AIMER PAR AMOUR
En ce troisième anniversaire du site créé par Richard et du don de soi qu’il témoigne, il me semble important de parler de l’amour. De l’amour de Dieu pour sa créature. De l’amour de tous ceux et celles qui accomplissent des actions bonnes, pour Dieu. Même si notre amour est bien limité - au regard de celui de notre Seigneur - nous L’aimons parce qu’Il nous aime et nous apprenons à aimer par amour pour Lui.
L’amour infini de Dieu selon saint Isaac le Syrien.
Pour saint Isaac le Syrien[1], si Dieu est le Tout-Puissant, l’Être en tant qu’Être qui se suffit à lui-même, l’Être qui ne possède aucun commencement ni fin, l’Être qui est au-delà de toute connaissance intellectuelle, comment expliquer qu’il ait éprouvé le besoin de créer ? La création ne s’explique que parce que Dieu est Amour, tout l’Amour. Quand un homme est miséricordieux, c’est-à-dire lorsque son cœur brûle de compassion en contemplant l’Amour de Dieu à l’œuvre dans la beauté de la création, il ne peut s’empêcher de prier et de verser des larmes pour tous les hommes, tous les êtres vivants – de la coccinelle à l’éléphant – et même pour les serpents, les démons ou les ennemis qui lui causent du tort. Aimer la création comme Dieu, c’est l’aimer sans mesure.
Le maître mot de la vision théologique d’Isaac, c’est l’amour. Seul l’amour de Dieu rend compte de la création, seul il explique l’Incarnation et la mort sur la croix, seul il justifie que Dieu ne châtie jamais par colère. Seul l’amour de Dieu permet de se reposer la question sur la damnation éternelle et l’enfer sans fin. Aux yeux d’Isaac, toute l’économie du salut de l’homme procède de l’amour de Dieu, elle ne dépend pas du péché d’Adam.
La pensée théologique d’Isaac est surprenante, elle introduit un renversement assez radical de la théologie de la rédemption qui nous est coutumière : péché originel/chute - punition de l’homme réduit à l’état mortel - rachat sacrificiel par la mort et la résurrection de Jésus-Christ - salut pour les uns, enfer pour les autres. Peut-on dire alors que la théologie d’Isaac est libératrice ?
Même l’enfer pour Isaac n’est qu’un purgatoire où nous serons corrigés par le fouet de l’amour. Ce qui ne veut pas dire que nous devions devenir indifférents à ces tourments ou ne pas les redouter. Ils sont terribles, au-delà de toute souffrance, car ils tirent leur source de notre propre prise de conscience d’une incapacité à accueillir l’Amour.
La théologie de l’amour selon saint François d’Assise.
Saint François quant à lui, pratique une théologie existentielle, c’est-à-dire une théologie de l’amour. Il communie à toutes les réalités humaines et divines. En fait, François se porte vers Dieu, non seulement avec toutes les créatures mais aussi, avec tout son être. Il ne rejette rien, ni de ce qui l’entoure, ni des autres, ni de lui-même. Son âme est fraternellement unie à toutes choses et prend l’éclat de la lumière. C’est la pratique de cette théologie de l’amour qui conduit François vers une réconciliation avec l’homme et avec toutes ses forces obscures et entraîne ainsi une transfiguration. François d’Assise accorde une primauté absolue au Christ. Il Lui reconnaît une place suréminente dans l’œuvre de la création et de la rédemption. En cela, il se rapproche des Pères de l’Eglise.
Le Christ, que saint Paul appelle « Le premier né de toutes les créatures » et que Jean intitule dans l’Apocalypse « l’Alpha et l’Oméga, le Principe et la fin », est non seulement pour François le Rédempteur, le Médiateur, le Modèle des hommes mais encore, la cause, le chef et l’achèvement de toute la création spirituelle et sensible.
Ainsi, François, brûlant d’amour, ne cesse de chanter la gloire de Dieu. L’amour séraphique est principe de vie spirituelle. Tous les saints ont aimé, il nous arrive nous-mêmes de savoir aimer. Mais l’amour séraphique est particulier en ce sens qu’il est le mobile de l’action et le fondement des vertus. C’est essentiellement un amour pur, sans condition, désintéressé par lequel seul, chaque vertu peut véritablement se déployer pour aider l’âme à se purifier de ses passions.
L’amour séraphique est spontané, libre, ardent, fou, irraisonné et irraisonnable car l’amour de Jésus est sa seule justification : « Aimons, parce que Dieu nous a aimés le premier » nous dit Jean.
Ce primat accordé à l’amour par saint François, dans la vie de tous les jours, marque le fondement de la vie spirituelle franciscaine. En fait, le grand message de François, c’est que tout est « aimable », que « C’est dans nos infirmités que nous pouvons nous glorifier » et qu’il n’y a pas à faire économie d’amour, surtout pas envers nos frères créés par le Christ à son image.
Le souffle de Dieu est l’amour.
Nous savons que notre arrivée dans cette vie n’est pas un hasard et que tout fait partie du plan de Dieu dans lequel l’amour est l’élément clé. « L’Eternel Dieu forma l’homme de la poussière de la terre, il souffla dans ses narines un souffle de vie et l’homme devint une âme vivante (un être vivant) » (Gn 2, 7) Le souffle de Dieu est l’amour. Dès lors, si nous arrêtons d’aimer, nous arrêtons de vivre ! L’amour n’a pas de mesure, il est infini. Ainsi, nous pouvons aimer notre bien-aimé (e) mais aussi le reste de l’humanité. Mais si nous aimons les uns et pas les autres, nous n’aimons pas notre prochain, en vérité nous n’aimons personne.
Pour aborder les grands problèmes de la vie, il n’y a que l’amour, que la vie, que la foi dans cette réalité qui nous dépasse : Dieu. Ainsi, pourquoi est-ce que le Christ est le véritable Roi et Seigneur ? Parce qu’il affronte les pouvoirs de ce monde sans être un immortel comme un dieu grec et sans être puissant comme un roi entouré d’une grande armée. Il est capable de tout vivre et de se laisser porter par la vie qu’il contient à l’intérieur de Lui. Il est capable de ne pas sacrifier les autres pour lui.
Un Dieu amour devenu mendiant de l’amour des hommes.
Que ce soit pour saint François ou pour saint Isaac, Dieu est un Dieu Amour devenu mendiant de l’amour des hommes. En effet, Dieu est tellement fou d’amour pour sa créature, qu’il la cherche sans cesse. Son désir est tel, qu’il se fait mendiant auprès de nous. Dieu se révèle et cherche l’homme inlassablement, non pour le convaincre et l’asservir mais pour le « rencontrer » au coeur d’une vraie relation. Il nous prend comme nous sommes, où nous sommes et où nous en sommes. Un seul regard de notre part et son regard en retour nous enveloppe de sa lumière, un seul appel et il est là, un seul mot d’amour et il nous prend dans ses bras. Ainsi, Dieu se révèle et cherche l’homme avec une intensité d’amour infinie.
Chers amis chrétiens, le Christ est le Prince de la Paix, de la non-violence et de l’Amour. De grands talents nous ont été donnés. Pourtant nous pouvons être déroutés par la façon dont les chrétiens se comportent parfois, qui est très loin du chemin que le Christ nous a demandé de suivre. Certains Pères de l’Eglise ont dit que nous sommes appelés non à devenir chrétiens, mais à devenir Christ (Saint Augustin). C’est la quête d’une vie entière. Dès lors, soyons ‘Christ’ dans nos actions jusqu’à l’heure du départ.
Suzanne Giuseppi Testut - ofs
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[1] Isaac le Syrien, dit aussi de Ninive. Moine théologien qui vécut au nord de la Mésopotamie (Irak actuel) à la fin du 7ème siècle.
Pour votre information voici où vous pourriez rencontrer Suzanne prochainement.
le 6 août - 19h Conférence "Déposer sa vie entre les mains de Dieu" - Ermitage de Font Romeu (France)
- Au Québec en Octobre 2010
, plus de détails dans un proche avenir.
Sherbrooke le mercredi 13 octobre (plus de détails bientôt)