• I - « Péché », culpabilité, béatitude du ciel - Suzanne

    (Premier de trois articles)

     I - « Péché », culpabilité, béatitude du ciel 

     

    A l'origine de tous les aspects de l'amour, est l'éros. L’Eros qualifie l’élan vital, la relation, l’élan amoureux, le désir. Il n’est pas un poison. « Tu aimeras ». Pourtant cet élan peut être dévié. Au lieu de s'appliquer à sa finalité naturelle : la croissance selon l'être intérieur, il s'investit dans l'horizon existentiel et extérieur ; au lieu de chercher l'infini, il s'enferme dans le fini (la  matérialité). Porteur d’ambiguïté, il fait de l’homme un être asservi par une illusion du désir qui se retourne en auto-accusation infinie. La culpabilisation de la sexualité en est un exemple radical, péché toujours renforcé dans la religion chrétienne. Le christianisme est-il la religion du péché ? Cela paraît étrange car l’Evangile se présente comme fin du péché ce qu’affirme particulièrement Paul, avec force.

    Péché et culpabilité. Transgression. On conçoit souvent le péché comme une force inerte, qui ne donne pas signe de vie, sorte  de masque d’où le sourire disparait, nous entrainant naturellement vers le sentiment de culpabilité, quitte à distinguer des degrés de la culpabilité  et même à repérer les fausses culpabilités. Mais la chose est plus complexe. Le péché, c’est d’abord faire ce qui n’est pas permis, ce que la loi défend. La culpabilité est alors la conscience douloureuse, malheureuse de la transgression. La culpabilité révèle que le désir, divisé, mal orienté, nous sépare de « l’amour du Père ». Elle nous confronte à la jouissance sans limite et à la soumission à la loi de l’Autre, nécessaire à la relation où le désir lui-même trouve vie. La culpabilité peut avoir un sens positif : s’imputer à soi-même la transgression, ne pas se décharger sur les choses ou les autres, c’est pouvoir modifier ses comportements. Le malheur serait de s’y enfermer et de faire de la transgression l’échec radical qu’est l’accusation. L’homme s’éprouve alors coupable d’être ainsi coupable. Or, la transgression peut être expérience de vie, processus d’initiation où l’homme s’éprouve en son autonomie, par rapport à une toute-puissance des interdits qui le laisserait, en quelque sorte, en enfance. Prise en cette fonction, la transgression est, si l’on peut dire, sans gravité, ainsi l’enfant qui « désobéit » est puni, mais la punition n’ôte rien à l’amour des parents pour lui. Dès lors, si nous situons avec justesse la transgression, en sorte que l’interdit y demeure dans sa fonction fondatrice, la culpabilité n’est qu’un moment de notre vie qui ne devient malheur que lorsqu’on s’y enferme. En sortir demande toutefois un long et dur travail.

    La transgression n’est pas le fond du péché, qui est la déviance. Transgression primordiale qui détourne l’homme entièrement du chemin de vie. Puissance par laquelle il a la prétention de se faire maître, de réduire l’autre en lui-même à rien, qui refuse la loi en ce que la loi veut signifier qui est justement la présence et le droit de l’autre. La déviance s’exerce tout particulièrement au niveau de la sexualité qui représente précisément en l’homme cette puissance de communiquer pour donner la vie mais qui lui signifie en même temps sa limite et sa puissance de relation. Voilà en quoi, il y a perversion de l’Eros : L’homme veut posséder les sources de la vie, il refuse et nie toute origine où il ne voit plus qu’esclavage et non positive filiation. La déviance est la source empoisonnée, elle a donc une bien plus grande profondeur en l’homme que les simples transgressions. (Cf. texte capital de la Genèse). Cette déviation fait perdre à l'homme le sens de la profondeur, elle engendre la haine, la violence et disloque ce qui fonde les rapports humains : la fraternité, la relation, le respect de l’autre, l’amour, l’amitié, la générosité, le don de soi etc. Toutes les formes de l’amour viennent à tourner. Pourtant, tout ce qui parait se lier à la déviance, contaminé par elle, peut prendre sens sur le chemin de vie et où l’amour donnera enfin vie. Il n’est pas de vie humaine sans le don d’une parole qui introduit à la vie. Cette parole (« l’Evangile ») dit l’amour, sans quoi l’homme meurt.  

    Suzanne Giuseppi Testut – ofs

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