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Méditation : Franchir le mur de nos lamentations - Stéfan Thériault
Méditation : Franchir le mur de nos lamentations
source - Luc 12, 49-53 « Pensez-vous que je sois venu mettre la paix sur la terre ?
Non, je vous le dis, mais bien plutôt la division »
Trois mots forts nous sont présentés dans le texte évangélique du jour : feu, immersion (ou baptême) et division. Ces trois mots sont les mots de notre salut et de notre chemin vers la résurrection.
Le Fils en quittant le sein du Père s'est « immergé » dans notre humanité.
Il s'est plongé dans notre chair pour faire la volonté du Père.
Il a embrassé, ainsi, Lui l'habitant de l'Infini,
le fini de tout ce qui fait notre existence humaine. Il n'a rien refusé.
Et, au cœur de sa propre existence terrestre, il s'exclame :
« Je dois recevoir un baptême, et quelle angoisse est la mienne
jusqu’à ce qu’il soit accompli ! ».Ce baptême qui vient, c'est celui de la Croix
jusqu'à sa descente dans la mort et aux enfers.
C'est une immersion complète dans le mal qui frappe notre humanité.
Il prend sur Lui le mal de tous les humains de tous les temps.
Cette plongée est inimaginable à des yeux humains.
Il connaît alors la « division » incompréhensible qui habite le cœur humain.Nous sommes devant une équation divine qui dépasse toute intelligence humaine:
il est baptisé dans notre chair rongée par le mal, et ce, pour nous partager,
par Amour, sa divinité.
C'est dans ce « feu » d'Amour et de Vie qu'il veut nous immerger
afin de nous empêcher de nous noyer dans la mort.
Il n'y a vraiment aucune mesure entre « les souffrances du temps présent
(...et) la gloire qui doit se révéler en nous » (Romains 8, 18).
Mais notre accès à cette gloire demande de notre part de le laisser descendre en nous jusque dans l'intime de notre mort et de notre péché,
jusque dans l'enfer de notre vie sans Dieu.
Ce chemin n'est pas facile, car « quelle angoisse (sera la nôtre)
jusqu'à ce que (cette immersion) soit accomplie ».Toute notre vie, nous nous protégeons de la mort et nous cherchons à la fuir.
Nous nous construisons un tombeau à l'intérieur de nous
qui nous protège contre la mort qui nous habite
et qui sert de carapace à la mort des autres.
Notre baptême à nous est de l'accueillir cette mort
et d'y plonger jusqu'à la résurrection.
Nous ne devons pas fuir l'angoisse mais la vivre dans cette foi
que la mort n'a aucune emprise sur la Vie.Quand nous sommes immergés avec le Christ dans ce baptême,
nous saisissons que nous devons prendre partie entre la Vie et la mort,
entre le Bien et le mal, entre l'Amour et la haine.
Nous voyons avec acuité la division qui nous habite
et celle que nous avons instituée avec l'A(a)utre.
À l'intérieur de nous, nous sommes des êtres en mille morceaux
qui vivent selon la loi du mal qui est de diviser pour mieux régner.
Mais, depuis que le Christ est descendu dans l'absurde de nos tombeaux
fondés sur l'idole de la mort, nous n'avons plus le droit d'y demeurer.
Nous sommes face à un choix d'adhésion à la Vie et plus nous ferons nôtre ce choix, plus, pour un temps, nous serons conscients de l'abîme de la division qu'il y a,
en nous, avec Dieu mais tout autant avec les autres,
avec nous-mêmes et avec la création.Nous avons dressé en nous et contre l'A(a)utre un mur de lamentations,
qui nous enferment dans la plainte et dans la mort.
Nous vivons avec notre petite misère, car nous refusons une simple chose :
mettre à découvert le mal qui nous habite pour en saisir le vide
et pour en détacher notre foi. La vraie foi est celle de la Vie.Bien sûr, dans ce combat, nous aurons bien des retours en arrière vers la mort
et bien des combats, comme dit le texte, « le père contre le fils et le fils contre le père, la mère contre la fille et la fille contre la mère, la belle-mère contre la belle-fille
et la belle-fille contre la belle-mère ».
Nous verrons ces divisions en pleine conscience, car elles étaient là avant.Mais notre choix les accentuera, car cette immersion dans la Vie
remettra en question le système familial qui s'est bâti sur la mort
et obligera chacun-e à un examen de conscience.
Ce sera un appel à la conversion que plusieurs refuseront.
Il n'est pas simple d'entrer dans la mort avec cette angoisse
qui nous laisse croire que nous serons engloutis.Mais nous ne sommes pas seuls et, plus encore,
un « feu » d'Amour nous est donné afin de purifier l'or de notre filiation
pour l'enrichir (Apo 3, 18), car « Dieu est un feu consumant » (Hébreux 12, 29).
La Présence de ce Dieu à l'Amour consumant vient briser nos attaches à la mort
et à sa crainte.
Le Fils, « la parole de Dieu, efficace et plus incisive
qu'aucun glaive à deux tranchants, (...) pénètre jusqu'au point de division
de l'âme et de l'esprit, des articulations et des moelles
(et) peut juger les sentiments et les pensées du cœur » (Hébreux 4, 12)
afin de nous libérer des chaines qui s'y trouvent.
Oui, le Fils est « venu apporter un feu sur la terre (sacrée de notre être),
et comme Il voudrait qu'il soit déjà allumé (en chacun-e de nous) ! »Ne refusons pas au Fils d'apporter ce « feu » en nous et, ainsi,
nous laisser baptiser d'Amour jusqu'à être immergés dans la Vie trinitaire,
dans ce monde sans frontières, sans murs !
Qu'avons-nous donné pour recevoir un tel salut ?!Franchir le mur de nos lamentations est de nous laisser baptiser
dans le baptême même du Christ pour entrer dans la louange.
Il se produit alors un retournement complet de feu, d'immersion et de division.
Ce n'est plus le feu de la géhenne mais le feu de l'Amour.
Ce n'est plus l'immersion dans le mal mais dans la Vie trinitaire.
Ce n'est plus la division avec les A(a)utres mais l'entrée dans la séparation créatrice où chacun-e peut exister dans sa différence !
Stéfan Thériault, directeur du Centre« Le Pèlerin »
stheriault@lepelerin.org (www.lepelerin.org) 22 octobre 2020-----------------------------------
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Tags : mort, vie, division, amour, contre
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