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    Comment trouver Jésus?

    Discours sur le pain de vie : Jean 6, 51-58
    Autres lectures : Deutéronome 8, 2-3.14b-16a; Ps 147(148); 1 Corinthiens 10, 16-17

     R-C-Iles aux Grues aout08 (17)

    En la fête du Saint-Sacrement, on aurait difficilement pu choisir meilleur passage des évangiles pour susciter la réflexion et la médiation sur l’eucharistie. Il s’agit pourtant d’un texte passablement difficile, qui se situe d’ailleurs dans un plus vaste ensemble que l’on appelle couramment le discours de Jésus sur le pain de vie (6, 22-59). Ce discours répond à une question fondamentale : comment rejoindre le Christ, comment demeurer en lui et avec lui (cf. Jean 6, 22-25)?

         L’évangéliste propose différentes voies : reconnaître le Christ comme le pain de la vie (6, 27), croire en Jésus (6, 29) et écouter la Parole, les enseignements du Père (6, 45). Une autre voie apparaît dans l’extrait lu en ce dimanche : l’eucharistie. C’est le cœur de ce passage du quatrième évangile. Les paroles attribuées à Jésus ne remontent probablement pas à lui-même. Elles sont plus vraisemblablement le fruit de la réflexion de la jeune communauté chrétienne. Elles se comprennent d’ailleurs mieux quand on tient compte de son possible enracinement dans la pratique eucharistique.

    Une saveur eucharistique

         L’Évangile selon saint Jean, contrairement aux trois autres, ne comporte pas de récit de l’institution de l’eucharistie. Au lieu du partage du pain et du vin, Jean a plutôt retenu le lavement des pieds comme geste symbolique de Jésus au soir de la Cène (13, 1-15). Des spécialistes des évangiles ont toutefois noté, avec raison sans doute, que le passage lu en ce dimanche (6, 51-58) est celui qui, dans le quatrième évangile, s’approche le plus du récit de l’institution de l’eucharistie. En effet, Jésus parle du « pain que je donnerai », expression qui rappelle ses paroles lors de son dernier repas. Et il mentionne aussi le fait de manger sa chair (cf. le partage du pain) et de boire son sang (cf. le partage de la coupe).

         Compte tenu du contexte dans lequel apparaît ce passage, il faut en conclure que l’auteur propose l’eucharistie comme moyen privilégié de trouver Jésus ou, pour reprendre son vocabulaire, pour demeurer en lui. L’insistance sur la chair nous incite à faire un lien entre l’eucharistie et l’incarnation du Verbe. L’eucharistie, en effet, est plus que le partage du pain : c’est aussi le partage de la Parole.

    Un malentendu

         Alors que Jésus se présente comme le pain vivant, qui est descendu du ciel, les Juifs amorcent une vive discussion autour de la question : Comment cet homme-là peut-il nous donner sa chair à manger? En soi, l’interrogation des Juifs n’a rien d’étonnant, car les propos du Christ ne vont pas de soi. Mais il faut surtout reconnaître ici un procédé cher à l’évangéliste Jean: il ponctue de questions les divers discours de Jésus qui montrent un certain blocage chez ses auditeurs. Il en est ainsi, par exemple, lorsque Nicodème demande : Comment est-il possible de naître quand on est déjà vieux? Est-ce qu’on peut rentrer dans le sein de sa mère pour naître une seconde fois ? (3, 4) Le pharisien, comme les Juifs qui écoutent le discours du pain de vie, comprend les paroles du Christ au premier degré, alors que celui-ci s’exprime dans le registre symbolique. Le malentendu est évident. En procédant ainsi, l’évangéliste nous permet d’éviter cet écueil et nous invite à une lecture spirituelle du message du Seigneur. Pourtant, le texte comprend des termes on ne peut plus concrets. Ainsi, ce que le Lectionnaire traduit par « celui qui mange ma chair » se dirait plutôt, dans l’original grec : « celui qui croque (ou mâche) ma chair ». C’est que l’eucharistie, avec toute sa dimension spirituelle, est d’abord une réalité très physique, matérielle. Elle n’est ni une sorte de métaphore ni un procédé pour nous amener à échapper à notre monde ou à notre condition humaine. Elle est une pratique, à savoir la mise en œuvre rituelle – dans l’espace, dans le temps et dans le corps des croyants – du salut qui s’opère en Jésus Christ.

    Vie éternelle et rencontre

         Les paroles de Jésus sont particulièrement intéressantes lorsqu’on y repère les allusions aux effets de l’eucharistie. Elles vont encore plus loin que celles du récit de l’institution chez les autres évangélistes. Ainsi, manger la chair et boire le sang « du Fils de l’homme » procure la vie éternelle. La croix du Christ et son passage de la mort à la vie est, bien sûr, la voie unique vers la vie éternelle. Mais l’eucharistie nous en donne, pour ainsi dire, un avant-goût et nous y prépare.

         Jésus présente aussi un autre effet de l’eucharistie : Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi je demeure en lui. Pour en saisir toute la portée, il importe de se rappeler l’épisode précédant le discours sur le pain de vie, la multiplication des pains (6, 5-15). À la suite de ce signe pour le moins étonnant, les foules cherchent à s’emparer de Jésus pour le proclamer roi (v. 15). Le Christ choisit cependant de s’enfuir et de se faire discret. Les gens, cependant, se mettent à sa recherche (vv. 22-25), ce qui symbolise la question fournira la trame de fond au discours sur le pain de vie : Comment trouver Jésus? Lorsqu’à la fin du discours, le Christ affirme que manger sa chair et boire son sang, c’est demeurer en lui et le laisser demeurer en soi, il apporte l’ultime réponse à cette question. Autrement dit, l’eucharistie est un lieu privilégié aussi bien pour rencontrer Jésus que pour goûter aux premiers fruits de la vie éternelle.

    De la manne au pain de vie (8, 2-3.14b-16a)

         Le passage du Deutéronome retenu comme première lecture pour cette célébration comporte un rappel de la manne donnée par Dieu à son peuple dans le désert. Dans la lecture évangélique, Jésus conclut son discours en mentionnant la manne. Il met en contraste cet aliment provisoire et périssable avec « le pain vivant » qui procure la vie éternelle. Mais au-delà de ce lien évident, cet extrait du Deutéronome dépeint aussi toute la bienveillance de Dieu qui libère son peuple de l’Égypte, le protège des divers dangers et lui donne de quoi boire et manger pour sa survie. Cette bienveillance culminera avec le don du pain de vie en la personne de son Fils, nourriture de vie éternelle.

         Dans ce même passage du Deutéronome, on retrouve cette citation que Jésus reprendra dans le récit des tentations au désert : L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de tout ce qui vient de la bouche du Seigneur (cf. Matthieu 4, 4). Ces mots arrivent à point nommé en cette fête de l’eucharistie : ils nous rappellent que le pain et la Parole sont indissociables dans la vie sacramentelle de l’Église.

    « Un seul corps » (1 Corinthiens 10, 16-17)

         Quant à la deuxième lecture, très brève, elle souligne le lien étroit entre le pain et le vin partagés durant l’eucharistie et la personne même du Christ. Elle constitue ainsi un excellent préambule à la lecture évangélique qui sera proclamée ensuite (après la séquence). Paul insiste cependant sur un aspect qui n’apparaît pas explicitement dans l’extrait de l’Évangile selon saint Jean : Le rituel eucharistique unit « la multitude que nous sommes » grâce au partage d’un même pain. Intéressant paradoxe : Le fait de rompre le pain, de le diviser, est gage d’unité pour la communauté rassemblée.

     

    Jean Grou, bibliste

     

     Source: Le Feuillet biblique, no 2279. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

    Source www.interbible.org

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