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Cours sur les Évangiles ou ressourcement spirituel 4 de 6
RESSOURCEMENT SPIRITUEL
La vie de Jésus, le Christ
VOLET IV
LES MIRACLES
La prédication de Jésus ne tarde pas à provoquer des réactions diverses. Chez les uns, c'est l'étonnement, l'enthousiasme, la joie ... Chez d'autres, c'est le doute, la réserve, la déception ... Malgré ces réactions, Jésus ne cesse de préciser qu'il est la Bonne Nouvelle qui transforme, qui rend libre et qui suggère de nouvelles façons de vivre. Par ses paroles et par ses gestes, il inaugure une ère de libération : « Les aveugles retrouvent la vue, les boiteux marchent droit, les lépreux sont purifiés, les sourds entendent, la Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres. » (Lc 7, 22)
Donald Thompson, prêtre Personne-ressource
Volet 4
Le thème de ce quatrième cours portera sur les miracles. Aujourd'hui, les miracles font problème. Teilhard, il y a quelques années disait: "Je crois non pas à cause mais en dépit des miracles."
Nous essaierons de situer cette réalité sur le fond de scène du monde contemporain de Jésus, pour nous aider à comprendre cette réalité qui joue un rôle important dans les évangiles; et pour nous aider, aussi, à aborder l'une ou l'autre manifestation contemporaine du merveilleux.
D'abord un mot d'introduction sur le miracle dans l'Antiquité; puis quelques réflexions sur la foi aux miracles de Jésus. Suivront quelques considérations sur le miracle aujourd'hui. Enfin comme illustration de ce qui aura été dit, un petit commentaire d'un miracle du Nouveau Testament.
Dans l'Antiquité
Un mot d'abord sur le miracle dans l'Antiquité. Il est important de prendre conscience du fait que dans l'Antiquité le miracle est une réalité répandue. On pense souvent que Jésus était le seul à faire des miracles et que ce pouvoir prouvait qu'il était Dieu. Mais tel n'est pas le cas. Dans l'Ancien Testament la réalité des miracles est très présente et a beaucoup influencé les rédactions évangéliques. Par exemple, nous retrouvons en 1 R 17 - 2 R 13, le cycle des miracles accomplis par Elie et Elisée. En voici un extrait: "Un homme vint de Baal-Shalisha et apporta à l'homme de Dieu du pain de prémices: vingt pains d'orge et de blé nouveau dans un sac. Elisée dit: "Distribue-les aux gens et qu'ils mangent!" Son serviteur répondit: "Comment pourrais-je en distribuer à cent personnes?" Il dit: "Distribue-les aux gens et qu'ils mangent! Ainsi parle Yahvé: "On mangera et il y aura des restes." Le serviteur fit la distribution en présence des gens; ils mangèrent et il y eut des restes selon la parole de Yahvé" (2 R 4,42 - 44).
Il est impossible de lire ce récit de miracle sans penser aux multiplications des pains racontées par les évangélistes. Il apparaît clairement que les rédacteurs des récits de multiplications des pains dans le Nouveau Testament avait le récit d'Elisée sous les yeux pour rédiger leur texte.
Nous connaissons également un autre cycle de miracles en Ex 7 - 17: les fameuses plaies d'égypte. Il y a également quelques miracles annoncés dans les Deuxième et Troisième Isaïe (Isaïe 40 - 66). Il existe donc, dans l'Ancien Testament, trois grands blocs de miracles qui ont marqué la conscience judéo-chrétienne.
La réalité du miracle est également répandue dans le Judaïsme palestinien. Jésus luimême admet l'existence de thaumaturges autres que lui. Il dira un jour: "Et si c'est par Béelzéboul que, moi, je chasse les démons, vos fils, par qui les chassent-ils?" (Mt 12,27). Les "fils" sont les exorcistes juifs qui exercent leurs activités à l'époque où Jésus lui-même accomplit des miracles. Un de ces miracles, accompli par un rabbin, est la guérison du fils de Gamaliel. En voici le récit: "II arriva qu'une fois le fils de Rabbin Gamaliel tomba malade. Celui-ci envoya deux élèves, des sages chez R. Hamina ben Dosa. Dès que celui-ci les vit, il monta à la chambre haute et implora pour lui la miséricorde de Dieu. À sa descente, il leur dit: "Allez, la fièvre l'a quitté." Ils lui demandèrent: "Es-tu prophète?" Il leur répondit: "Je ne suis pas prophète et je ne suis pas fils de prophète" (Am 7,14), mais j'ai appris, par expérience, que si ma prière coule dans ma bouche, je sais que le malade est favorisé; sinon, je sais qu'il est rejeté. Ils s'assirent, écrivirent et notèrent l'heure précise. Lorsqu'ils revinrent chez Rabban Gamaliel; il leur dit: Par le culte! Vous n'avez ni retranché ni ajouté, mais le fait s'est bien passé ainsi: à l'heure même que vous avez notée, la fièvre l'a quitté et il nous a demandé à boire." Il s'agit d'un miracle accompli à distance. Le Rabbin sait que si les mots lui viennent facilement, c'est qu'un événement s'est produit au loin. Ce récit ne ressemble-t-il pas étrangement à la guérison du fils du Centurion en Jn 4, 46 - 54?
Nous trouvons donc des miracles dans le monde de l'Ancien Testament et dans le monde juif. Nous en trouvons également dans le monde hellénistique. " est important de noter, même si ce fait peut nous surprendre, que des païens faisaient des miracles. On a découvert en Grèce à Epidaure, un temple dédié au dieu Esculape, où s'accomplissaient de multiples guérisons. C'était un centre aussi célèbre jadis que peut l'être Lourdes aujourd'hui. Des ex-voto sont inscrits, sculptés dans les murs, et rappellent des guérisons. L'équivalent des grappes de béquilles que l'on voit accrochées dans des sanctuaires tels que, Sainte-Anne, Saint-Joseph ... Le miracle est donc un phénomène généralisé dans l'Antiquité, une réalité largement répandue. Des chrétiens comme Pierre et Paul, par exemple, ont aussi accompli des miracles. Il est nécessaire de tenir compte de ce fait pour apprécier l'activité de faiseur de miracles de Jésus.
Compréhension du monde
Parler de miracles au temps de Jésus, c'est mettre en évidence une certaine conception du monde très différente de la nôtre. À notre époque, nous sommes fortement marqués par la mentalité scientifique, par les découvertes venant de l'étude du monde. Nous nous faisons une image du fonctionnement de notre monde à partir des lois qui le gouvernent: lois de la nature, de l'astronomie, de la physique, de la chimie. Dieu nous apparaît, ainsi, un peu reculé par rapport au fonctionnement quotidien de l'univers. À l'époque où la bible a été écrite, par contre, les gens croyaient à un agir immédiat de Dieu. Dieu faisait presqu'immédiatement tout. Il y avait, de ce fait, de la part de Dieu, des agirs plus quotidiens, normaux, naturels; il y avait, aussi, des agirs plus rares, plus extraordinaires. Le miracle faisait partie de ces agirs en dehors de l'ordinaire. À l'époque de Jésus, les gens ne connaissaient pas ces lois de la nature, qui, pour nous, vont de soi; ils ne pouvaient donc pas concevoir le miracle comme un événement qui faisait lever l'une ou l'autre de ces lois.
Une autre réalité importante pour comprendre les miracles de Jésus est celle de la compréhension que les gens avaient de la maladie. Depuis toujours, nous cherchons à comprendre les origines de nos maladies, leur nature, leurs conséquences. Nous sommes toujours très mal à l'aise, même angoissés, quand, après avoir rencontré trois ou quatre médecins, ceux-ci posent un diagnostic insatisfaisant. Une telle incertitude est parfois plus difficile à vivre que la maladie elle-même. Nous voulons savoir. En cela, les êtres humains n'ont pas changé depuis deux milles ans. À l'époque de Jésus, les gens désiraient, eux aussi, connaître l'origine de leurs maladies. Nous découvrons ce besoin de savoir en lisant les évangiles. La notion de démons ou d'esprits impurs (non celle de Satan qui relève d'une autre tradition), dans les évangiles, est exclusivement liée à l'explication de la maladie.
Jésus
Quant à Jésus, personne ne remet en question sa renommée de faiseur de miracles. Un papyrus égyptien datant du Ive siècle parle de la renommée d'exorciste de Jésus. Même en monde païen, Jésus a été considéré comme un faiseur de miracles important.
Jésus, il faut se le rappeler, est un homme de son temps, sans les connaissances scientifiques d'un chercheur d'aujourd'hui. Il voit donc le monde avec le regard d'un être humain de son époque. La révélation de Dieu passe toujours à travers un être humain incarné dans une époque, dans une mentalité. Il est intéressant de noter que Jésus fait ses miracles en étant cohérent avec sa notion de Règne de Dieu. Quand on veut regarder un geste de Jésus, comme un miracle, de façon historique, il faut se souvenir qu'un fait historique comporte deux dimensions. Un fait historique est un geste qui véhicule un sens. Le sens fait partie de l'historicité d'un geste. Prenons un exemple. Sur une photo, nous voyons un homme qui embrasse une femme. Nous ne pouvons comprendre le geste historique que représente la photo si nous ne possédons pas vraiment le sens de ce geste. Si nous voulons comprendre l'historicité d'un geste très précis, nous devons en connaître le sens. S'agit-il d'un homme passionnément amoureux de sa femme? S'agit-il de quelqu'un qui vient de tromper sa femme et qui veut se cacher derrière ce geste qui devient purement formel ou encore hypocrite? Nous ne pouvons connaître l'historicité de ce geste si nous n'en possédons pas le sens.
Nous pouvons donc dire que Jésus a historiquement accompli des faits miraculeux. Sa renommée, dans les évangiles et dans le monde ambiant est trop large à cet effet pour que nous puissions en nier le fait. Alors, comme réalité historique ou comme geste humain, le miracle s'observe; il peut être admis historiquement. Jésus a fait des guérisons, il a soulagé des misères physiques. Mais il est important de considérer que, comme fait historique, le miracle de Jésus avait un sens. Et il faut insister beaucoup sur ce sens, qui est très important. Le sens et non le fait du geste en lui-même distingue Jésus des autres faiseurs de miracles. Jésus a accompli des miracles; d'autres en ont fait aussi. Ce qui caractérise ces gestes de Jésus, ce n'est pas le genre de miracles; toutes sortes de miracles ont été accomplis dans le monde ambiant. Ce n'est pas non plus qu'il a fait des miracles qui lui sont exclusifs. Jésus a ressuscité des morts; Elisée l'a fait aussi. Jésus a guéri des lépreux; Elisée aussi.
Ce qui distingue Jésus c'est le sens qu'il donne à ses miracles. Croire aux miracles de Jésus, c'est accepter le Dieu du Règne qui motive Jésus à réaliser tel type de miracle. Autrement dit, Jésus ne fait pas un miracle pour lui, pour sa renommée; il ne fait pas un miracle pour paraître plus grand que les autres; il ne le fait pas pour de l'argent ou pour se faire du capital politique. Il le fait pour soulager une misère humaine à laquelle il est confronté. Le dynamisme qui l'habite le rend sensible à cette misère et le pousse à accomplir un geste de guérison. Le sens qu'il donne aux miracles est en . lien avec la passion pour la liberté qui le caractérise. Son sens de la justice est très coloré par sa conception du Règne, par sa conception du Dieu qu'il connaît. Le Dieu d'Abraham, d'Isaac, de Jacob; le Dieu de la vie; un Dieu préoccupé par la santé de l'être humain. Jésus a passé une bonne partie de son activité à s'occuper de la santé des êtres humains, parce qu'il croyait que c'était important pour le Dieu vivant. C'est la simplicité caractéristique du Dieu du Règne. La clientèle de Jésus, ses paroles, les miracles: tout est simple chez Jésus. Faire des miracles n'était pas à la disposition de tout le monde, au temps de Jésus comme à l'époque de l'Ancien Testament, dans le peuple juif comme chez les païens des sociétés environnantes. C'était l'apanage de certains qui possédaient un don. Sans démythifier à outrance ou vouloir diminuer
Jésus, on pourrait admettre que Jésus avait un don mais il ne le contrôlait pas. Par exemple, en Mc 6, Jésus s'en va à Nazareth; il voudrait faire des miracles mais il ne le peut pas. "Et il ne pouvait faire là aucun miracle ... Et il s'étonnait de ce qu'ils n'avaient pas confiance" (Mc 6,5 - 6)
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Il est intéressant de noter que Jésus ne peut pas taire de miracles parce que les gens de Nazareth n'ont pas confiance. Nous pouvons comparer cette attitude avec celle que nous avons face à un spécialiste qui ne répond pas à nos questions, qui ne semble pas intéressé à notre problème. Il est étonnant de constater que, dans cette situation, les médicaments ne nous apparaissent pas efficaces. En effet, le courant de sympathie entre le médecin et son client doit exister pour que la pilule fasse effet. Au temps de Jésus, de la même façon 1 il fallait avoir confiance pour que le miracle se produise. C'est comme si des dispositions étaient requises pour que le miracle arrive. Le Rabbin, cité plus haut dans un récit de miracle, disait: "J'ai appris par expérience que si ma prière coule dans ma bouche je sais que le malade est favorisé, sinon je sais qu'il est rejeté." La capacité de faire des miracles était un don, une faculté qui venait d'ailleurs, peut-être de Dieu, et qui avait besoin de certaines conditions pour se réaliser. Il est certes vrai que Jésus a fait des miracles, certains miracles, un certain nombre de miracles. Et il semble que les miracles les plus sûrs, historiquement parlant, sont ceux qui mettent en cause deux être humains: le thaumaturge et le malade. Rien, d'ailleurs, ne nous empêche de penser que la maladie pouvait être d'origine psychosomatique. Une maladie psychosomatique est une maladie réelle. Le psychisme a beau jouer un rôle important, il n'enlève pas la réalité de la maladie. Rencontrer quelqu'un comme Jésus, qui était bon, compréhensif, qui pouvait écouter et être chaleureux; rencontrer quelqu'un comme Jésus qui a pris conscience du don qu'il a reçu, qui était unifié dans tout son être, faisait certainement beaucoup de bien. Nous pouvons nous faire une idée de la guérison à partir de nos expériences quotidiennes. On rencontre des gens qui nous stressent, d'autres qui nous détendent. Et dans ces relations humaines, quelque chose de Dieu peut se révéler.
Le miracle auiourd'hui
Les faiseurs de miracles existent encore aujourd'hui. Nous n'avons qu'à entendre des gens qui viennent de sociétés structurées différemment de la nôtre raconter des faits étonnants. Mais ce qui est important de retenir c'est que, chrétiennement parlant, le miracle est un geste humain avec un sens déchiffrable. Et, dans un contexte de foi, ce sens doit être nécessairement en lien avec celui de Jésus. Ce principe peut aider à notre discernement. Il est important d'avoir en tête ces réflexions quand on s'adresse aux enfants. Il faut se méfier du merveilleux qui n'a pas de sens: les icônes qui saignent, les statues qui suintent. Ces faits n'interviennent pas dans un contexte de relations humaines. Ces événements n'ont pas de sens dans la ligne du Dieu du Règne. Le miracle peut être une réalité humaine, il peut être une réalité religieuse. Il devient une réalité de foi quand le concept de Règne de Dieu y joue un rôle, c'est-à-dire quand la solidarité avec les pauvres devient importante, car le sens des miracles de Jésus c'est la solidarité avec les pauvres et les opprimés. Quand un miracle véhicule ce sens, nous pouvons y croire.
Guérison d'une femme courbée (Lc 13. 10 - 17)
Voyons maintenant une illustration de cet exposé, peut-être un peu théorique. Un récit extraordinaire, très beau, significatif aussi, en Lc 13, 10 - 17. "Jésus était en train d'enseigner dans une synagogue un jour de sabbat. 1/ y avait là une femme possédée d'un esprit qui la rendait infirme depuis dix-huit ans; elle était toute courbée et ne pouvait se redresser complètement. En la voyant, Jésus lui adressa la parole et lui dit: "Femme, te voilà libérée de ton infirmité." il lui imposa les mains: aussitôt elle redevint droite et se mit à rendre gloire à Dieu. Le chef de la synagogue, indigné de ce que Jésus ait fait une guérison le jour du sabbat, prit la parole et dit à la foule: "II y a six jours pour travailler. C'est donc dans ces jours-là qu'il faut venir pour vous faire guérir, et pas le jour du sabbat." Le Seigneur lui répondit: "Esprits pervertis, est-ce que le jour du sabbat chacun de vous ne détache pas de la mangeoire son boeuf ou son âne pour le mener boire? Et cette femme, fille d'Abraham, que Satan a liée voici dix-huit ans, n'est-ce pas le jour du sabbat qu'il fallait la détacher de ce lien?" À ces paroles, tous ses adversaires étaient couverts de honte, et toute la foule se réjouissait de toutes les merveilles qu'il faisait."
Pour comprendre ce miracle nous devons nous souvenir que la maladie était vue comme le fait d’un démon ou d'un souffle impur. Le démon avait rendu cette femme infirme, toute courbée. Jésus la voit alors que les autres de la synagogue ne la voient plus, ou la regardent de haut. Et elle est humiliée par sa condition d'infirmité, parce que pour parler à quelqu'un, elle doit essayer de relever la tête tandis que les autres doivent se pencher vers elle. C'est là une attitude humiliante et fatigante, attitude qu'elle a depuis dix-huit ans; elle n'a plus le goût de lutter, plus le goût de faire son chemin et de les forcer à l'écouter. Alors elle se retire, écoute le rabbin faire son sermon, parle à Dieu, cherche à se sentir un peu mieux avec elle-même. Mais Jésus, lui, parce qu'il a le sens du Règne de Dieu, la voit et la délivre de son infirmité. On comprend qu'elle soit toute contente.
Le début du récit raconte le fait; mais c'est dans la suite du récit que se trouve le sens important du miracle. Nous ne connaissons pas la cause de l'infirmité de cette femme. Avec les connaissances d'aujourd'hui nous pourrions supposer que la femme courbée faisait de l'ostéoporose: une décalcification des os due à un manque de calcium. Ou encore supposer que sa maladie est la suite d'un très grand stress où la partie la plus faible de l'organisme subit le contrecoup. Nous ne pouvons savoir quel était au juste le diagnostic à poser. Jésus, lui, rend le seul diagnostic qu'un homme de son temps est capable de rendre: c'est un démon qui est à l'origine de cette maladie. Le reste du récit va expliciter cette affirmation.
L'histoire débute en disant que Jésus était en train d'enseigner dans une synagogue un jour de sabbat. Nous avons déjà souligné le fait qu'il était interdit de s'occuper des malades le jour du sabbat, sauf de ceux qui étaient en danger de mort. On attendait plutôt après le sabbat. Transporter quelqu'un ou guérir quelqu'un le sabbat était considéré comme un travail et on n'avait pas le droit de travailler le jour du sabbat. Alors le chef de la synagogue, bon curé du temps qui a lu la Loi, veut agir correctement et plaire à Dieu. C'est un saint homme, le chef de la synagogue. Il prend la parole et se montre indigné du fait que Jésus ait fait une guérison le jour du sabbat. Puis il invite la foule à venir implorer des guérisons durant les six autres jours pendant lesquels on peut travailler. Pourquoi choisir le jour du sabbat? Affirmation très correcte, très cohérente. De plus, cette femme n'était pas tombée malade subitement; elle endurait son mal depuis dix-huit ans. Alors, elle pouvait bien attendre quelques heures de plus. Sauf que Jésus, lui, ne sera pas là dans quelques heures. Et c'est maintenant qu'elle est malade. C'est maintenant que le Dieu du Règne l'aime. Ce n'est pas après le sabbat mais maintenant qu'elle a besoin d'entendre, parce que Jésus est là, la bonne nouvelle du Règne de Dieu qui, pour elle, est la guérison. Et Jésus rappelle que les paysans détachent leurs animaux et les font boire le jour du sabbat. En effet, dans une civilisation agricole, les gens s'organisent pour que la loi permette aux paysans de faire boire leurs animaux même pendant le sabbat. Les animaux doivent s'abreuver pour fournir, le lendemain, une bonne journée de travail. Alors Jésus essaie de démontrer au chef de la synagogue son incohérence. Il accepte que les paysans défassent le noeud qui attache leurs animaux au poteau pour les amener boire (et défaire un noeud est en somme un travail), mais il n'admet pas que cette fille d'Abraham, que le démon a liée voilà dix-huit ans, soit délivrée de ce lien le jour du sabbat. Ici nous voyons très clairement la compréhension de Jésus. Pour lui, il y a un démon qui, dans cette femme, depuis dix-huit ans, fait des noeuds dans ses muscles. Plus il fait de noeuds, plus elle courbe. Le travail de Jésus a été de défaire les noeuds qui attachaient cette femme pour la délivrer et lui redonner la santé. Nous pouvons traduire ainsi la remarque de Jésus: "Ça n'a aucun sens. Vous permettez à des gens de défaire les liens qui attachent les animaux pour les amener boire et vous ne permettez pas de défaire des liens qui asservissent des êtres humains pour les guérir. C'est une loi à remettre en question."
Le Dieu du Règne se présente donc ainsi:
1-Le Dieu du Règne c'est un Dieu qui se manifeste dans une situation de détresse.
2- Le Dieu du Règne est souvent celui qui prend des mesures contre la théologie officielle, qui a souvent tendance à durcir en législation ce qui devrait être laissé à l'écoute de la vie.
Le Dieu du Règne semble en guerre contre lui-même. " est à l'origine des théologies, des lois et des droits canons. Mais, quand le Dieu vivant prend conscience que la loi inspirée par lui, fait tort à l'être humain, alors il devient contre cette loi dont il est lui-même à l'origine. Cette situation n'est pas confortable.
L'Évangile n'est pas un combat des bons contre les méchants. C'est Dieu contre Dieu. Un sens de Dieu contre un sens de Dieu. Jésus a été mis à mort par des gens honnêtes qui l'ont fait pour rendre gloire à Dieu. Voilà le scandale de la mort de Jésus.
Ces réflexions se font dans une situation de détresse. Elles vont souvent à l'encontre d'une certaine théologie officielle, ce qui révèle un Dieu inconfortable: le Dieu renversant du Règne. Quelque chose de subversif se retrouve chez Jésus; c'est ce qui a provoqué sa mort. Le Règne de Dieu est une espérance: Dieu est du côté des petites gens, des opprimés de notre monde. En Jésus, il a pris partie pour eux, dans des gestes bien concrets. Il s'est révélé comme une bonne nouvelle active. Le Dieu du Règne s'est exprimé dans les gestes de Jésus; il oeuvre maintenant par Je Christ ressuscité. Il est celui qui est maintenant actif dans la communauté chrétienne, pour que se poursuive, dans notre monde de maintenant, la révélation de sa passion pour la vie.
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Tags : miracle, jesus, dieu, sens, sabbat
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