• Anjou Vert : Florence, militante sur les pas de saint François d'Assise - Camille

    Anjou Vert : Florence, militante sur les pas de saint François d'Assise

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    Tout est lié ? C’est du moins l’idée que donne Florence par ses différents engagements. Vice-présidente de France Nature Environnement (FNE) et laïque franciscaine, elle a éveillé ma curiosité. Nous nous sommes rencontrées et retrouvées dans son bureau en milieu d’après-midi alors qu’elle sortait d’une visioconférence. Depuis la baie vitrée ouverte, une lumière agréable entrait et les oiseaux chantaient en s’approchant sans crainte. Sur les étagères qui recouvrent tous les murs, des centaines de dossiers témoignent des engagements et du travail de Florence. Sur l’une d’elle, une icône de Notre-Dame (la Sainte Vierge) côtoie une pancarte de Notre-Dame-des-Landes (Z.A.D* Nantaise). Bienvenue dans la vie de Florence, militante sur les pas de saint François d’Assise.

    « Les juristes utilisent l’arme du droit pour faire progresser la cause de l’environnement »

    Depuis sa plus tendre enfance, Florence est sensible à la Nature. Après des études de Sciences Politiques, elle cherche le moyen de rallier son futur métier à la cause environnementale. Elle s’oriente vers un master en aménagement des territoires. « Je ne voulais pas seulement regarder l’environnement comme un sujet technique et professionnel, mais aussi comme un lieu d’engagement », me confie Florence. C’est sont des travaux sur les droits de l’eau qui l’amèneront à rencontrer des bénévoles de FNE, sur le terrain. Elle décide de s’engager à leurs suites, dans un premier temps au niveau local. La jeune femme rejoint un réseau juridique du FNE qui agit dans plusieurs secteurs : défense de la biodiversité, de l’agriculture, amélioration des transports, de la politique des déchets et dans la protection de l’eau dont elle fait sa spécialité. Florence évoluera progressivement, au niveau régional puis national. Fêtant sa vingt-deuxième année d’engagement associatif, elle reconnait que cela lui demande beaucoup de temps et d’investissement, mais aux vues des réussites, cela en vaut la peine !

    « Ce qui m’inspire chez saint François d’Assise, c’est sa relation à la Nature, sa capacité à établir une relation fraternelle avec toute la Création »

    Florence a rencontré saint François dans une troupe de théâtre pour adolescents, tenu par les franciscains. C’est aussi là-bas qu’elle a rencontré son mari il y a plus de trente ans. Très attachés à la figure de saint François depuis leurs jeunesses, c’est lui qui leur a permis de s’engager en faveur de la Nature et dans cette spiritualité franciscaine. En effet, Florence et Sylvain font partie de la fraternité franciscaine de Cholet depuis dix ans. Peu connues, il existe de nombreuses fraternités laïques (ou ordre franciscain séculier) reconnues par l’Eglise, qui suivent les pas de saint François. Cet engagement se symbolise par une règle de vie, proposée pour cheminer au quotidien. Le chemin se vit aussi lors des rencontres avec les cent-vingt autres membres de la fraternité choletaise : lors de formations ou de retraites. Il y a aussi une part d’engagement social : que ce soit venir aider les frères franciscains lorsque sont organisés des camps pour les jeunes, ou une aide à la relecture des engagements dans la société. La fraternité travaille aussi sur une vie de prière seule, ou à plusieurs lorsque l’entraide et le soutien sont nécessaires. Ce qui étonne le plus dans cet engagement à la fraternité, c’est l’invitation à la sobriété matérielle, au détachement des biens afin de recentrer sa vie sur l’essentiel. « Les racines franciscaines communes qui nous ont fait nous rencontrer, nous continuons de les cultiver ensemble, au quotidien » me raconte Florence. Sobriété, spiritualité, fraternité, charité et soin à la Création… Tout est lié.

    Saint François d’Assise, après avoir reçu les stigmates et étant quasi aveugle, laissera comme héritage un merveilleux testament : le Cantique des Créatures. A travers cette louange, qui commence par « Laudato Si’ mi Signore…** » et qui inspira tant le Pape François, saint François loue la beauté de la Création et du Créateur. Cet homme est une vraie figure moderne : artisan de Paix, il fut capable de réconcilier les hommes et la Création. L’exemple le plus connu reste celui des habitants de Gubbio que François a réconciliés avec le loup. Un vrai sujet d’actualité ! Le loup revient en France et des questions de cohabitation se posent… Les militants écologistes ne devraient-ils pas plus invoquer Saint François pour pacifier les hommes ?

    « Le langage de la Nature est un langage où Dieu nous parle, comme dans la Bible, où on retrouve de nombreuses images de la Nature, dont la morale est applicable au quotidien »

    Florence me raconte son histoire, et bien sûr nous faisons ensemble face au choc des générations : j’ai pourtant seulement l’âge de ses enfants ! Il est assez simple pour ma génération (20-30 ans) d’intérioriser les concepts d’écologie et de militantisme. Je réalise même que les plus jeunes (16-20 ans) ont une manière plus virulente et active de vivre l’urgence climatique. Tous nous sommes liés et invités à coopérer, selon nos moyens, à la préservation de notre Maison Commune. Florence semble touchée et émue des engagements des jeunes qui réalisent très concrètement l’urgence d’agir, tout en soulignant l’attachement du mouvement FNE a agir dans la non violente. « La non-violence ne veut pas dire se laisser marcher dessus, nous avons les ressources légales et juridiques pour appuyer la défense de la nature et ses droits » me dit Florence. Ce sont d’ailleurs ces actions pacifistes, mais bien construites et réussies qui ont attiré plus de 9000 bénévoles dans l’association.

    Et pourtant, la FNE revient de loin ! Ce qui semble acquis pour les moins de 25 ans de 2021, ne l’est pas pour nos aînés. « Il y a dix ans, on criait « écologie » et personne ne réagissait. On ne voyait pas encore de conséquence à notre mode de vie effréné. Aujourd’hui, quand on réalise que 30% de la biodiversité a disparu, ça nous demande d’ouvrir les yeux sur l’état du monde ». Il faut reconnaitre que l’engagement écologique est un travail sur l’espérance. Surtout quand les militants, actifs et engagés depuis cinquante ans, réalisent que malgré tous leurs efforts, rien n’est suffisant pour faire changer les choses. La notion d’urgence varie aussi selon les sujets : après plusieurs années de sécheresse, l’eau est un bien qu’il faut protéger car elle est désormais à l’origine de nombreux conflits.

    « En tant que chrétien, nous devons vivre la crise écologique en deux temps. Un temps prophétique : c’est le devoir des chrétiens d’être lanceurs d’alertes et de dire « ouvrez les yeux : il y a urgence ! ». Mais il y a aussi un temps pour être artisan de paix. Il faut coudre de manière très artisanale les besoins des uns des autres ; qui semblent de premier abord s’opposer, mais qu’on peut relier par une conscience commune »

    L’encyclique Laudato Si’ arrivera à un moment clef, où l’urgence d’agir augmente tandis que le nombre d’engagés pour l’écologie stagne. Florence a entendu parler de l’encyclique au sein du FNE avant d’en entendre parler chez les chrétiens. La réaction ne se fit pas attendre : « le Pape pense comme nous ! ». Certains militants furent étonnés et saluèrent l’engagement du Saint Père. Ce qui est d’autant plus étonnant, c’est l’écart des réactions entre militants écologiques et chrétiens. Tandis qu’au FNE, on étudie avec attention le chapitre trois « Racines humaines de la crise écologique » pour ses questions sur la société mondiale et sa consommation globale ; les chrétiens sont eux choqués par le chapitre I « Ce qui se passe dans notre maison » où le Pape fait un constat général de l’état du monde. Quand ses amis lui font part qu’ils réalisent l’ampleur de l’urgence par ce chapitre « trash », Florence ne peut s’empêcher de sourire. En effet, ce chapitre est une version très douce et légère de l’état du monde…

    Il est vrai que Laudato Si’ a su unir des gens qui partagent les mêmes valeurs, parfois pas les mêmes religions, mais avec une volonté d’avancer ensemble pour préserver la terre. Même si l’encyclique a permis d’apaiser les choses, il est aujourd’hui encore compliqué de lier Eglise et Ecologie.

    « Regardez ce qu’il y a autour de vous, mais regardez-le de près »

    L’autre appel que nous lance Florence, c’est d’avoir une attention renouvelée au quotidien. Dans ce monde où tout va très rapidement et surtout où toutes les réponses se trouvent dans le progrès, la technique et la science, Florence nous invite à contempler. La Nature et l’engagement écologique créent des relations humaines. L’écologie est un appel à faire ensemble, dans la complémentarité de nos talents, que ce soit dans une association ou au quotidien. Bien sûr, cela demande d’entrer en relation, avec notre environnement et notre voisinage. Prenons l’exemple du covoiturage pour les trajets vers l’école, pour une mobilité durable : ce n’est pas une contrainte, au contraire Florence insiste sur le fait que ce soit une ouverture vers l’autre, pour le Bien Commun. « La force des gestes individuels vient du fait qu’on soit plusieurs à les réaliser » et ainsi Florence me rappela l’importance des petits gestes. L’écologie est plus qu’un besoin de prendre soin de la Nature, c’est un appel à s’écouter, à la bienveillance, à apprendre à vivre ensemble pour construire une parole commune.

    Prenons donc le temps d’apprendre par la Nature et de nous réconcilier avec elle : elle est notre alliée ; la meilleure école reste d’observer la nature qui a une mécanique parfaite, et de nous rappeler que le progrès technique et notre volonté de maitriser la terre n’auront pas le dernier mot. Ici, tout est lié, par l’engagement commun. Le progrès est un outil performant, mais l’Homme doit avant tout réduire lui-même son empreinte sur Terre afin de recevoir, avec modération, les biens donnés de la Création.

    « Le Pape nous a appelé à aller aux périphéries. Pour moi, ça a été d'aller pu rencontrer des zadistes et des paysans qui s’étaient alliés pour défendre les terres agricoles et naturelles menacées à Notre-Dame-Des-Landes ». Et pour nous, quelle sera notre prochaine périphérie ? A quand l’entrée en conversion ?

     

    Aimez, Priez, Semez,

    Camille pour God save the Green.

    source https://www.projetgodsavethegreen.com/

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  • Commentaires

    1
    coeur léger
    Mardi 9 Mars 2021 à 17:13

    Merci Florence, quelle magnifique partage. J'aime beaucoup ton expression et ta certitude que nous sommes liés les uns aux autres. C'est ensemble sans distinction que nous pouvons arriver à faire la différence. Paix et Joie Madeleine

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