GILLES BOURDEAU, OFM : POUR QUE LA VIE SURABONDE !
Gilles Bourdeau, OFM, cumule les responsabilités de Secrétaire pour
les missions et l’évangélisation de la Province St-Joseph du Canada et
de Commissaire de Terre Sainte au Canada. Il nous explique ses tâches
actuelles dans la Province et nous partage ses réflexions sur les missions et
l’évangélisation. Entretien avec un frère qui possède un riche parcours de vie.
Richard Chartier (R.C.) – Vous avez été reçu dans l’Ordre des Frères Mineurs
(OFM) en 1962, qu’est-ce qui vous a attiré vers la vie religieuse ?
Gilles Bourdeau (G.B.) – Je voudrais tout d’abord relater un moment
fondamental qui s’est passé durant mon adolescence et qui marque toute ma vie.
J’ai vécu l’expérience d’une rencontre personnelle avec le Christ Jésus vers l’âge
de 15-16 ans. En fait, à l’âge de 13 ans, j’avais reçu un Nouveau Testament d’un
prêtre du collège où j’étudiais. J’ai découvert ainsi l’Évangile, à tel point que le
Nouveau Testament était devenu et demeure un compagnon de tous les instants.
J’ai senti la présence de Jésus Christ qui me parlait par des passages de l’Évangile
qui m’ont fait un bien immense, entre autres les Béatitudes. Le contact avec la
Parole et les actions de Jésus m’ont amené à organiser ma vie autour du Christ
Jésus, et cela se poursuit encore aujourd’hui. La prière est devenue plus profonde
et demeure toujours le centre et le dynamisme de ma vie.
Mes parents étaient membres actifs de l’Ordre des Franciscains Séculiers (OFS).
La vie et les exemples de François d’Assise faisaient partie de l’univers familial.
Une lecture de la vie de François m’a fait découvrir un personnage qui avait aussi
rencontré Jésus et qui avait mis en pratique ses enseignements. L’expérience
spirituelle de François m’a beaucoup inspiré. François d’Assise et l’Ordre des
Franciscains me sont apparus comme un lieu privilégié pour une poursuite
structurée et cohérente de cette expérience intérieure et ecclésiale. « Voilà ce que
je veux, voilà ce que je cherche, ce que de tout mon coeur je brûle d’accomplir»
comme l’a si bien exprimé François après avoir entendu une lecture de Saint
Matthieu (10,9). C’est après pas mal de réflexion et avec beaucoup de simplicité
que j’ai cherché à rejoindre les frères Franciscains.
R.C. - Quels ont été les moments marquants de vos engagements comme
franciscain ?
G.B. – L’expérience de la prière et la dimension contemplative de la vie des
franciscains s’avèrent primordiales pour moi. Après mon sacerdoce, c’est cela
qui m’a motivé à fonder et à participer à une fraternité de prière à la maison des
frères de Lachute de 1971 à 1987. La particularité de cette fraternité c’était une
vie toute centrée sur la recherche de Dieu et la vie de prière. Les engagements de
travail étaient des lieux de solidarité et une réponse aux besoins du quotidien. Je
considère qu’il s’agit d’une période unique et mémorable de ma vie.
Durant cette période, la Province a établi le lieu du noviciat à Lachute. De 1976
à 1987, j’ai assumé la responsabilité de maître des novices. Je deviendrai, dans
la même période, Secrétaire pour la formation dans la Province. Ce furent des
expériences fortes qui m’ont rendu plus sensible aux nouvelles générations, à la
vie franciscaine et à la tradition de l’Ordre des Franciscains. Ces fonctions m’ont
permis d’approfondir la spiritualité franciscaine.
En 1987, les frères m’ont choisi comme Ministre Provincial. À l’époque, il y avait
240 frères dans la Province, bien des maisons et beaucoup d’oeuvres. Ce fut une
tâche remplie de défis et de dons. Je n’ai pas terminé mon mandat puisque de
1991 à 1997, j’ai assumé la charge de Vicaire général et de Procureur de l’Ordre
des Frères Mineurs à Rome, deux responsabilités ecclésiales importantes :
relation avec les dirigeants et les institutions de l’Église catholique, préoccupation
internationale, vigilance commune sur le trésor de la tradition franciscaine et de la
vocation de l’Ordre. Je me suis souvent posé la question : est-ce que l’Ordre trahit
la vocation de saint François ? Sommes-nous vraiment fidèles et créateurs? Il y a
toujours le risque de ne pas tenir compte des valeurs prônées par notre fondateur
et l’expérience de la fondation. Il faut toujours être attentif à cette question
fondamentale. Ce service à Rome exigeait que notre mode de pensée et d’agir
s’ouvre tous les jours sur d’autres réalités que notre propre lieu d’origine puisque
l’Ordre est présent partout sur la planète et est implanté dans des civilisations si
diverses.
À mon retour au pays, c’est le dialogue interreligieux et l’oecuménisme qui
occuperont mes énergies. J’avais travaillé sur ces questions comme Vicaire
général à Rome et j’ai fait, à Toronto et plus jeune, des études dans ce domaine.
De 1999 à 2004, j’ai investi beaucoup de temps et d’énergie comme directeur
du Centre canadien d’oecuménisme car j’ai toujours été fasciné par les diverses
formes d’expériences spirituelles et religieuses avant même d’entrer chez les
Franciscains. J’étais et je suis toujours préoccupé par l’unité des Églises et les
défis de réconciliation entre les chrétiens. Ce « vivre ensemble » ne peut se
mettre en oeuvre si cela suppose d’ignorer les églises et les autres religions. Il est
donc nécessaire de respecter et comprendre les traditions ecclésiales différentes
et les autres religions, à la manière de saint François lorsqu’il rencontre le Sultan*.
*En 1219, François d’Assise et un compagnon ont rencontré le Sultan d’Égypte dans l’idée de le convertir. Mais le Sultan les accueillit avec sympathie et François découvrit un peuple priant et dévoué à Dieu. Finalement, le Sultan et François se sont quittés dans le respect mutuel. Malgré le projet de François de convertir le Sultan, il y a dans sa démarche une volonté de réconciliation et de paix.
L’Ordre est partout sur la planète.
Crédit photo : OFM
source Blogue des Missions: http://missionsfranciscains.blogspot.ca/
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