• SOMMES-NOUS PRETS A DEVENIR SAINTS ? art. 58 Suzanne

    SOMMES-NOUS PRETS A DEVENIR SAINTS ?

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    Tout homme, toute femme a la possibilité et la capacité de devenir saint (e). Il nous suffit pour nous en convaincre de regarder les actes de sainteté « ordinaires » que nous sommes amenés à poser dans nos vies au cœur du quotidien. Et surtout de regarder les actes de sainteté de ceux qui nous entourent : par exemple, la douceur et l’humilité avec laquelle l’infirmière de nuit apporte une tisane  à celle qui accompagne une mourante.


    Personnellement, j’ai compris que, pour être saint, il n’était pas nécessaire d’être un héros. En effet, le Christ n’attire pas les héros car il craint qu’ils s’enorgueillissent. Il attire ceux qui acceptent de voir et d’entendre autrement, ceux qui ne sont pas dupes d’eux-mêmes et qui comprennent que leur force n’est pas uniquement due à leur vitalité – même si celle-ci y contribue – mais à Quelqu’un d’autre qui ne peut les habiter que s’ils se laissent faire. Les saints ne sont-ils pas ceux qui se tiennent à l’endroit précis où ils se trouvent : sur la faille de leur division intérieure, plutôt que de s’appuyer sur leurs propres forces et de vivre au-dessus de leurs moyens.


    La sainteté c’est d’abord, une mémoire : celle du dessein jamais abandonné de Dieu. De se savoir créés à l’image en vue de la ressemblance et ainsi de nous replacer à l’intérieur du cadre idéal de l’anthropologie chrétienne. Il y a en chacun de nous une beauté cachée que nous pouvons gâcher si nous nous acharnons à vouloir l’ignorer. Cette mémoire passe aussi par la reconnaissance et la confession de nos fautes. Nous comprenons mieux pourquoi saint François d’Assise mettait autant d’insistance à reconnaître ses péchés particulièrement quand on lui disait qu’il était saint. Il ne mettait pas en évidence ses vertus.  


    Qui, parmi nous, n’a pas rencontré dans sa vie des « modèles » de vertus. Nous les avons probablement enviés. La facilité apparente avec laquelle ces vertus s’exprimaient a même pu écraser la bancale, l’inachevée que je suis et que vous êtes peut-être car, l’exercice de la vertu pris seul, en dehors du chemin de sainteté, peut finir d’une certaine manière par condamner celui qui peine. La sainteté n’est pas pour moi !


    Où se situent les saints ? Ils ne sont pas des « montagnes de vertus ». Sincères avec eux-mêmes, ils savent qu’ils ne sont pas parfaits et ils le reconnaissent. Et, s’ils apprennent à faire appel aux vertus et à en faire usage, ils ne tombent pas dans l’orgueil « tranquille » du vertueux face à sa réussite. Ils se disposent en permanence à l’imprévisibilité de Dieu, dans le quotidien, dans l’ordinaire, là même où ils savent qu’ils trébuchent. Ils s’attendent toujours à une visite qui lèvera le voile pour mieux les aider à se réajuster. Les saints ne se laissent enfermer ni dans les beautés ni dans les laideurs des apparences. Tout est et reste signe, reposé sous le regard de la pédagogie divine et  replacé à sa juste place.


    Mais surtout, les saints n’attendent pas pour oser Dieu, d’en être dignes. Bien sûr, ils n’ignorent pas le mal qu’ils ont commis ou pourraient commettre, ils ne sont pas dupes. Ils s’élancent simplement avec tout ce qu’ils sont. La rougeur de leurs blessures et le bruit de leurs béquilles ne les arrêtent pas. Ils ne se soucient pas des scories qui les encombrent car ils n’ont pas de temps à perdre. Ils s’élancent. Leur amour est imparfait, laborieux, maladroit, ils le savent et tant mieux car, à vouloir être trop parfaits, ils risqueraient de satisfaire leur orgueil plus que Dieu lui-même. D’ailleurs, les saints savent très bien que Dieu n’aime pas que l’on aille trop vite et que l’on brûle les étapes. Ce n’est pas une caricature de l’amour  que Dieu désire de sa créature.


    Débarrassé des soucis de « soi » mais non débarrassés de leurs imperfections, les saints acceptent les limites de leurs réponses. Chaque maladresse devient une nouvelle occasion de se remettre au labeur sur le chemin désiré. En véritables mendiants du désir de Dieu, ils nous montrent le chemin de l’audace et nous y invitent. Chemin lumineux qui nous invite simplement à rester fidèles à ce qui est inscrit au plus profond de nous.


    Les saints choisissent la vie. Rien de ce qu’ils trouvent en eux ne leur fait peur même s’ils n’ignorent pas leurs ténèbres. Tout est bon pour nourrir l’intention qui les fait « tendre vers » Dieu. Vigilance du pèlerin qui mesure son effort face aux escarpements du chemin. Ils savent qu’en l’absence de choix, c’est la mort qui les choisira. Quand on ne choisit plus, que ce soit de notre fait ou de celui des autres, c’est la mort sous toutes ses formes qui choisit pour nous. La question essentielle que nous devons reprendre sans cesse n’est donc pas d’ordre moral mais la question est celle-ci : « Ce que je choisis est-il pour la vie ? » ou « Qu’est-ce qui m’a empêché de choisir la vie à ce croisement ? » L’Ecriture ne nous demande pas de maîtriser, mais de choisir la vie. C’est l’acte même de choisir la vie qui conduit à Dieu, et rien d’autre. Nous pouvons ainsi aller plus loin et nous poser l’ultime question : « Est-ce que je veux faire du Christ le Maître de ma vie ? »


    Les saints se savent vulnérables et acceptent de se laisser toucher par cette vulnérabilité au plus profond de leur être. Ils offrent d’eux-mêmes ce qu’ils ont de plus faible et de plus désarmé, c’est pourquoi, ils peuvent contempler la beauté de Dieu et en pressentir l’effet à l’avance. Ils ont entendu au cœur de leur vulnérabilité, au coeur de la singularité de leur vie humaine, l’unique demande de Dieu : « Viens », « Sois-toi et suis-moi », « Quitte ce qui t’attache, t’empêche d’être toi et marche en ma présence ». Et leur réponse sera : « Sous ton regard, en ta présence, avec toi, à ta suite, je suis en train de devenir ce que je suis de toute éternité ». Dès cet instant, par ces paroles prononcées, priées plutôt, dans un cri ou dans un murmure, la sainteté commence.


    Sommes-nous prêts à devenir saints ? Que nous le voulions ou pas, il faudra tous un jour nous décider que ce soit dans l’ici et maintenant de l’appel, dans huit jours ou juste avant notre mort. Chacun d’entre-nous devra répondre car cet appel s’adresse intimement et singulièrement à chacun.


    Quand l’appel de Dieu retentit en nous. Quand il nous incite à devenir ce que nous ne sommes pas encore et que nous devons être. Quand, dans sa miséricorde, fou de désir, il nous dévoile ce que nous commençons à être quand nous sommes avec Lui et qu’Il est avec nous, Il rend le plus beau des hommages à l’humanité : qu’elle aille au bout d’elle-même.


    Le saint ne répond pas pour lui-même car la sainteté est toujours ignorée du saint mais elle a de l’effet pour l’autre, le prochain, de notre coiffeur à nos frères et sœurs en Eglise. Notre « oui » incite leur « oui » et vice-versa. La charité est contagieuse ou elle n’est pas.


    Ainsi, être prêts à devenir saints, c’est accepter nos balbutiements et nos ratages. C’est accepter de se laisser réajuster sous le regard de Dieu. Prenons l’exemple de saint François d’Assise : Son chemin de sainteté a été long, difficile et semé d’embûches, à la mesure de sa fragilité, de ses passions, de ses épreuves et de ses temps de découragement ou de doute face à sa foi. Il « grandit » auprès de ses frères et apprend, dans la banalité du quotidien, à reconnaître sa propre fragilité et celle des autres et à en faire un chemin de vie vers Dieu. « Chrétien de base, non formé à une école, qui s’exprime sans être marqué par aucune influence particulière », François, en adulte, chemine vers son accomplissement.[1]


    Suzanne Giuseppi Testut  -  ofs



    [1] Voir notre ouvrage : Les mouvements intérieurs de l’âme. Passions et vertus selon saint François d’Assise et les Pères de l’Eglise. Ed. Nouvelle Cité.

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