• CONTEMPLATION ET MISSION (2) art 43 Suzanne

    43

    CONTEMPLATION ET MISSION

    Un regard franciscain

    Deuxième partie

     

     

     

    1-demeure-intime.gif Tout ce qu’écrit, dit ou fait François, est expression de sa mystique. Elle affleure à ses lèvres, se lit sous sa plume et se reflète dans la rencontre et l’activité. François est un maître de méditation. En se laissant pénétrer par ses écrits, en écoutant ses Admonitions, nous percevons la profondeur de son expérience contemplative. Quand François parle des hommes, de ses frères, ses mots expriment l’acuité de son regard mais regard chargé de miséricorde. Quand il parle de Dieu le Père ou du Christ, ses mots traduisent l’inexprimable et reflètent son feu intérieur. François écrit et exhorte pour l’édification de ses frères mais aussi de tous les hommes. Il nous montre l’unité qui doit exister entre contemplation et mission.

     

    La cellule :

    La forme de vie franciscaine est bien contemplative : En allant dans le monde elle se manifeste comme « missionnaire ». Dans le cloître, elle accentue la dimension contemplative. Quand le franciscain est en mission, il entend l’appel de l’ermitage ; quand il est en ermitage, il entend l’appel de la mission ! C’est pourquoi, très tôt dans le mouvement franciscain se développe une forme de vie contemplative très particulière, dans des lieux où les frères peuvent se retirer périodiquement. François écrit pour cela une règle spécifique. De nombreux lieux tels que les Carceri, Greccio, Fonte Colombo, Monte Casale, Poggio Bustone, les Celle, l’Alverne etc. l’attestent encore aujourd’hui.

    Les Clarisses se consacrent entièrement à la vie contemplative, vivant une vie de pauvreté comme disponibilité et ouverture à Dieu et aux hommes. Elles veulent se laisser totalement pénétrer, comme personnes et comme communauté, par l’Esprit du Seigneur. Elles veulent être « Filles du Père Céleste », « Epouses de l’Esprit Saint »,

     

    « Mères qui conçoivent Jésus, le portant en elles et l’enfantant » par de bonnes œuvres.[1]

    Ainsi, dès le début du mouvement franciscain, existe une forme de vie contemplative spécifique et une vie active et missionnaire au cœur desquelles la contemplation a toute sa place. François donne ce conseil à ses frères : « Où que nous soyons, où que nous allions, emportons avec nous notre cellule ; Notre cellule est notre frère le corps, et notre âme est l’ermite qui l’habite pour prier et méditer. Si notre âme ne jouit pas de la quiétude et de la solitude dans sa cellule, il ne sert à rien aux religieux d’habiter une cellule fabriquée de mains d’hommes »[2]

     

    La contemplation est plus qu’un ermitage.[3]

    Un ministre voulait éviter la responsabilité de la communauté. Il expérimentait son être-au-monde comme un mal dont il se proposait de s’évader. Mais François lui rappelle la foi en Dieu, fondement de toute réalité. « Tu dois tout tenir pour une grâce ». François dit clairement au ministre qu’il ne faut pas attacher l’authenticité de la vie évangélique à un lieu, en l’occurrence un ermitage. Il faut plutôt que les frères s’aiment les uns les autres, inconditionnellement. Il demande au ministre d’avoir un cœur débordant de miséricorde même si le même frère « péchait mille fois devant tes yeux » et le frère doit pouvoir reconnaître et ressentir cette miséricorde.

    Si la contemplation se comprend comme une conformité à la volonté de Dieu, expérimenter le mal, affronter les conflits, rester dans le monde, tout est vraie contemplation et exercice d’obéissance à Dieu.

     La « lettre à un ministre » peut être considérée comme une introduction à la contemplation. En elle, François réaffirme sa conviction que la contemplation est possible en n’importe quel lieu et que tout évènement nous appelle à l’exercer.

     

    « Aller par le monde »

    L’activité missionnaire a aussi une dimension contemplative. Quand François prêche, partage la vie des lépreux ou accomplit d’humbles tâches auprès des pauvres, il est motivé par la plénitude de sa rencontre avec Dieu et, quelle que soit son activité, il se livre dans une attitude contemplative – Contemplando se tradere. Pour François, il ne suffit pas de donner aux autres ce qu’on a appris ou expérimenté à travers la contemplation – contemplata alliis tradere -  pour lui, la contemplation ne s’arrête jamais : le dur travail quotidien, la vie fraternelle, la solidarité avec les pauvres, tout est lieu de contemplation. Dans le mouvement vers Dieu qu’implique par exemple l’approche du lépreux, il y a un don total. C’est cela la conception franciscaine de la contemplation.

    « Lorsque tu vois un pauvre, ô frère, le miroir du Seigneur et de sa pauvre Mère t’est proposé. Pareillement chez les malades, considère les infirmités qu’il assuma. »[4]


    Le travail et la contemplation.

    La conception du travail chez saint Fançois se situe entre celle de saint Benoît et la nôtre. Le point de vue Bénédictin se résume dans la formule « ora et labora », prie et travaille. François quant à lui, transforme le travail matériel en une expression de solidarité humano-chrétienne. La prière n’accompagne pas le travail mais se réalise à l’intérieur même du travail et doit y être impliquée. Ce n’est pas la juxtaposition des deux activités mais une compénétration prière-travail que saint François propose. Le travail devient alors un service de Dieu mais cette fonction n’est remplie que si le travail est inséré dans l’activité contemplative c’est-à-dire dans une expérience de Dieu à travers la rencontre de l’homme.

    Au cours du temps, les chrétiens ont découvert que le travail n’est pas seulement une charge pesante mais aussi une grâce, comme une participation à l’acte créateur même de Dieu. Dieu n’a pas créé un monde achevé mais l’a laissé à l’activité créatrice de l’homme. Le travail contribue donc à créer « la cité de Dieu » Ainsi, l’axe autour duquel tout tourne, c’est le travail créateur de l’homme, fait dans un esprit de prière et de dévotion.

     

    Suzanne Giuseppi Testut  -  ofs

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    [1] 2LFid 49-53 ; cf. Vie de sainte Claire

    [2] LP 108 ; 2C 94

    [3] LMin

    [4] LM 8, 5

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