• FRANÇOIS D’ASSISE Entre histoire et mémoire


    (1er mai 2009)

    André Vauchez


    Fayard 548 p., 28€



    Sourcesur:  www.laprocure.com



    L'Avis de La Croix

    L'homme qui prenait l'Évangile au mot

    Loin des caricatures, André Vauchez passe en revue toutes les facettes de François d'Assise dans un ouvrage remarquable, à la fois biographie inspirée et essai méthodique



    François d’Assise! Il n’y a pas beaucoup de saints aussi populaires que celui-là. Dans l’Église et hors l’Église. Aimé des pauvres, et dont la figure éclairée par Frère Soleil travaille dans le sens de la mauvaise conscience les riches et les hommes de pouvoir. Mais que sait-on, au juste, de ce Francesco di Bernardone, de son passage sur terre (assez bref : 1182-1226), de ce qui relève des faits et de ce qui provient du sillage d’imaginaire qui le suit – avec des hauts et des bas – depuis huit siècles?

    Il ne suffit pas des oiseaux, du cantique de Frère Soleil, des fresques de Giotto, des films édifiants, de l’image sainte du Poverello, de la piété de bazar, de la religion populaire pour rendre compte, historiquement, de ce qu’il fut. Comme pour chaque personnage historique, si prodigieuse qu’ait été sa trajectoire entre Dieu et les hommes, il faut accepter de prendre, si l’on ose dire, cet homme par les deux bouts : celui qui intéresse le biographe et s’établit à base de documents, de sources analysées, confrontées entre elles, validées ou écartées; et celui du croyant qui ne peut s’abstraire d’une dimension qui nous échappe. Celle qui, justement, laisse une trace mystérieuse et fait dire à André Vauchez : «À chacun son François.» Un saint ne s’appartient plus.

    Autrement dit, sur François d’Assise, on ne réclame pas un rapport de gendarmerie mais une prise en compte de ce qu’il fut (dates, mouvements, situations, rencontres, etc.) et de… ce que les siècles en ont dit. André Vauchez , en lui consacrant ce livre à la fois biographie méthodique et essai inspiré, rejoint les deux bouts de cette vie, de cette âme. Il peut donc écrire, au terme de son admirable travail : «La vérité d’un personnage historique n’est pas séparable de sa transmission.» Un homme comme celui-là est fait de ce qu’il vécut mais aussi de ce que, avec nos prédécesseurs, nous avons fait de lui.

    Situer l’époque (l’Italie «communale») lourde de guerres civiles minuscules et cruelles entre cités (Pérouse contre Assise…) dans une période d’expansion économique que Georges Duby appela «le siècle des grands progrès». Situer l’état de l’Église où la papauté tente de s’affirmer face à la concurrence temporelle de l’Empire de ce Frédéric II que les papes considéreront comme l’Antéchrist. Et aussi d’une Église revenue de la «ferveur monastique», travaillée désormais par un désir de «chrétienté», le goût du pouvoir, l’accoutumance à la richesse, penchants d’autant plus naturels, écrit André Vauchez , que les évêques et les abbés étaient «presque tous issus du monde seigneurial dont ils partageaient les idées et les intérêts». «Comment, ajoute-t-il, auraient-ils pu faire autre chose que conseiller aux riches de se montrer généreux et aux indigents de prendre leur mal en patience?»

    Autre chose, ce fut François d’Assise. Mais sans agressivité, sans révolutionnarisme avant la lettre par rapport à l’institution. Et, par rapport à lui, une institution d’une grande habileté «récupératrice» grâce à l’intelligence politique et spirituelle de l’ancien cardinal évêque d’Ostie, Hugolin, qui, devenu pape peu après la mort de François sous le nom de Grégoire IX, canonisa François dès 1228, deux ans après sa mort. On ne traînait pas, à l’époque…

    Il faut dire que le peuple, déjà, l’avait fait avant lui («santo subito!»). Car François d’Assise avait introduit dans l’Église, hors hiérarchie et même hors cléricature (il n’était pas prêtre, ni même savant), un ton nouveau. On allait écrire une idée toute bête. Ainsi résumable : et si l’essentiel, pour un chrétien, disciple du Christ, était d’en revenir à l’Évangile? Et si la vie chrétienne consistait à se comporter comme Jésus, sans argent, sans pouvoir, sans possessions, sans goût de dominer, avec au cœur sans cesse un désir de porter partout la parole du salut et celle de la «culture de paix»?

    C’était, à l’époque, un langage nouveau sur plusieurs plans, outre la nouveauté des méthodes. Les conflits internes qui suivirent l’effacement volontaire de François dès 1220 puis sa mort en 1226, vinrent de cette trahison d’un message qui avait consisté à dire que la possession (l’argent honni) était la source de toutes les violences. Et que cette aspiration à posséder éloignait de la relation primordiale, de la «possession» que tout chrétien doit rechercher exclusivement : celle du Christ.

    Loin du simplisme, des caricatures (y compris positives des hagiographies), avec une sympathie admirative pour son sujet, André Vauchez passe en revue toutes les facettes de cette vie et de cette sainteté. Il le fait avec un sens des nuances, une honnêteté intellectuelle et, bien sûr, une compétence due à la familiarité de ce médiéviste, ancien directeur de l’École française de Rome, avec l’Église, avec l’époque considérée, avec la culture de ce temps aussi.

    Sur ce dernier point il y a un élément à ne pas négliger qui est, précisément, le climat culturel dans l’Italie du Poverello. Dans les milieux «aisés» («nouveaux riches», écrit Vauchez ) d’où était issu François, la jeunesse dorée était influencée par des modes venues de France : les récits de chevalerie des chansons de geste et la rhétorique des romans courtois. Une bonne partie du ton de François tient à cet environnement. Voilà pour le style, mais, sur le fond, ce saint hors norme brutalisa les saintes habitudes de l’institution sans toutefois se départir d’un souci de maintenir l’équilibre. Pas de rupture, donc, mais toujours cette volonté, malgré l’aspect décapant et même contestataire de son message, le respect (souffrant) de ladite institution. André Vauchez résume fort bien cette dialectique, qui vaut pour tous les âges de l’Église : «Si rien ne se fait sans les hommes, rien ne dure sans les institutions.» Le frère mineur méritait ce livre majeur et d’actualité.

    BRUNO FRAPPAT
     

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  •  Saint Francois D'Assise ; Le Frère De Toute creature  

    Le jeune et riche marchand François Bernardone est sur le point de réaliser ses rêves de gloire lorsque Dieu le saisit et le conduit parmi les lépreux. Des compagnons le rejoignent. Une fraternité humble et pauvre prend son essor. Au terme d'une existence marquée par l'épreuve et la maladie, mais vécue dans la joie, il reçoit les stigmates de la passion du Christ et accueille la mort comme une soeur. La grande découverte de François: tout bien vient de Dieu et appartient à Dieu! Fonder sa vie sur cette vérité. c'est ne plus rien posséder et regarder toute créature comme sortant des mains du Créateur. Le roi, le mendiant, la bête sauvage, le vermisseau, l'arbre, le soleil, l'eau, le feu sont pour François autant de frères et de soeurs qui chantent la gloire de Dieu. Ce cahier, qui s'appuie sur les meilleures traductions existantes, laisse largement la parole à François et à ses plus fidèles biographes. Son ambition est de permettre au lecteur de goûter à la source la sainteté du Poverello.

    Auteur : Delmas-Goyon, Francois
    Editeur : Parole Et Silence
    Collection : Cahiers De L'Ecole Cathedrale
    Date de parution : 11/12/2008
    Genre : Franciscains
    Format : 210x140x23
    Poids : 342g

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