• Réflexion sur la Parole de vendredi 21 août. (Mt 22, 34-40)

     Méditation : Blessure d'Amour 


    Réflexion sur la Parole de vendredi 21 août. (Mt 22, 34-40)

    (dessin auteur inconnu)

    Ces derniers jours, il me semble, les textes évangéliques nous conduisent à une profonde humilité, car elles décrivent bien de quelle manière nous vivons loin de nous-mêmes, des autres et de Dieu.

    Il n'en est pas autrement avec le texte d'aujourd'hui.
    Imaginons la scène, les pharisiens, voulant se montrer supérieurs aux sadducéens, « mettent à l'épreuve » le Fils, qui est Dieu.
    Ils veulent lui faire la leçon sur ce qu'est le cœur de la foi,
    le « grand commandement » : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit. » (...)
    Et le second lui est semblable : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même. »

    Cette question montre bien l'impudence humaine.
    Ces pharisiens si sûrs de leur Loi, si rassurés par ses contours,
    si réconfortés par ses prescriptions, si encadrés par ses interdictions...
    sont devenus, en fait, ignorants de Dieu et, spécialement, de son Amour.
    Ne vivons-nous pas, souvent, dans la même superbe que ces pharisiens où nous annonçons l'Amour de Dieu sans vraiment saisir ce que signifie aimer Dieu de tout son cœur, de toute son âme et de tout son esprit ?

    Avons-nous, un jour, acceptez de quitter les berges de notre raison et de ses certitudes pour avancer dans les eaux profondes de l'Amour ?
    Nous sommes-nous laissés dériver, comme l'a chanté saint Jean de la Croix, jusqu'aux confins de la nuit, dans cet espace d'inconnaissance, où l'humain ne sait plus... sinon un Amour qui le dépasse de partout.

    Notre amour humain a toujours un prix, un « je t'aime mais... », un contour obligé, des exigences... Nous sommes aimés et nous aimons « si »...
    Tant de « si » marquent notre amour qu'ils nous empêchent de connaître l'Amour, un Amour libre.
    À ce titre, le premier commandement ne peut être que l'Amour de Dieu, car, comme Il est la source de tout Amour, l'ouverture seule à cet Amour peut nous faire connaître l'Amour qui ne demande rien et qui donne tout. Et qui nous donne la grâce d'aimer les autres et de nous aimer nous-mêmes.
    Sans cet Amour premier, le reste s'évanouit.

    Nous sommes appelés à apprendre à se laisser aimer d'Amour et à s'aimer et à aimer de cet Amour jusqu'à accepter ce passage où notre raison délire, consent à tomber dans l'inconcevable, où elle ne cherche plus d'explications mais simplement d'éprouver son être comme Amour, engendré de l'Amour de Dieu.
    Tous les « si » alors s'évaporent, la grandeur de l'être éclate comme un fruit sur la vigne de Dieu, la personne EST dans Celui qui EST.
    Il n'y a plus rien alors de calculé mais seulement l'Amour qui s'écoule vers nous
    et retourne à l'Amour.

    Nous sommes alors pris dans une étreinte qui nous blesse d'Amour et nous laisse comme morts, morts à tout ce qui n'est pas Dieu, mort à tout ce qui ne vient pas de Lui. Tout en nous est repris d'Amour,
    engendré par Lui, si bien que notre être libère ses parfums.
    La Vive Flamme d'Amour brûle, alors, ce qui en nous n'est pas Dieu.

    Dans cet Amour, toute faute, les nôtres ou celles de l'autre s'efface.
    Tout est pardon. Il ne demeure plus aucun fardeau, car, dans l'Amour, la crainte est bannie. Il ne demeure que la lancinante douleur de ne pas aimer comme Dieu, de ne pas vivre dans l'intimité de cet Amour ou de ne pas répondre à cet Amour comme nous le voudrions.

    Si nous apprenons à être aimés ainsi, avec quel Amour communierons-nous à l'autre !
    Notre regard sur lui ne fuira plus, ne jugera plus, ne condamnera plus, ne recouvrira plus son visage de haine.
    L'Amour de Dieu qui nous aura embrasés nous rendra Un dans la différence (sans menace).


    Pour « nous lever », nous sommes appelés à laisser l'Amour en nous nous faire délirer, nous faire franchir ces limites bien obtuses de nos visions et de nos jugements pour entrer dans les plaines infinies de Dieu.
    Dieu désire tellement nous faire entrer dans le Royaume des Cieux, nous faire participer à sa noce, celle de l'Amour du Père et du Fils dans l'Esprit.

    Saint Jean de la Croix écrivait à ce sujet :

    « Dans cet amour infini
    Qui procédait des deux premières Personnes
    Ce sont des paroles d'ineffables délices
    Que le Père adressait à son Fils.

    Ces délices étaient si secrètes
    Que personne ne les comprenait
    Seul le Fils en jouissait
    Car c'est à lui qu'elles sont adressées (...)

    Si quelque chose me plaît,
    Je veux que ce soit en toi;
    C'est celui qui te ressemble davantage
    Qui me satisfait le plus (...) »

    Cessons de prendre la Loi, nos pratiques, nos certitudes...
    comme des remparts qui nous protègent de Dieu.
    Mais laissons Dieu en tout, par la Loi comme par les relations, par les événements et tout ce qui habite la vie, ouvrir en nous cet espace d'infini où s'écoule, comme un fleuve, son Amour. Laissons-nous transporter par Lui sur des terres inconnues et, continuellement blessés d'Amour par cette Présence, « se lever » dans sa Lumière et voir Dieu en tout !

    Aimer Dieu, aimer l'autre et s'aimer ne sont pas une Loi, mais la fin de toute Loi, car, dans l'Amour, nous aimons et nous faisons ce que nous voulons.

    Stéfan Thériault                                                                                                              21 août 2020

    est le directeur du centre Le Pèlerin - https://www.lepelerin.org/portail/

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