• Méditation : la mise en don de soi - Luc 9, 1-6 - Stéfan Thériault

     Source de la méditation - « Il les envoya proclamer le règne de Dieu et guérir les malades » (Luc 9, 1-6)

    Méditation : la mise en don de soi - Luc 9, 1-6 - Stéfan Thériault


     Méditation : la mise en don de soi



    Le texte d'aujourd'hui offre quatre indications aux missionnaires de l'évangile :
    une conversion à vivre, une proclamation à faire,
    des précisions sur le nécessaire à emporter et un accueil dans une maison.

    Jésus, dès le départ, donne à ses apôtres « pouvoir et autorité sur tous les démons,
    et de même pour faire des guérisons ».

    Voilà la première indication en regard de la mission qui leur confie.
    Il les avertit que cette mission est le lieu d'un combat contre le mal
    et qu'il a comme but de libérer les personnes de son emprise.
    Et ce combat se fait d'une personne à l'autre,
    car chaque personne libérée peut changer les gens autour d'elle.
    Elle devient porteuse d'une libération du mal.
    Ce qui est aussi important est que ce pouvoir et cette autorité
    n'est pas un pouvoir sur les personnes mais sur le mal,
    sur ce qui empêche justement d'être une personne.

    Cette grâce offerte pour la route n'est pas d'abord et uniquement
    une grâce pour les autres mais une grâce d'abord pour nous-mêmes.
    Cela me rappelle ces mots de saint François d'Assise dans son testament :
    « Le Seigneur me donna ainsi à moi, frère François,
    de commencer à faire pénitence ».
    À la fin de sa vie, il se rappelle cette grâce, car, jusqu'à la fin,
    il la portera et la vivra.
    Cette grâce de libération du mal est un appel à la conversion.
    En d'autres mots, chaque personne envoyée en mission
    est mise sur la route de la conversion et ne peut être témoin
    de cette libération apportée par le Christ que si elle cherche continuellement
    à se laisser libérer elle-même.
    Et, sur cette route, il nous faut être conscients que,
    du moment où nous voulons apporter le Bien, Dieu, au monde,
    le mal cherchera toujours à nous en empêcher ou à nous détourner de la route
    et multipliera les obstacles.
    Cette grâce donnée par Jésus n'est donc pas anodine, car, de l'éprouver,
    nous donne confiance et nous encourage à marcher et à persévérer.
    Nous avons besoin de percevoir qu'un Autre agit par, avec et en nous.

    La deuxième indication est de « proclamer le règne de Dieu et guérir les malades ».
    La proclamation du règne de Dieu ne peut être seulement

    une prise de parole extérieure à nous mais l'acceptation intérieure première
    de cette Parole.
    Pour proclamer la Parole, nous devons accepter qu'elle nous ait libérés
    et labourés de l'intérieur, qu'elle nous ait transformés et que,
    par cette transformation, nous soyons devenus paroles.
    Si la Parole et la Vie de Dieu ne nous habitent pas ou, dit autrement,
    si le règne de Dieu n'est pas venu en nous, de quel règne sommes-nous les témoins ?

    À la différence d'une conférence où nous pouvons rester extérieurs
    à la parole proclamée, la proclamation du règne demande de notre part
    de nous abandonner à cette Parole pour qu'elle se dise par nous,
    qu'elle se fasse chair par nous. La proclamation n'est pas d'abord une action à mener mais l'expérience personnelle d'une Présence que nous sommes appelés à faire goûter, car Dieu habite en chacun-e. Il ne s'agit pas de faire entrer Dieu en l'autre
    mais de permettre à Dieu de naître en l'autre;
    chacun-e est appelé-e à vivre l'expérience de l'incarnation,
    à laisser naître la Parole en lui afin de naître en sa parole.
    Comme l'écrivait Maurice Zundel : « Ce qu'il faut sauver dans les autres,
    c'est l'Amour, et comment le sauver ? Par l'Amour.
    Il ne s'agit pas de prêcher l'Amour, mais d'être l'Amour. »
    C'est pourquoi, comme nous l'avons vu dans une méditation précédente,
    nous devenons la multiplication de cette Parole et de cet Amour et, ce faisant,
    c'est notre vie même qui est partagée comme un « pain de Vie ».

    Dans cette optique, Jésus indique le nécessaire à apporter :
    « Ne prenez rien pour la route, ni bâton, ni sac, ni pain, ni argent ;
    n’ayez pas chacun une tunique de rechange ».
    En somme, Jésus nous dit que cette mission ne s'appuie pas
    sur nos richesses personnelles ou sur celles du monde
    mais qu'elle ne peut se vivre que dans le dépouillement.

    Seul le pauvre peut être témoin de la Parole parce que cette Parole, le Fils,
    en Dieu est le pauvre par excellence : celui qui reçoit tout du Père
    et redonne tout au Père. Il n'a rien qu'il n'ait reçu et rien qu'il n'ait redonné.
    Comme notre mission est une mission dans le Christ,
    nous ne pouvons qu'être des pauvres dans la pauvreté du Christ.
    Ceci met l'accent, avec d'autant plus de force, sur l'essentiel qui est à donner,
    à savoir nous et Dieu en, par et avec nous.
    La mission est un « être » donné, et non un faire.

    À cet égard, nous traversons une période formidable de l'Église,
    une Église qui devient de plus en plus pauvre et, à sa façon, désemparée.
    Quand plus rien ne fonctionne, il ne nous reste qu'à redécouvrir le Christ
    et la grâce de nous laisser donner.

    Enfin, la dernière indication vise l'accueil :
    « Quand vous serez reçus dans une maison, restez-y ; c’est de là que vous repartirez.
    Et si les gens ne vous accueillent pas, sortez de la ville

    et secouez la poussière de vos pieds : ce sera un témoignage contre eux. »
    Au terme, la vérité de la mission tient à une simple chose : l'accueil.
    Nous connaîtrons que la proclamation a réussi
    quand elle permet à l'autre d'entrer chez lui.
    Il nous ouvre la maison de son être, signe qu'il a accueilli la Parole
    et que s'est entrouvert en lui le lieu de la Présence.
    En nous ouvrant sa maison, nous sommes témoins d'une communion
    qui se tisse dans le Christ.
    S'il refuse cette rencontre avec lui-même, avec Dieu et avec nous,
    il ne nous restera qu'à « secouer la poussière de nos pieds »,
    car nous n'aurons pas eu la grâce de vivre avec lui l'Amour qui lave les pieds.

    Rappelons-nous que notre être même est mission.
    Le chemin de la mission est donc une route très personnelle
    de la découverte de son don et une mise en don de soi pour l'A(a)utre...

    Stéfan Thériault, directeur du Centre« Le Pèlerin »
    stheriault@lepelerin.org  (www.lepelerin.org)23 septembre 2020

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