prêtres israélites de façon assez directe. Il oppose les prêtres de son époque à la figure de Lévi, reconnu comme le fondateur de la caste sacerdotale. L’Alliance entre le Seigneur et Lévi était marquée par la paix et la vie (Malachie2,5). L’enseignement de ce dernier était intègre. Malheureusement, certains de ses successeurs se sont écartés du Seigneur et entraînent le peuple loin du droit chemin. 
    Comme signe de malédiction, le Seigneur lance des excréments d’animaux au visage des prêtres. Le contraste entre la pureté rituelle demandée aux prêtres et ce fumier est très fort. Et le Seigneur n’utilise pas n’importe quels excréments pour les souiller. Il prend le fumier des animaux, ceux-là mêmes que les prêtres lui offrent en sacrifice. Ce détail n’est pas qu’insolite. Les prophètes comme Malachie ont des paroles très dures à propos des sacrifices offerts au Seigneur. Aux yeux des prophètes, ces sacrifices étaient complètement inutiles si l’on ignorait la pratique du droit et de la justice : « Car c’est l’amour qui me plaît et non les sacrifices, la connaissance de Dieu plutôt que les holocaustes » (Osée 6,6). Jésus reprendra ces paroles vibrantes d’Osée contre les sacrifices, en Matthieu 9,13. Les quatre évangiles racontent aussi que Jésus a contesté fortement les pratiques du Temple, le cœur du système sacrificiel. Ce geste mènera à sa condamnation et à son exécution par les autorités religieuses et les politiques de son temps.

    Les prêtres d’aujourd’hui

    Il serait un peu simple de prendre ce texte pour lancer de la bouse au visage des prêtres d’aujourd’hui. Il y a d’ailleurs une rupture entre les prêtres de l’Ancien Testament et les prêtres de l’Église actuelle. Les ministres de l’Église, que l’on appelle maintenant « prêtres », étaient d’abord désignés par le nom de « presbytres » (anciens), dans le Nouveau Testament. Ces responsables n’offraient pas de sacrifices comme les prêtres juifs. Le terme « prêtre » en français, vient du mot « presbytre » qui s’est déformé en passant par le latin. N’exerçant pas les mêmes fonctions, les prêtres chrétiens n’ont donc aucun lien avec les prêtres juifs.

    Cela dit, je crois qu’il y a une grande réflexion à faire sur la façon dont les responsabilités sont partagées en Église. Ce texte du prophète Malachie peut interpeler l’Église et l’inviter à relever d’énormes défis pour réaliser sa mission aujourd’hui. « Vous vous êtes écartés du chemin. Vous en avez fait vaciller beaucoup par votre enseignement » (Malachie 2,8). Quel est le résultat de l’enseignement des prêtres actuels? Est-ce qu’il cause le scandale, l’exclusion, ou l’indifférence?

    La crise actuelle de l’Église catholique, au Québec, peut peut-être se transformer en une occasion favorable. Si l’Église est le peuple de Dieu, c’est à chacun et chacune de s’engager pour la transformer de l’intérieur et permettre un renouveau. Espérons que les interpellations du Seigneur, transmises par Malachie, nous réveilleront.

    Extrait de : Sébastien Doane, Zombies, licornes, cannibales… Les récits insolites de la Bible,Montréal, Novalis, 2015.

    Sébastien Doane

    source http://www.interbible.org/interBible

    --------------------------- 

    Articles récents- OFS-Sherb

    votre commentaire
  • COLLABORATION SPÉCIALE: Jean Grou, rédacteur en chef de Prions en Église

    Le mardi 13 février dernier, j’assistais à la soutenance d’une thèse de doctorat à l’Université Laval. Son titre? Analyse de la réponse du lecteur au récit des origines de Jésus en Mt 1 – 2. Son signataire? Sébastien Doane, auteur pour les Éditions Novalis et collaborateur régulier de Prions en Église. En plus d’être aussi chroniqueur à l’émission Plus on est de fous, plus on lit, à Ici Radio-Canada Première, il vient d’être engagé comme professeur d’Écritures saintes à la Faculté de théologie et de sciences religieuses de l’Université Laval.

    Pour toute personne arrivée au bout du parcours de la recherche et de la rédaction d’un doctorat, soutenir sa thèse devant un jury et des membres de son entourage est toujours un moment stressant, pour ne pas dire éprouvant. Sébastien Doane s’en est tiré avec brio, répondant aux questions des examinateurs avec éloquence et précision. Ces derniers n’ont d’ailleurs mis que quelques minutes à délibérer avant de rendre leur décision unanime et féliciter le nouveau docteur. Celui-ci était visiblement soulagé et ravi.

    Comme son titre l’indique, la thèse porte sur les deux premiers chapitres de l’Évangile selon Matthieu, que l’on appelle parfois «le récit de l’enfance de Jésus». Ses épisodes nous sont si familiers que nous pouvons avoir l’impression de les connaître par cœur : Marie enceinte avant d’avoir «connu» Joseph, le songe de ce dernier et sa décision d’accueillir l’enfant chez lui, la visite des mages, la fuite en Égypte, le massacre des petits innocents de Bethléem, le retour de la famille de Jésus en terre d’Israël et son installation à Nazareth. Je n’ai pas encore lu la thèse de Sébastien, mais il laissait entendre dans sa présentation qu’il a découvert dans ces textes archi-connus des éléments insoupçonnés, étonnants et même subversifs.

    Le doctorant a procédé à un examen en détail des deux premiers chapitres de Matthieu selon une méthode relativement récente dans le domaine des études bibliques appelée «analyse de la réponse du lecteur». Elle consiste à se demander comment le texte «agit» sur la personne qui le lit, quels effets provoque-t-il chez elle? L’auteur s’est attardé particulièrement à ce qu’il considère comme des «éléments ambigus». Ainsi, le nom de cinq femmes apparaît dans la généalogie de Jésus, alors que ce type d’écrits dans la Bible n’énumère habituellement que des hommes. De plus, le nombre des générations mentionné au verset 17 ne concorde pas avec la liste d’engendrements dans les versets 1 à 16. Aussi, en quoi Joseph peut-il être qualifié de «juste»? Ce n’est pas si évident quand on y regarde bien. Et puis, comment un astre peut-il indiquer précisément un lieu? Sans compter que le rapprochement qu’on fait habituellement entre cet astre et Nombres 24, 17 pose certaines difficultés… Mentionnons finalement la référence à une citation des Écritures (Matthieu 2, 23: «Il sera appelé Nazaréen»)… qui n’apparaît nulle part dans l’Ancien Testament!

    Contrairement à ce qu’une recherche exégétique plus traditionnelle ferait, la thèse ne cherche pas à retracer les intentions de l’auteur (ce qui demeurera toujours hypothétique), mais en quoi ces éléments «étranges» agissent sur le lecteur. Pour ce faire, Sébastien s’est lui-même prêté au jeu en relevant ses propres réactions, bien ancré dans tout ce qu’il est, avec ses présupposés, sa culture, sa condition masculine, sa paternité, sans prétention aucune à l’objectivité pure. L’intérêt de sa démarche est d’inscrire le lecteur ou la lectrice dans l’acte interprétatif du texte. Comme le signale le résumé de sa thèse : «En tablant sur les effets produits par le texte, il appert que dès les premiers versets, l’Évangile selon Matthieu cherche à dérouter ses lecteurs pour le préparer à lire un récit déconcertant.»

    Déconcertant, en effet, en raison de son message central dont nous avons peut-être perdu le caractère inouï, improbable et renversant: Christ est ressuscité.

    Image: the knitted Bible, Kate (2013)

    source  http://www.carnetsduparvis.ca/

    ------------------------------

    Articles récents- OFS-Sherb

    votre commentaire
  • Le Seigneur Jésus n’exclut personne

    Jésus guérit un lépreux

    Jésus guérit un lépreux
    Carl Heinrich Bloch 


    Jésus guérit un lépreux : Marc 1, 40-45
    Les lectures : Lévitique 13, 1-2.45-46 ; Psaume 101 (102) ; 1 Corinthiens 10, 31-11, 1
    Les citations bibliques sont tirées de la Traduction liturgique officielle.

    La compassion de Jésus est contagieuse. Aujourd’hui comme hier, Il relève les accablés, leur offre un avenir et nourrit leur espérance.

    Après l’appel des disciples et le début du ministère de Jésus à Capharnaüm, l’évangéliste Marc relate le parcours de Jésus en Galilée. Jésus a déjà guéri un homme possédé du démon (1,23-28), puis la belle-mère de Simon, ainsi que de nombreux malades (1,29-34), les lectures évangéliques des deux dimanches précédents. En Galilée, Il fait la rencontre d’un lépreux qui ose s’adresser à lui, malgré l’interdit.

    La lèpre, symbole et preuve du péché
    Le Lévitique 13, 1-2.45-46

    Dans le milieu juif rabbinique, l’humain qui souffre de la maladie de la lèpre est rejeté des siens et de ses amis. Il est exclu au nom de Dieu, méprisé, condamné à s’éloigner des autres humains, donc à la solitude. En conséquence, il doit marquer sa différence en portant des vêtements déchirés, des cheveux en désordre, tel que la première lecture l’évoque (v. 45). La seule présence du lépreux dévoile donc son péché et respire la mort. Ce qui est dramatique, c’est la condamnation en lien avec la sphère religieuse puisque la lèpre est non seulement une maladie incurable pour l’époque, mais une impureté, interdisant l’accès au Temple. Ne doit-il pas s’identifier comme impur en criant : Impur! Impur! (v. 45). Le Livre des Lévitesconsacre aux lois de pureté et de sainteté, les chapitres 11 à 16. Le Premier Testament considère la lèpre comme un châtiment de Dieu dans le récit de Myriam, sœur de Moïse (Nombres 12,9-10), dans celui du serviteur d’Élisée (2 Rois 5,27), ainsi que dans l’histoire de Job (2,8). Et le psaume choisi 101 (102) en ce dimanche nous fait expérimenter de l’intérieur la douleur de l’homme rejeté.

    L’interdit transgressé

    Cet homme marqué du sceau de l’impureté et qui doit se tenir à distance s’approche de Jésus avec confiance, déférence et humilité : Il tombe à ses genoux. Si tu le veux, tu peux me purifier (v. 41). Il s’en remet à la bienveillance du Prophète. Saisit-on l’intensité et la profondeur de ce moment vécu par le malade humilié par son entourage? Nous est-il possible d’imaginer l’avenir qui se dessine à ses yeux, la réalité future qui va dépasser tout ce qu’il connaît dans sa chair et dans ses relations? La demande de s’affranchir de cette calamité est déjà un miracle inattendu pour cet homme stigmatisé. Sa foi et son espérance lui permettent de braver les interdits et de croire que grâce à Jésus sa vie aura désormais un sens.

    Jésus, saisi de compassion, accueille avec amour la confiance de cet homme méprisé. Il acquiesce en reprenant les mots mêmes de son interlocuteur. Il le toucha et lui dit Je le veux, sois purifié (v. 41). Jésus lui rend sa dignité, Il recrée la relation, lui offre un avenir, lui permet d’accéder à son vrai visage. En touchant le lépreux, Jésus ne craint pas la contagion; Il pose un geste scandaleux, inacceptable pour un Juif. N’est-il pas venu pour les pauvres, annoncer aux captifs la délivrance et aux aveugles le retour à la vue, rendre la liberté aux opprimés (Luc 4,18)? Cette transgression de Jésus qui le rend impur légalement est un dépassement de la Loi ancienne. C'est l’heure où Il affirme son identité et sa mission; où Il manifeste la tendresse et l’engagement de son Père pour les plus faibles; où Il poursuit sa lutte contre le péché, contre cette idée que le lépreux est moralement responsable de sa maladie. Quatre fois le mot « purifié » est utilisé, indiquant l’importance de cette exigence et l’entrée en relation avec Dieu.

    L’après : un renvoi, le secret et le dévoilement

    La suite du récit est étonnante, tant dans le comportement du lépreux que dans celui de Jésus. Il est affirmé que Jésus renvoie le lépreux en lui adressant un avertissement sévère... Garde-toi de ne rien dire à personne (vv. 43-44). La Bible de Jérusalem, ainsi que la traduction de Chouraqui et celle d’Osty emploient les mots suivants : Mais le rudoyant, Jésus le chassa aussitôt. Ce terme chassa est fréquemment employé pour évoquer l’expulsion des démons lors des exorcismes. Jésus donc, confronté au péché, délivre, affranchit le malheureux d’une calamité intenable.

    Jésus demande à l'homme guéri d'aller se présenter au prêtre, ainsi que le prescrit la Loi. Puis Il le somme de ne rien dévoiler (v. 44). L'homme n'obéit pas et se mit à proclamer et répandre la nouvelle (v. 45), se comportant alors comme un disciple. Le résultat immédiat est l’impossibilité pour Jésus d’entrer ouvertement dans une ville, restant dehors en des endroits déserts (v. 45). C’est dire que Jésus a pris sur Lui le malheur du lépreux. En Marc, Jésus refuse de se révéler comme le Messie préparant l’indépendance politique d’Israël. Les gens ne doivent pas se méprendre sur sa mission. Jésus est là pour manifester en ses paroles et en ses actes, son autorité et la puissance de Dieu (BJ). Déjà, se dessine à l’horizon un avenir difficile de contestation et de souffrance. Ce sont les attaques insidieuses et répétées des Sadducéens et des Pharisiens qui, face aux actions de délivrance accomplies, ne cessèrent de reprocher à Jésus sa liberté. Plus tard, l’approfondissement de la vie de Jésus conduisit l’évangéliste et les premières communautés chrétiennes à voir dans la guérison du lépreux le prélude à cette opposition qui ira s’amplifiant jusqu'à la condamnation à mort du Prophète, suivie du matin de la résurrection.

    La proximité de Jésus avec le pauvre : un appel

    La rencontre du lépreux bouleverse Jésus au plus intime de son être, et décuple son audace et sa liberté. Il ne peut que souffrir du mal que vit cet homme et Il s’empresse de le guérir gratuitement en risquant lui-même une interprétation négative de son geste. Ainsi va-t-il dépasser la Loi ancienne et rétablir l’homme dans sa dignité. Sa compassion nous interpelle. Quel regard portons-nous sur autrui : les personnes que nos sociétés mettent à l'écart, les itinérants, les décrocheurs, les jeunes délinquants? Comment regardons-nous les malades mentaux, les gens dépressifs? Quels préjugés colorent notre appréciation, et classifient les personnes que nous côtoyons? Au nom de nos principes, de notre formation et de notre vision trop étroite de notre entourage, ne sommes-nous pas enclins à marginaliser, à discriminer, à exclure plutôt qu’à inclure? Avons-nous pris l’habitude de voir au-delà des apparences et des différences? Jésus ne nous invite-t-Il pas à purifier notre esprit et à accueillir inconditionnellement notre prochain. Nous avons besoin de guérison, d’être rassasié des dons de Dieu. Notre espérance ne doit-elle pas exiger ce qui est de l’ordre de l’Infini.

    De son côté, l’apôtre Paul, dans la 2e aux Corinthiens (10,31-11,1), après avoir évoqué son comportement, nous suggère d’imiter le Christ : Faites comme moi : en toutes circonstances je tâche de m’adapter à tout le monde; je ne cherche pas mon intérêt personnel, mais celui de la multitude des hommes, pour qu’ils soient sauvés. Prenez-moi pour modèle; mon modèle à moi, c’est le Christ (10,3311,1).

    Julienne Côté

    Source : Le Feuillet biblique, no 2563. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l’autorisation du Diocèse de Montréal.

    source http://www.interbible.org/

    -----------------------

    Articles récents- OFS-Sherb

    votre commentaire
  • Un enseignement nouveau

    Jésus chasse un possédé de la synagogue

    Jésus chasse un possédé de la synagogue (détails)
    James Tissot, entre 1886 and 1894
    aquarelle et mine de plomb sur papier vélin, 23 x 18 cm
    Brooklyn Museum, New York (photo : Wikipedia)


    L’homme tourmenté par un esprit mauvais : Marc 1, 21-28
    Les lectures : Deutéronome 18, 14-20 ; Psaume 94 (95) ; 1 Corinthiens 7, 32-35
    Les citations bibliques sont tirées de la Traduction liturgique officielle.

    Lorsque je travaillais à l’Oratoire Saint-Joseph, j’ai connu un bon père qui devait prendre sa retraite. Lors de son déménagement, je lui ai donné un coup de main avec ses dossiers. Parmi ses homélies, j’en ai trouvé une qui portait une annotation en marges : « argumentation faible, hausser le ton! » On voit parfois la même tactique chez les politiciens. Lorsqu’on parle fort avec conviction, même les banalités peuvent passer. Il semble que cette stratégie ne date pas d’hier. Dès le début de l’Évangile selon Marc, Jésus est présenté comme un enseignant qui se distingue des autres.

    Quel enseignement?

    La scène se déroule à Capharnaüm le jour du sabbat. Le narrateur fait une distinction entre Jésus et les scribes. Ils enseignent tous à la synagogue, mais Jésus enseigne avec « autorité » (exousian), contrairement aux scribes. Le travail des scribes comprenait plusieurs tâches. Ils pouvaient écrire et lire des documents, enseigner la lecture et l’écriture, mais aussi interpréter les Écritures et les lois. Cela dit, la distinction que fait Marc montre que Jésus n’est pas un scribe. D’ailleurs, puisque nous n’avons aucun écrit de Jésus, plusieurs se demandent même si Jésus savait lire et écrire. Il faut savoir que les spécialistes estiment que seulement 5% de la population de l’époque était lettré. Cela ne veut pas dire que les autres n’étaient pas intelligents, bien au contraire. La lecture et l’écriture étaient réservées à un groupe de scribes qui se spécialisaient dans ce travail.

    Mais, quel est l’enseignement de Jésus? En lisant ce texte à partir de notre culture actuelle, notre présupposé est que l’enseignement de Jésus est composé de discours plus percutant que ceux des scribes. Or, la suite montre que ce n’est ni le contenu ni le ton qui marque la différence de sa prédication. La scène qui est encadrée par l’affirmation du narrateur et des foules que Jésus enseigne avec autorité n’est pas un discours, mais le récit d’un exorcisme.

    Pour l’Évangile selon Marc, il semble que l’enseignement et l’exorcisme sont reliés. C’est suite à l’exorcisme que la foule s’exclame : « Voici un enseignement nouveau donné avec autorité ».Cette parole n’indique donc pas que Jésus est un rhéteur habile pour manier le verbe. En fait, cette scène sur l’enseignement de Jésus ne transmet que quelques mots du maître : « Tais-toi! Sors de cet homme. » Contrairement aux présentations de Jésus des autres évangiles, Marc ne montre pratiquement jamais Jésus en train de faire des discours. Le Jésus de Marc parle par ses actions. Cependant, les quelques mots qui lui sont attribués s’avèrent d’une efficacité redoutable. Alors qu’à la synagogue, les scribes lisaient et commentaient les Écritures avec plus ou moins d’effet, Jésus, par quelques mots, expulse un esprit impur! Voilà ce qui est jugé « nouveau » et qui fait « autorité ». 

    Quelle autorité?

    L’activité de guérisseur et d’exorciste de Jésus pose question. Cependant, nos questions ne sont pas celles du premier siècle. Pour nous, ces activités surnaturelles semblent impossibles. Pourtant, en Marc, les adversaires de Jésus ne remettent pas en cause le fait que Jésus opère des miracles. En revanche, ils demandent constamment quelle autorité lui permet de réaliser ces actes de puissances.  Puisqu’il commande aux esprits impurs et que ceux-ci lui obéissent, on peut comprendre un peu plus loin dans l’évangile que certains se demandent s’il ne détient pas son autorité du chef des démons : « Il a Béelzéboul en lui! C’est par le démon qu’il chasse les démons. » (3,22) Or, dans le dialogue de l’extrait de ce dimanche, l’esprit impur indique plutôt un rapport d’opposition entre lui et celui qu’il qualifie de « Saint de Dieu ». Ce titre assez rare indique que Jésus est « saint », c’est-à-dire proche de Dieu, la source de toute sainteté. Comme le sacré est séparé du profane, Jésus est ainsi mis à part par sa relation à Dieu. Voilà d’où il tient son autorité et ce qui le distingue des autres. Il n’est pas comme les autres, il est le saint de Dieu.

    Les exorcismes de Jésus

    Avouons-le, lire les récits d’exorcismes opérés par Jésus peut nous rendre mal à l’aise. D’une part, l’aspect surnaturel n’est pas évident à comprendre. D’autre part, la question du mal et de ses représentations peut faire peur. D’ailleurs, le film culte de science-fiction The Exorcista bien compris le potentiel symbolique de cet acte spirituel fascinant.
    En Marc, les récits d’exorcismes permettent de comprendre l’identité profonde de Jésus. Contrairement aux disciples, les esprits mauvais dans leurs dialogues avec Jésus savent qu’il est le Christ, le fils de Dieu et dans ce récit le saint de Dieu.

    Peu importe si l’on accorde une valeur historique ou non aux récits d’exorcisme, le message de foi qu’ils proposent est essentiel. Les exorcismes de Jésus permettent aux personnes qui étaient exclues de retrouver une place dans la société. Ces exorcismes sont les signes que le règne de Dieu proclamé par Jésus triomphe du mal dans toutes ses formes.

    À la fin de ce premier récit miraculeux, la table est mise pour la suite de l’Évangile selon Marc. Tout au long du ministère de Jésus, sa renommée se répand partout en Galilée. Comme ici, les foules sont saisies, étonnées et même parfois apeurées par les actes de puissance réalisés par Jésus. D’ailleurs, dans cet évangile, les disciples sont envoyés pour annoncer l’Évangile en faisant des signes similaires à ceux de Jésus (Mc 16,15-18).

    La prédication non verbale

    Au lieu de commenter l’évangile par de belles paroles ou en « haussant le ton » comme mon ami, peut-être qu’on peut faire comme Jésus et laisser nos gestes parler. On attribue à François cette maxime qui traduit tout à fait l’esprit de la prédication de Jésus en Marc : « Prêche tout le temps l’Évangile et, si nécessaire, utilise des mots. »

    Sébastien Doane

    Source : Le Feuillet biblique, no 2561. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l’autorisation du Diocèse de Montréal.

    source http://www.interbible.org

    -----------------------------

    Articles récents- OFS-Sherb

    votre commentaire
  • La force joyeuse du témoignage

    Voici l’agneau de Dieu

    Voici l’agneau de Dieu
    Domenico Zampieri, dit Le Dominiquin
    Huile sur toile

    Jean, témoin de la lumière : Jean 1, 6-8.19-28
    Les lectures : Isaïe 61, 1-2a.10-11 ; Luc 1, 46-50.53-541 Thessaloniciens 5, 16-24
    Les citations bibliques sont tirées de la Traduction liturgique officielle.

    Les premiers mots de la messe nous invitent à nous réjouir. Est-ce un automatisme imposé par le calendrier liturgique? Si c’est le cas, nous avons raison d’être un peu mal à l’aise devant cette joie factice. Le commerce s’appuie d’ailleurs sur une ambiance artificielle pour mousser les affaires… Heureusement, dans l’univers de la liturgie, cette attitude repose sur du solide. Les lectures bibliques du jour fournissent matière à réjouissance. La première lecture, le cantique évangélique et la deuxième lecture contribuent fortement à soulever l’espérance des auditeurs et des auditrices.

    Par contre, un premier survol de l’évangile nous laisse perplexes. Jésus n’y est même pas nommé! Les projecteurs sont tournés vers Jean Baptiste. Il affirme ne pas être le numéro un! Dans notre monde friand de vedettes, cette humilité semble farfelue. À l’ère de Facebook, chaque personne se présente sous son jour le plus éclatant. Qui s’intéresse aujourd’hui aux personnages de seconde zone, aux numéros deux, aux joueurs de second plan?

    Quelle joie dans l’évangile?

    L’évangile de ce dimanche inclut deux parties de style différent. On accole quelques versets du prologue du quatrième évangile concernant Jean le Baptiseur à la description de son témoignage. Ce témoignage adressé aux envoyés des responsables de la Ville sainte de Jérusalem induit le climat dramatique du long procès subi plus tard par Jésus.

    Jean affirme clairement qu’il n’est ni le Messie, ni le prophète des derniers temps (Élie), ni le prophète comparable à Moïse dont bien des croyants juifs rêvaient. Dans la dynamique sociale de la société méditerranéenne, le témoin manifeste l’honneur dévolu à un personnage bienfaisant. Tel est le rôle tenu par le personnage central de l’évangile aujourd’hui, un certain Jean. Son nom évoque le caractère définitif des interventions divines dont il est témoin. En effet, Jean signifie, en hébreu : Dieu a fait grâce, Dieu a donné son don.

    De prime abord, cette description par la négative (« Je ne suis pas... ») semble de peu d’intérêt au moment où les listes « à faire » de nos agendas débordent d’urgences. Et pourtant, cette approche ressemble à ce que nous pouvons faire de mieux, comme croyants, pour traduire notre foi dans l’ambiance survoltée des jours qui nous séparent de Noël. Par un curieux retournement de situation, au cœur des préparatifs de cette fête (qui nous appartient!), nous sommes invités à témoigner sobrement de sa nature profonde. Noël n’a aucun sens en dehors de celui qui mérite notre témoignage : Jésus, Fils de Dieu, porteur d’une espérance profonde.

    Notre témoignage discret, la force de Dieu (...)

    Lire la suite ici

    -----------------------

    Articles récents- OFS-Sherb

    1 commentaire
  • Fondements du baptême et récits de migration

    Boat People

    Boat People
    Calligraphie de Thuyen Nhan, 2009
    (photo : Wikipedia)

    Dans le Nouveau Testament, nous trouvons deux textes qui jettent les bases doctrinales du baptême chrétien en se référant à des récits de l’Ancien Testament. Ces deux récits ont en commun également de relater des expériences migratoires. Pourtant, les sacrements ne sont-ils pas propres au christianisme? Pourquoi aller chercher des références dans l’Ancien Testament? En fait, les rédacteurs des différents livres composant le Nouveau Testament ne possédaient pas ce corpus scripturaire pour penser leur foi. Tout ce qu’ils avaient pour penser doctrinalement la foi chrétienne se trouvait essentiellement dans les textes hérités du judaïsme.

    Noé dans la première lettre de Pierre

    Le récit sur Noé est utilisé comme référence pour expliquer le baptême chrétien en 1 Pierre3, 20-21. L’auteur y dit : « Aux jours où Noé construisait l’arche, dans laquelle peu de gens, huit personnes, furent sauvés par l’eau. C’était l’image du baptême qui vous sauve maintenant ». L’arche au milieu du déluge y est présentée comme une préfiguration du baptême en Christ. L’expérience de Noé face au déluge est dans son essence une expérience migratoire. Une fois le cataclysme annoncé, Noé doit partir. Le patriarche est le prototype du réfugié climatique, celui qui voit la terre qu’il habite inondée, disparaître sous les flots à cause du péché des êtres humains. Aujourd’hui aussi, des milliers d’insulaires font face à cette possibilité de voir leurs îles submergées sous les océans à cause du péché des humains qui méprisent la Terre et l’exploitent sans le moindre remords dans le but de faire du profit afin de s’enrichir. Noé doit migrer, sans pouvoir même rêver de retourner à sa terre d’origine un jour. Elle est perdue à jamais. Mais, en migrant vers un ailleurs, Noé est aussi appelé à participer à l’édification d’une terre nouvelle, en se l’appropriant.     

    Moïse dans la première lettre aux Corinthiens

    C’est dans 1 Corinthiens 10,1-2 que l’on fait référence au baptême « en Moïse » : « Nos pères étaient tous sous la nuée, tous ils passèrent à travers la mer et tous furent baptisés en Moïse dans la nuée et dans la mer. » Cette fois-ci, ce sont les eaux de la mer Rouge qui préfigurent le baptême. Ici encore le baptême libère du péché, celui d’Égypte. Le péché ici c’est l’oppression du peuple d’Israël. C’est par un mouvement migratoire – encore une fois – que l’on cherche à se libérer. Le peuple de Dieu part du pays où il vit en esclavage et va vers une terre où il aura à construire « un monde nouveau ». La terre qui les attend est pleine de promesses, mais aussi remplie de défis. Ils sont en proie à abandonner leur Dieu, Yahvé, pour vouer un culte aux divinités de l’endroit et se plonger dans l’idolâtrie. Des gens habitent la terre qui les accueillera, devront-ils les combattre? Devront-ils s’assimiler à leurs coutumes même si cela allait jusqu’à abandonner leur propre culture? De nos jours, ceux qui fuient une terre parce qu’ils y sont opprimés en vivant une quelconque forme d’esclavage ou parce qu’ils y sont victimes de la guerre font face aux mêmes défis que Moïse et les siens. Eux aussi, au cours de leur processus migratoire en viennent parfois à se demander s’ils ont bien fait de partir, au point de se dire que ce qu’ils vivent ou ce qu’ils vivront au fil d’arrivé serait peut-être pire que les mauvaises conditions de vie qu’ils ont laissées. Dans le baptême reçu en « passant à travers mer », c’est une promesse d’une vie nouvelle, d’un avenir meilleur qu’ils ont reçu. N’en est-il pas de même en ce qui concerne le baptême reçu par les chrétiens?

    Mourir à l’ancienne vie et naître de nouveau, tel est le baptême, tel est la migration 

    Le baptême est en réalité un processus de migration, il appelle à une nouvelle vie, à une vie renouvelée. Nous laissons une vie de « mort », là où le péché dans toute sa portée sociale règne, pour oser espérer en une vie meilleure. La terre qui attend l’immigrant n’est pas sans défis, tout comme ce fut le cas pour Noé et Moïse et les élus qu’ils guidaient vers cette terre d’espérance, cette terre promise. Les déceptions furent nombreuses, mais le baptême dont parlent les textes auxquels nous nous référons scelle la promesse d’une vie renouvelée.

    Aujourd’hui, ceux qui migrent sont dans leur processus migratoire baptisé en Christ. C’est du moins de cette manière que les chrétiens devraient les percevoir. Les élus, guidés jadis par Noé et Moïse, le sont maintenant par Jésus-Christ. Qu’ils soient chrétiens ou non, c’est Lui qui les guide. Il les a guidés dans les boat people. Il les guide aussi dans les radeaux de fortune sur lesquels ils tentent la traversée de la Méditerranée. Lorsqu’ils arrivent aux frontières du pays d’accueil et qu’on entend par leur présence l’écho de Jésus disant : « J’étais un étranger et vous m’avez recueilli. » (Mt 25,35) Ils ne font qu’un avec Jésus Christ.

    Martin Bellerose

    source www.interbible.org

    -----------------

    Articles récents- OFS-Sherb

    votre commentaire
  •  

    Tibériade et ses richesses

    Vue de Tibériade

    Vue de Tibériade et du lac (photo : Wikipedia)

    Aujourd’hui, ville balnéaire de première importance en Israël, Tibériade a toujours joui des faveurs de ceux qui en ont fait leur lieu de résidence. L’actuelle Tibériade occupe l’espace (et en déborde) où se trouvait la Tibériade de l’époque des Croisés. La plus ancienne Tibériade, celle des époques romaine et byzantine, était plus au Sud, en bordure du lac de Tibériade, dans la région des eaux sulfureuses de Hammath Tibériade.

    Le mot Tibériade n’apparaît dans la Bible qu’en Jean 6,1.2321,1, pour désigner le lac de Tibériade. Cependant, cette ville fondée par Hérode Antipas en l’an 18 pour servir de capitale est très importante pour le judaïsme antique.

    La richesse de Tibériade

    Nous devons beaucoup aux écrits de Flavius Josèphe, particulièrement à son ouvrage La vie des Juifs, pour nous aider à nous faire une idée de la vie qui régnait à Tibériade durant ses années de gloire. Les descriptions de Flavius regorgent de qualificatifs et de superlatifs. Il parle d’énormes édifices, dont une synagogue capable d’accueillir une foule nombreuse, de palais magnifiques en partie décorés d’or. Ces descriptions témoignent de l’importance qu’avait la ville aux yeux des autorités et des classes nanties. Si les juifs ont hésité à s’installer au départ dans cette ville construite sur des tombes, cette même prospérité ne s’est pas démentie au cours des siècles suivants, si l’on en croit divers témoignages qui, à l’époque byzantine, signalent la présence de palais royaux, de conseil municipal (boulè), de marchés publics, de stade (pouvant accueillir jusqu’à 30 000 personnes), de bains et de tombes richement décorées. La présence des sources d’eau chaude dans la région a possiblement contribué à cette prospérité, les anciens (comme certains modernes) attribuant des propriétés curatives à ces eaux thermales. On venait s’y faire soigner en profitant d’un climat idéal, de type méditerranéen.

    Depuis plusieurs années, on a entrepris des fouilles de sauvetage au cours desquelles on a découvert ces diverses composantes de la ville ancienne. Plusieurs de ces découvertes ne sont plus visibles aujourd’hui, le développement immobilier de la nouvelle Tibériade ayant remplacé ces « vieilleries » par des hôtels luxueux ultramodernes. D’autres ont été sauvées par la conservation des espaces constitués en parc. 

    Croquis de la porte sud

    Croquis de la porte sud (image : BibleWalks)

    La porte sud de la ville de Tibériade

    C’est au cours des années 1973-1974 que l’équipe d’archéologues dirigée par G. Foester a mis au jour une impressionnante construction à Tibériade. Il s’agit de la porte de la ville d’où partait le cardo (rue principale à colonnades), ce dernier séparant la ville en deux parties dans l’axe sud-nord.

    La porte est construite avec le matériau le plus commun dans la région, le basalte. Les pierres sont bien taillées et bien agencées entre elles, témoignage d’un souci d’élégance et d’une volonté de présenter une architecture de qualité. En voyant la porte, on devait s’attendre à trouver, en entrant, une ville prospère et riche.

    Deux tours rondes, ayant chacune 7 m de diamètre, occupant la face sud de la porte, flanquaient cette dernière de chaque côté. Le bas de ces tours et de la porte était travaillé et sculpté en forme de plinthes, offrant un motif décoratif très classique. Du côté nord de la porte, dans le mur des tours carrées, juste avant de sortir de la ville, deux niches (demi-cercle) devaient possiblement recevoir des statues. Une série de colonnes, situées de part et d’autre de l’entrée, amorçait la ligne du cardo qui se continuait dans la ville.

    Le sol de la porte est composé de pierres plates déposées d’abord parallèlement dans la première section puis, une fois passée la deuxième chambre, elles sont disposées à l’oblique, comme c’était la coutume dans la construction des routes de l’empire romain (technique qui donne une meilleure prise aux chevaux). Ces caractéristiques, et les indices stratigraphiques permettent de proposer que cette porte date des premières années de la fondation de la ville, ce qui correspondrait bien aux ambitions d’Antipas de faire de Tibériade sa capitale. Comme aucun mur de cette période n’a encore été retrouvé, il est possible que la porte servît uniquement d’entrée monumentale, une sorte de porte de triomphe à la gloire des autorités romaines. Cependant, des textes talmudiques font allusion aux fortifications de la ville. Peut-être trouvera-t-on un jour d’autres indices qui permettront de résoudre cette énigme.

    Tibériade

    (photo : BibleWalks)

    Il faut imaginer toute cette construction de basalte (à l’exception du pavé) recouverte de plâtre et sans doute décorée de motifs peints imitant le marbre. Cette porte devait dégager une impression de richesse et de grandeur assez exceptionnelles. Il est difficile de dire jusqu’à quelle hauteur les tours s’élevaient, mais l’épaisseur des murs laisse entendre qu’elles devaient faire plusieurs mètres. À la voir de loin, et en la franchissant, on se faisait déjà une idée de ce qui pouvait nous attendre à l’intérieur de la ville.

    Dans une région où l’on trouve principalement des petits villages de pêcheurs et d’ouvriers qui gagnaient leur pain à la sueur de leur front, on ne s’étonnera pas que l’évangile ne parle jamais des habitants de Tibériade. Ils ne devaient pas faire partie des auditeurs du message de celui qui prêchait « bienheureux les pauvres... »

    Tibériade et ses richesses - InterBible 

     

    Source http://www.interbible.org

    ----------------------------

    Articles récents- OFS-Sherb

    votre commentaire


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique