Clou de la manifestation : ce manteau, que Joseph Arakel, dès qu'il a eu vent de son existence par un frère franciscain marseillais, s'est échiné à obtenir. L'authenticité du vêtement est assurée. D'abord, le tissu a été plusieurs fois expertisé et attesté comme datant bien du début du XIIIe siècle. Ensuite, comme le souligne le minutieux et pragmatique Joseph Arakel, « il existe une traçabilité incontestable ». Car on a pu suivre, presque à l'année près, le cheminement de la pièce. Si saint François, au long de sa vie, fit plusieurs fois don de son manteau, celui-ci a, en effet, une existence singulière. Le religieux en a fait cadeau – à la demande du cardinal Hugolin, futur Grégoire IX – à sainte Elisabeth. Laquelle le conserva précieusement tout au long de sa vie, comme son « bijou le plus précieux ».
À sa mort, son beau-frère, Conrad, grand maître des chevaliers teutoniques, remit le vêtement à sa communauté, qui le céda au roi Saint Louis – lequel était membre du tiers-ordre franciscain – pour le remercier d'avoir joué le conciliateur entre le pape Grégoire IX et l'empereur Frédéric II. Saint Louis offrit le manteau aux cordeliers, comme étaient alors désignés les franciscains, et ceux-ci le conservèrent jusqu'à la Révolution française. L'un des leurs le mit en sécurité pendant cette période troublée, puis le manteau fut confié aux récollettes, qui en firent don aux capucins, ordre frère des franciscains, en 1865, lesquels le protégèrent des vicissitudes de l'histoire – la Commune, leur expatriation en Belgique en 1905… –, jusqu'à ce qu'il atterrisse dans leur couvent de la rue Boissonade, dans le 14e arrondissement de Paris, en 1926.
Jusqu'à présent, cette relique historique dormait dans les archives de la maison, n'étant exposée - depuis peu - dans un reliquaire qu'une fois l'an, le jour de la saint François. « Nous ne sommes pas tous les jours agenouillés devant, lâche dans un sourire frère Hubert, en extirpant la pièce d'une caisse en bois enveloppée dans un vulgaire carton portant la mention « manteau ». Si nous voulons incarner aujourd'hui quelque chose de saint François, nous le faisons dans notre manière de vivre et de nous engager plutôt qu'à travers un vêtement. » Un long vêtement qui paraît, en tout cas, avoir très bien résisté aux siècles. « Des sœurs clarisses y ont cousu une doublure pour le protéger, et des femmes en ont toujours pris méticuleusement soin, témoigne le Frère Hubert. Mais il faut être très vigilant car à plusieurs reprises, des dévots ont taillé dedans pour fabriquer des reliques. » Depuis sa mort, à Assise en 1226, saint François a de tous temps été l'objet d'un culte passionnel. Qui dure encore.
source http://www.lepoint.fr/
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