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L’HUMILITÉ- art 50 - Suzanne
L’HUMILITÉ
L’humilité, dans son sens religieux, est fondamentalement une disposition intérieure au service de Dieu et des hommes. Si l’homme - formé par l’Eternel de la poussière de la terre (humus) -, vit conformément aux données de son être, il est humble (humilis).
L’Ancien Testament nous parle de l’humilité de la créature.
De part sa nature même elle est humble devant Dieu. Cela peut se traduire par pauvre, misérable, soumis, craintif. Les « hommes pieux » qui se sentent les serviteurs de Yahvé se soumettent à sa volonté. Cela caractérise aussi l’homme qui, de plein gré, se prosterne humblement devant Dieu. Avec l’intériorisation progressive de la foi, l’exigence d’une attitude humble devant Dieu apparaît toujours davantage chez les prophètes, dans les Psaumes et les livres sapientiaux.
« Cherchez Yahvé, vous tous les humbles de la terre … Recherchez la justice, recherchez l’humilité… » (So. 2,3)
Ce sont les humbles de la terre que Dieu prend en pitié, il les regarde avec bienveillance. C’est à eux que Yahvé accorde sa grâce et la sagesse. Ce sont eux qui deviennent porteurs de l’espérance du salut, qui cherchent le droit et la justice envers les autres hommes et désirent servir Dieu dans la crainte. Dès lors, l’orgueil, négation la plus radicale de cette humilité, se trouve condamné ; l’orgueil est reniement de Dieu et commencement du péché car il nous coupe de la relation.
Si devant Dieu, l’homme est cendres et poussière (Gn 18, 27), cependant : « Qu’est-ce que l’homme pour que tu te souviennes de lui ? » (Ps. 8, 5). Ainsi, admiration, humble obéissance, confiance absolue, telle doit être l’attitude de l’homme. Dans l’Ancien Testament cette attitude est avant tout humilité devant Dieu. Ce que signifie cette humilité est bien exprimé par le Psaume 131, 1 :
« Eternel ! Je n’ai ni un cœur qui s’enfle, ni des regards hautains ; je ne m’occupe pas de choses trop grandes et trop élevées pour moi. »
L’humilité apparaît souvent en liaison avec la notion de « pauvres » dans le sens de l’Ancien Testament. Les petits sont humbles et pauvres en esprit. Comme aveu de son propre néant et de sa propre impuissance, la pauvreté n’est pas un état mais une attitude que l’on adopte devant Dieu d’abord, mais aussi devant le prochain. La pauvreté anéantit l’orgueil, elle est bonne et a pour synonyme la modestie. Comment dès lors ne pas citer François d’Assise :
Même s’il voulait que les fils soient en paix avec tous les hommes et se montrent de tout petits auprès de tous, cependant il leur apprit par ses paroles à êtres humbles surtout avec les clercs et il le leur montra par l’exemple. Il disait en effet : « Nous avons été envoyés afin de venir en aide aux clercs pour le salut des âmes, en sorte que nous suppléions à ce qu’on trouve de moins en eux. Chacun recevra sa récompense, non pas selon son autorité, mais selon son labeur…Couvrez, dit-il, leurs chutes, compensez leurs défauts multiples et, une fois que vous aurez agi ainsi, soyez-en plus humbles. » (2C, CVII)
Dans le Nouveau Testament, l’humilité devient vertu chrétienne par l’exemple du Christ.
L’humilité, alors, n’a plus son sens péjoratif de « médiocre, sans importance ». La crainte et la soumission décrites dans l’AT prennent également un nouveau sens. En un passage exceptionnel (Ph. 2, 5-11) nous trouvons l’humilitas Dei, l’abaissement du Fils de Dieu à la condition de serviteur et son exaltation dans la gloire divine. C’est ici l’accomplissement des prophéties de l’AT et la manifestation type de toute soumission et de toute exaltation. L’humilité que le Christ exige de nous est celle dont il nous a donné l’exemple. A sa suite, il nous faut la pratiquer, non seulement devant Dieu, mais aussi devant les hommes.
Dieu s’est penché sur son humble servante et il est prêt à secourir toute faiblesse. « Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur » (Mt 11, 29). Jésus nous enseigne l’humilité à la fois par ses paroles et par ses actes. Il exige de nous l’esprit d’enfance, simple, droit et sans malice, comme condition de notre appartenance à la « royauté de Dieu » ; il exige de nous la pauvreté en esprit. Ce qui vaut aux yeux de Dieu, ce n’est pas l’attitude auto-satisfaite du pharisien, mais l’humble aveu du pécheur ; ce n’est pas de chercher à se distinguer des autres ; ce ne sont pas les querelles de préséance des disciples, mais l’esprit de service dans la charité et dans l’amour. Ainsi, à l’exemple du Christ, le plus élevé parmi nous doit être le serviteur de tous : « Le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour la multitude » (Mc 10, 45 ; Lc 22, 28). Les disciples de Jésus, eux aussi, doivent, humblement, se laver les pieds les uns aux autres, se libérer, à l’exemple de leur maître, de toute recherche égoïstes. Ils doivent s’oublier eux-mêmes et faire la volonté de Dieu en tout. (Mc 8, 34 ; Jn 6, 38) Plus tard, l’apôtre Paul demande que l’on ait une âme paisible qui ne rumine pas des pensées altières et orgueilleuses mais qui se complaise avec humilité.
Ainsi, peu à peu, le langage se modifie, l’humilité se met au service du Seigneur ce qui permet à l’homme de mener une vie digne de sa vocation (Ep. 4, 2 ; Col. 3, 12), loin de toute humilité feinte et affectée (Col. 2, 18-23). Et pour définir l’attitude fondamentale du chrétien, saint Paul pose la simple question : « Qu’as-tu que tu n’aies reçu ? » (1 Co. 4, 7)
L’humilité n’est pas seulement tournée vers Dieu, l’apôtre en souligne aussi le côté social. Chacun doit respecter la valeur de l’autre et se soucier de son bien. Voici comment Paul caractérise cette forme d’humilité, qui est une indispensable attitude communautaire : se prévenir d’égards réciproques et se supporter mutuellement dans l’amour. L’aboutissement de cette vie d’humilité c’est « l’hymne à la charité », charité dont l’indispensable fondement est l’humilité. (1 Co. 13, 4-8)
Pour les Pères grecs, l’humilité représente un point de doctrine important.
Par exemple, Origène voit dans l’humilité, la réalisation achevée de l’idéal chrétien ; avant Augustin, il se fait l’apologiste enthousiaste de cette vertu.
Selon saint Athanase, nous devons lutter de huit manières différentes contre l’orgueil et jeter ainsi les bases solides de l’humilité, seule vertu que le démon ne peut contrefaire. Elle doit consister en une attitude intérieure de l’âme, prendre modèle sur le Christ qui, de riche, s’est fait pauvre pour nous.
Pour saint Basile, l’humilité renferme en elle toutes les vertus ; le Christ en est pour nous, la mesure et le prototype. L’humilité implique le service du prochain et fait la vraie grandeur de l’homme : « Aime-la et elle te transfigurera ! »
Pour les Pères latins.
Saint Augustin développera à fond, mieux qu’aucun autre Père, le thème de l’humilité. Si l’orgueil, comme recherche de sa propre gloire, est égocentrisme total, l’humilité en revanche pousse l’homme à reconnaître sa condition d’homme et à vivre sa vie dans l’accomplissement de la volonté de Dieu. L’humilité est simplicité et esprit d’enfance, pauvreté en esprit ; elle est la note dominante de la vie spirituelle et le fondement de toutes les vertus.
Pour conclure, référons-nous à François d’Assise, l’humble, le pauvre et le pacifique et à son Admonition XIX.
Admonition XIX – De l’humble serviteur de Dieu.
Bienheureux le serviteur qui ne se tient pas pour meilleur lorsqu’il est magnifié et exalté par les hommes que lorsqu’il est tenu pour vil, simple et méprisé ; car autant vaut l’homme devant Dieu, autant il vaut et pas plus. Malheur à ce religieux qui a été élevé par les autres et par sa volonté refuse de descendre. Et bienheureux ce serviteur qui, élevé malgré sa volonté, désire toujours être sous les pieds des autres.
Suzanne Giuseppi Testut - ofs
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