• Témoins d’une naissance (TDN): INTRODUCTION

    INTRODUCTION

    Témoins d’une naissance

     

     

    Les questions d'identité préoccupent de nombreuses personnes. La commission Bouchard Taylor en a été une bonne illustration. Pour sa part, l'identité chrétienne d'une majorité d'entre nous est devenue floue à cause des changements rapides de la société et l'on comprend que certains tentent de retrouver des balises qui fourniraient une sécurité perdue. Les initiatives du cardinal de Québec semblent aller dans cette direction. Nous les respectons mais elles n'épuisent pas le champ du réel.

    Pour notre part, nous croyons que l'identité chrétienne est moins un trésor perdu qu'il faudrait retrouver à tout prix, qu'un chemin qui a été ouvert par la passion indéfectible de Jésus de Nazareth. Aux gens de son temps, il a parlé d'un monde neuf qui était en gestation dans la cour de chacun et dans une société en ébullition qui mettait de côté de nombreuses personnes. Il leur a montré à avoir foi en la vie, à prendre au sérieux le goût de voir, de marcher, de partager, de se relever sans cesse, convaincu qu'ils pouvaient faire confiance à cette source de toute vie qu'il appelait son Père. Cette « bonne nouvelle» est ainsi proclamée dans un contexte particulier et il en est toujours ainsi. Elle parle d'une relation qui est offerte et qui engendre le goût d'en créer d'autres pour que la vie circule en abondance. Mais comme nous avons de la difficulté à comprendre cette relation et à lui faire confiance, nous cherchons à la chosifier et à la posséder. C'est bien pourquoi, au hasard de son histoire deux fois millénaire, la communauté chrétienne a cru pouvoir l'encadrer, la faire entrer souvent de force dans les diverses cultures et certains ont pensé ainsi domestiquer l'imprévisible d'un Souffle qui va où il veut.

    À chaque fois que l'histoire des humains engendre de nouveaux univers de pensée, les chrétiens ont dû se rendre compte qu'ils avaient domestiqué le Souffle du ressuscité et accepter de se remettre en chemin. Notre époque n'est donc pas une exception. Un monde différent est en train de naître et la communauté chrétienne découvre peu à peu que c'est avec ce dernier qu'elle doit entrer en relation, acceptant de marcher avec les gens de ce temps, convaincue que le Souffle la précède. Inutile d'ajouter qu'il est toujours difficile de laisser de côté des bagages accumulés en cours de route. À titre d'exemple, l'Église d'hier n'avait-elle pas réussi à encadrer les croyants, à les organiser et à les programmer de leur naissance à leur mort? Il a fallu des révolutions, plus ou moins tranquilles, pour qu'elle retrouve son statut de nomade, qu'elle fasse le tri dans toutes ses richesses pour ne conserver que ce qui l'aiderait à avancer et à naître à nouveau. Nous commençons à peine à prendre acte de cette nécessité d'être remis au monde.

    Si plusieurs groupes et réseaux ont décidé de prendre la parole, c'est d'abord dans cette conviction d'un « engendrement» nouveau et incontournable. Le poids des églises trop grandes a ici valeur de signe. Ce n'est pas en cherchant à encadrer autrement les fidèles de plusieurs paroisses qu'on va leur permettre de tisser de nouveaux liens avec leur milieu et de retrouver la fraternité toute simple d'une même foi partagée comme on partage le pain.

    Les signataires des textes qui suivent se retrouvent partout, aux frontières, dans la marge, aux multiples carrefours de la vie. Au nom de leurs solidarités et de leur foi, ils témoignent d'un avenir qui est déjà commencé.

    À cet égard, il est éclairant de constater que c'est par rapport aux gestes de partager le pain et le vin que l'urgence de créer de nouvelles alliances entre nous et avec la société se manifeste. La rencontre eucharistique demeure, en effet, le rappel permanent de la vie du Galiléen et l'invitation à partager, dans un contexte nouveau, la passion qu'il avait de témoigner d'un amour sans limite qui engendre sans cesse de nouveaux liens et de nouvelles alliances.

    Tout en étant conscient de nos grandes fragilités, nous avons voulu témoigner ensemble de cet appel à de nouvelles naissances. Ces dernières parlent autant des liens à recréer entre nous, en faisant confiance à la liberté de conscience et d'action, que des liens à réinventer avec les nouvelles cultures qui tissent notre milieu. En même temps, nous croyons qu'il faudra innover car les lieux manquent où nous pouvons échanger sur les appels qui nous parviennent de notre société et en particulier de nos frères et de nos sœurs qui sont laissés pour compte par une économie triomphante. Si nous donnons la priorité à la construction de communautés de foi et de marche, il faudra bien accepter de faire confiance à de nouveaux et nouvelles responsables qui chercheront moins à encadrer qu'à faciliter la mise au monde les uns par les autres.

    L'identité chrétienne est en train de renaître. Elle n'est pas emprisonnée dans le culte ou dans la fièvre de l'action. Elle n'est pas davantage dans un texte ou une organisation. Elle traverse tous ces lieux comme une brise légère dont on peut sentir la fraîcheur. Elle se vérifie par le « travail» qu'elle inaugure en nous et qui nous donne le goût de continuer notre chemin avec les autres. C'est de cette identité en genèse que nous avons voulu témoigner.

     

    Guy Paiement

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