• Illusion d'un monde " hors souffrance ".

    Chacun poursuit toujours, d'une manière ou d'une autre, un rêve d'immortalité et de non-souffrance. La poursuite de ce rêve se manifeste dans les mécanismes de défense qui visent à occulter la réalité de la souffrance et à la rejeter hors du champ de la conscience ; on peut la voir, on détourne les yeux, on fait " comme si " elle n'existait pas. 

    Dénier la souffrance de cette manière, c'est se complaire dans l'image idéale de soi et du monde où la finitude et la mort ne sont pas reconnues. Ainsi le sujet peut-il entretenir, inconsciemment sans doute, une sorte de délire d'immortalité. Il se barricade dans un monde imaginaire en estimant que la souffrance et la mort, ce sont toujours celles des autres, mais jamais la sienne. Il se construit ainsi un univers conforme à son besoin de sécurité et de complétude sans faille. 

    Ainsi, par exemple, dans le discours publicitaire, on ne voit jamais que des êtres beaux, jeunes et sains. La souffrance n'y est jamais représentée. Lorsqu'elle l'est, c'est afin de proposer un produit qui en sera le remède miracle. Dans le discours publicitaire, on ne meurt pas... 

    L'éloignement des cimetières, la mise à l'écart des malades, la marginalisation des personnes handicapées, n'est-ce pas aussi pour les sociétés une manière de voiler la souffrance et la perspective de la mort ? 

    Cependant cette illusion d'un monde " hors souffrance " est tôt ou tard brisée. Car la souffrance finit toujours par s'insinuer dans la vie du sujet de manière insistante et persistante. Dans ce cas, malgré tout, on pourra encore tenter de se voiler les yeux. Par exemple, lorsqu'il s'agit de la souffrance des autres, on réagira par l'indifférence. Ainsi face au spectacle de la souffrance que montre la télévision, peut se créer une sorte d'accoutumance où l'on parvient à voir souffrir sans plus s'émouvoir. On acquiert alors un cœur endurci, incapable de compassion. Ou encore, lorsqu'il s'agit de souffrance personnelle, on peut chercher à s'étourdir dans le bruit, la drogue ou l'alcool afin de fuir le mal présent et poursuivre malgré tout son rêve déçu de complétude. 

    Le suicide même peut être une manière ultime d'éviter la souffrance et la perspective de devoir mourir : plutôt mourir vite que de devoir rencontrer la souffrance et la mort. Ainsi n'est-il pas rare de voir des personnes se donner la mort le jour où elles ont appris qu'un mal incurable les tenait. Le suicide dans ce cas est une sorte de précipitation dans la mort du fait qu'on ne l'a jamais acceptée ; ultime tentative pour fuir ce qui vient et ce que l'on a toujours voulu nier ; ultime refuge d'un rêve d'immortalité déçu. 

    Ainsi donc, à force de vouloir dénier la réalité de la souffrance, à force de poursuivre un rêve de complétude sans faille, on est amené à vivre la souffrance, qui vient tôt ou tard, dans la désespérance et la déréliction. La souffrance est alors sans espoir, sans chemin ; horreur aveugle, solitude de l'abandon, détresse suprême où vient s'exténuer un rêve d'immortalité déçu. Ainsi, vivre dans l'imaginaire d'un monde " hors souffrance ", c'est ajouter à la souffrance, lorsqu'elle vient, les traits de la désespérance. Le problème qui se pose est donc de pouvoir vivre l'inévitable expérience de l'altération sans cependant sombrer dans le désespoir. Cela implique le consentement à " vivre avec " la souffrance, non point pour la subir ou s'y complaire, mais pour négocier au mieux l'expérience du "devenir autre ". 

    Dans cette optique, le pas décisif à franchir est l'aveu par le sujet souffrant de la douleur qui le déchire, à un autre qui l'écoute. Le cri, l'appel, la parole adressée à l'autre est, à la fois, le consentement à la réalité de la souffrance et l'inscription de l'espoir au sein de la situation douloureuse elle-même. L'aveu de la souffrance, lui, par la relation qu'il institue, a un effet salutaire, thérapeutique. Le fait de parler à un autre libère de l'angoisse. Ainsi la souffrance comme expérience d'altération devient-elle, par la médiation de la parole, expérience de l'altérité, de la naissance à la rencontre de 'autre. 

    Et cette rencontre de l'autre délivre d'un réel et d'un devenir sans espoir. La rencontre d'autrui dans le creuset de la souffrance neutralise la désespérance, ranime le désir de vie et entraîne donc au combat commun contre la souffrance. 

    Bruno LEROY.

    source http://brunoleroyeducateur-ecrivain.hautetfort.com

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  • VERS DES PAROISSES PLUS FRATERNELLES

    VERS DES PAROISSES PLUS FRATERNELLESNous avons tous le désir de vivre la solidarité avec les plus pauvres dans notre communauté chrétienne et d’avancer sur le chemin de la fraternité… Mais comment s’y prendre ? Ce livre a le mérite d’ouvrir des pistes pour agir, et d’attirer notre attention sur les questions indispensables à se poser !

    Deux jésuites y relatent chacun une expérience différente mais allant toutes les deux dans le sens de la fraternité à vivre en paroisse : Etienne Grieu à Poissy en région parisienne et Vincent Lascève dans un ensemble paroissial proche de Toulouse.

    Extraits : 

    A Poissy… éveiller tous les paroissiens à la solidarité 

     « L’Eglise a souvent tendance à vivre la solidarité sur le mode de la sous-traitance. Une famille est en difficulté ? Allez voir l’équipe du Secours catholique ! On découvre qu’une personne est très isolée ? La Conférence Saint Vincent de Paul s’en chargera. (…)

    Bien sûr il faut dans l’Eglise, comme pour la société, des personnes formées et compétentes afin d’accompagner celles et ceux qui, aux yeux des autres, n’ont pas de valeur et ne sont plus invitées à entrer dans le jeu des échanges. (…) Mais il ne faut pas que l’engagement de ces personnes soit le prétexte pour que la communauté dans son ensemble, considérant que les problèmes sont pris en charge, se désintéresse de ceux qui sont en détresse.

    C’est précisément ce que vise le Réseau de fraternité et proximité mis en place dans le groupement paroissial de Poissy, Villennes et Médan (Yvelines) depuis 2006. Son projet est ‘d’éveiller tous les paroissiens à la solidarité de proximité : ouverture du cœur, attention aux autres… et les inciter à poser des gestes concrets.’ » p. 15-16

    A Castanet-Tolosan…avec la Famille Bartimée

     La démarche est un peu différente à Castanet-Tolosan, s’inspirant de ce que vivent les Sœurs de la Bonne Nouvelle avec les personnes du Quart-Monde.

    « La Famille Bartimée est un service paroissial qui fait partie, avec le Secours Catholique et le Café Amitié, du « service du frère » (ou diaconie) comme il existe aussi dans la paroisse, d’autres services comme la catéchèse, la liturgie, les équipes de baptême, de funérailles, etc. La dimension paroissiale est fondamentale pour ses membres, car ils croient à la fécondité d’une fraternité comme Bartimée au cœur d’une paroisse : la Famille Bartimée s’enrichit de la participation à la vie liturgique et festive de la paroisse ; et réciproquement les paroissiens sont ramenés à une foi plus profonde au contact des plus pauvres. Les personnes accueillies à Bartimée, une quinzaine actuellement, n’ont pas un profil-type défini. Elles ont cependant toutes en commun de vivre une vie très difficile en raison d’une forme d’exclusion sociale. »… p. 47-48

    Vivre la fraternité

    Le fruit majeur de ces expériences a pour nom fraternité, « ce mot qui est une invention chrétienne, apparaissant pour la première fois dans le Nouveau Testament (1 P 2, 17 et 5, 9), jamais employé auparavant par les auteurs non-chrétiens. Lorsqu’il fait irruption, il nomme une réalité jusqu’à présent jamais désignée comme telle : une communauté de frères, de sœurs, autrement dit des personnes qui se reconnaissent unis par des liens extrêmement forts. (…) Il s’agit de « se reconnaître adoptés comme frères par le Christ, qui, dans le même geste, remet les croyants dans la relation à leur Père. » p. 82-83

    Un beau défi à relever pour faire de nos communautés des lieux fidèles à l’Evangile ! 

    Marie-Dominique, Equipe France

    Vers des paroisses plus fraternelles – Etienne Grieu et Vincent Lascève – Ed. Franciscaines – décembre 2016

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    SOURCE https://www.prieraucoeurdumonde.net
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  • Homélie du 25ème dimanche du temps ordinaire

    Abbé Jean Compazieu

    Les ouvriers de la onzième heure 

     

    Textes bibliques : Lire

    Ces textes bibliques que nous venons d’écouter sont porteurs d’espérance. Ils nous disent l’amour gratuit de Dieu qui nous est offert à tous, sans mérite de notre part. Même quand tout va mal, il est là. C’est ce qui est annoncé par le prophète Isaïe dans la première lecture. Il s’adresse à un peuple très éprouvé par de longues années d’exil. Dieu l’invite à se nourrir de sa Parole dans un festin où tout est donné gratuitement. 

    Le Seigneur se veut proche de tous. Mais il faut le chercher, l’invoquer et le désirer. Il appelle les pécheurs que nous sommes à convertir leur pensée et leur conduite. Nous sommes tous invités à revenir vers Dieu qui est riche en pardon et en miséricorde. Sa sainteté et sa transcendance le placent à une immense distance entre le ciel et la terre. C’est le péché qui a creusé cet écart entre l’homme et le Dieu trois fois saint. Mais Dieu ne cesse de faire le premier pas vers nous. Son amour nous est toujours offert. Il nous rapproche ainsi de ses pensées et de ses chemins.

    L’apôtre Paul a lui aussi bénéficié de cette miséricorde du Seigneur. Depuis qu’il a été saisi par le ressuscité sur le chemin de Damas, sa vie n’a d’autre horizon que de diffuser la bonne nouvelle. Par sa vie, il rend gloire au Christ en le servant. Au moment où il écrit sa lettre, Paul est en prison. Il sait qu’il va être condamné à mort. Il affirme que pour lui, ce serait un bien, car il serait pour toujours avec le Seigneur. Mais si, en restant dans ce monde, il peut se rendre utile aux communautés chrétiennes, il est prêt à travailler pour elles. Il nous apprend à renoncer à notre manière de penser pour nous ajuster à celle de Dieu.

    Dans l’Évangile, nous lisons la parabole des ouvriers de la 11ème heure. Il y aura toujours quelqu’un pour dire : « Je ne suis pas d’accord ; il n’est pas normal que les ouvriers de la 11ème heure soient payés comme ceux de la première ». C’est vrai, mais ce n’est pas de cela qu’il s’agit dans l’Évangile de ce jour. Le vrai message est ailleurs.

    On nous a appris qu’il faut faire beaucoup d’efforts pour chercher Dieu, le rencontrer, le « mériter » et ainsi pouvoir accéder à son Royaume. Aujourd’hui, l’évangile voudrait nous aider à corriger notre manière de voir les choses. Ici, c’est le Maître du domaine c’est-à-dire Dieu qui fait le premier pas vers l’homme. Lui-même sort cinq fois pour embaucher des ouvriers pour sa vigne. C’est Dieu qui, le premier, se met à la recherche de l’homme. Il le fait inlassablement sans jamais se décourager.

    L’important c’est d’entendre cet appel que le Seigneur nous adresse inlassablement tout au long des jours et des années : « Allez, vous aussi, à ma vigne. » Cette vigne, c’est un symbole très fort que nous retrouvons tout au long de la Bible. Pour l’Évangile, c’est le Royaume de Dieu. Jésus en est le cep et nous sommes les sarments. Il faut absolument que cette vigne produise du fruit. C’est en vue de cette mission que Dieu appelle des ouvriers. Travailler à la vigne du Seigneur c’est témoigner de l’espérance qui nous anime. Nous sommes envoyés vers ceux et celles qui nous entourent, en particulier vers ceux qui sont blessés par les épreuves de la vie, la violence, la maladie, les catastrophes naturelles.

    Travailler à la vigne du Seigneur, c’est tout faire pour redonner joie et espérance à ceux qui en manquent, c’est être artisan de paix, d’unité et de réconciliation, c’est tout faire pour que nos communautés deviennent plus vivantes et plus fraternelles. À travers notre accueil, nos paroles et nos actes, ceux qui nous entourent doivent pouvoir découvrir quelque chose de la bonté de Dieu. Ils sont nombreux ceux et celles qui doutent et qui cherchent un sens à leur vie. Ils ont besoin de rencontrer sur leur route de vrais témoins de la foi.

    En réponse à cet engagement, le Christ nous promet « ce qui est juste. » Dans notre esprit, il s’agit d’un salaire proportionnel au travail accompli. Celui qui travaille plus doit gagner plus. Mais la justice de Dieu n’a rien à voir avec cette conception distributive. Elle est fondée sur l’amour, un amour sans limite qui dépasse tout ce que nous pouvons imaginer. Le salaire qu’il promet, c’est d’être avec Jésus dans son Royaume. De ce fait, il est forcément le même pour tous. Il ne faudrait pas croire qu’en raison de nos mérites, nous avons des droits sur Dieu. Dieu ne nous donne pas en fonction de nos mérites mais en fonction de son amour qui sans limite.

    En célébrant l’Eucharistie, nous demandons au Seigneur de nous ajuster à cet amour qu’il ne cesse de nous porter. Qu’il nous apprenne à regarder les autres comme des frères et des sœurs. Il n’y a pas de premiers ou de derniers. Nous sommes tous appelés à la même table de famille, tous enfants du même Père.

    Sources : Revues Fiches dominicales – Feu Nouveau – Lectures bibliques des dimanches (Albert Vanhoye) – Guide Emmaüs des dimanches et fêtes – dossiers personnels.

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  • RENCONTRE : YVES DUTEIL, LE RÉSISTANT VULNÉRABLE

    Jeudi, 14 Septembre, 2017
     
    RENCONTRE : YVES DUTEIL, LE RÉSISTANT VULNÉRABLES’assoir une heure et demie avec l’auteur de Prendre un enfant par la main c’est comme prendre un café avec un ami de longue date. Les arbres du parc Lafontaine évoquent soudainement ceux du parc Monceau, à Paris. u gré des questions, l’artiste se livre tout entier. Dans son regard où se côtoient douceur et fragilité se lit pourtant la force tranquille du militant et du résistant.
     
     L’auteur-compositeur Yves Duteil était de passage au Québec pour présenter son livre Et si la clé était ailleurs? (Médiaspaul, 2017). Un ouvrage qui pose la question de l’attitude à adopter face aux multiples obstacles qui se dressent devant l’humanité. Yves Duteil a quant à lui décidé de revêtir une armure fissurée qui laisse passer sa propre lumière intérieure et celle de ceux qu’il croise dans son quotidien. Avec pour seules armes la délicatesse, la tendresse, la prière, la bienveillance, la douceur, l’espérance et le silence.
     
     «Chacune de ces notions pourrait être qualifiée de granola, de quétaine. C’est d’ailleurs contre cette perception que j’ai eu à me battre toute ma vie. Sauf que le temps, je dirais, impose le respect. J’ai l’impression que mon chemin, c’est de conquérir le respect par rapport à cet ensemble de choses qui constituent un essentiel, nos essentiels, et que nous avons tendance à oublier parce que cela est un murmure qui est recouvert par le tumulte du quotidien.»
     
     «La beauté, la bienveillance, le silence sont des notions que l’humanité a tendance à oublier, à perdre, à négliger, mais qui sont tellement importantes. Malgré moi, j’en suis un peu devenu le militant et le résistant. Je me sens aujourd’hui comme un résistant parce que j’ai le sentiment de défendre quelque chose d’un peu particulier, qui est hors des sentiers battus.»
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  • Prier le verbe : l'alphabet hébraïque, icône du Christ - Judaïsme - Élisabeth, que plusieurs connaissent de par ses écrits sur ce Blog vient de publier un nouveau volume... Prier le verbe : l'alphabet hébraïque, icône du Christ - Judaïsme

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    Bonjour Richard,Prier le verbe : l'alphabet hébraïque, icône du Christ - Judaïsme -

    J'ai La joie de t'annoncer la sortie de mon nouveau livre.

    Dans la paix du Christ
    Elisabeth

     

    RÉSUMÉ

    « C'est par le biais de ma conversion au catholicisme, à l'âge de quarante-cinq ans, que je me suis intéressée à la langue de la Bible, plus précisément aux lettres de son alphabet. J'ai été comme frappée d'amour pour chacune d'elles et j'ai compris intimement que les aimer, c'était aimer le Christ. N'est-il pas l'alpha et l'oméga, soit en hébreu, l'aleph et le tav, nom de la première et de la dernière lettre de cet alphabet. J'ai réalisé alors que prendre soin de ma parole, c'était prendre soin de lui et je suis entrée dans une nouvelle manière d'aimer le Christ. J'ai considéré chacun de mes propos avec encore plus de précaution, une crainte nouvelle me saisissant, celle de le blesser, en blessant par mes paroles mon prochain. En revêtant notre humanité n'a-t-il pas pris dès lors, le visage de chaque homme ? J'ai compris que l'Alliance entre Dieu et les hommes était, depuis Noé, une Alliance par et dans le Verbe. C'est le fruit de cette réflexion toute personnelle, élaborée à partir des extraordinaires singularités de la langue hébraïque, langue de la Bible, langue du Christ, ainsi que de mon cheminement de foi, que je partage au lecteur dans ces pages. »

    Plus d'informations ici

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  • Bonjour,  (CET ENR SONORE EST RETIRÉ POUR LE MOMENT)
     
    VIDÉO - Ave Maria Les Cloches de Rome, de Franz Liszt - Anne-Marie Dubois !C'est avec grand plaisir que nous vous présentons la pianiste charismatique Anne-Marie Dubois dans sa nouvelle vidéo. Conçue par Michel Cipriani, un réalisateur ayant conçu bon nombre de vidéos, il a un regard neuf sur la musique classique et les vidéos spirituelles. Elles mettent bien en valeur l’expression de l’artiste et de l’oeuvre, avec une conception inspirée des vidéos-clips.
     
    Faite en collaboration également avec le Sanctuaire Notre-Dame-du-Cap, cette vidéo présente l’Ave Maria Les Cloches de Rome de Franz Liszt. Nous avons vu le talent inégalé de Liszt pour suggérer en musique le chant des oiseaux, par sa pièce Saint-François-d’Assise, La Prédication aux oiseaux. Dans cette oeuvre mythique peu jouée sur You Tube, nous pouvons apprécier le son balançant des cloches qui vont et viennent jusqu’à un impressionnant choeur de cloches à la fin de cette pièce.
     
    Le son est mis en valeur par un bon piano de concert Steinway et une salle vraiment intéressante, la salle Bandeen de l’Université Bishop, à Lennoxville, arrondissement de la ville de Sherbrooke. En plus, l’excellence de Larry O’Malley avec un équipement d’enregistrement à la fine pointe de la technologie, sait mettre en valeur l’interprétation sensible de la pianiste Anne-Marie Dubois.
     
    Voici donc pour la version toute vibrante d’Anne-Marie Dubois de l’Ave Maria Les Cloches de Rome, de Franz Liszt :
      
    Laissez-vous emporter par l’atmosphère enchanteur de cette pièce, telle que donnée par la pianiste Anne-Marie Dubois !
     
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  • Présentation du livre de Judith : les personnages 3/3

    SargonNabuchodonosor et Holopherne, les antagonistes

    Nabuchodonosor, roi d’Assyrie, est présenté comme l’ennemi archétypique d’Israël. En effet, ce personnage fictif combine à la fois le Nabuchodonosor historique, roi de Babylone qui vainquit le Royaume de Juda en 587 av. J.-C, et le roi des Assyriens [1] qui écrasa le Royaume du Nord, Israël, en 722 av. J.-C. Son général en chef porte un nom perse, Holopherne. Assyriens, Babyloniens et Perses sont ainsi convoqués pour caractériser Nabuchodonosor et son envoyé comme l’Ennemi par excellence, « à la puissance trois », des fils d’Israël.

    Nabuchodonosor est le type même du conquérant, mû uniquement par le désir de gloire et de puissance. Après avoir essuyé un affront, il décide de se venger de « toute la terre » (2,1), lui-même se considérant comme « le Seigneur de toute la terre » (2,5), autrement dit, à l’égal de Dieu. Pour le lecteur du récit, supposé bien connaître les traditions bibliques, Nabuchodosor se présente donc, dès le début du récit, comme un opposant au seul Dieu véritable, maître du ciel et de la terre.

    Holopherne est présenté comme le fidèle exécutant du roi. La répression terrible qu’il fait peser sur les pays conquis ou soumis s’exerce aussi sur le plan religieux (3,8). Malgré la puissance qui est la sienne, il n’est pas un homme sage : il refuse d’écouter un homme de guerre expérimenté qui connaît bien les Judéens et leur dieu, à savoir Achior, tandis qu’il se laisse berner par Judith qui lui raconte des mensonges. Il manque également de prudence en se laissant aller à boire plus que de raison en présence d’une transfuge qu’il ne connaît guère. Puissant, vautré dans un luxe insolent, violent, tyrannique, sûr de lui, porté sur la boisson et dépourvu de sagesse, Holopherne est le type même du potentat perse tel qu’on le trouve dans les romans hellénistiques et dans les écrits bibliques tardifs tels le livre de Daniel ou Esther.

    Achior, le converti

    Ammonite, Achior est membre d’un peuple considéré comme un ennemi notoire d’Israël [2]. Pourtant, très vite, il cesse d’apparaître comme opposant. Son nom crée déjà une brèche : en hébreu, « Achior » peut signifier « mon frère est lumière » ou « mon frère de lumière ».

    À la demande d’Holopherne qui cherche des renseignements sur ce peuple qui ose lui résister, Achior prend la parole et raconte à Holopherne l’histoire d’Israël telle qu’il la conçoit et qui peut se résumer en ces termes : tant qu’Israël ne pèche pas contre son Dieu, celui-ci le soutient. Mais s’il en vient à pécher, Dieu lui retire son soutien et permet qu’il tombe entre les mains de ses ennemis (5,17-18). Ce discours est inacceptable pour Holopherne qui condamne Achior à partager le sort des assiégés : « Qui donc est Dieu hormis Nabuchodonosor ? » (6,2). De fait, c’est avec Achior que se pose explicitement une des questions centrales du récit : Quel est le véritable souverain de la terre ? Remarquons que même au moment de la sentence d’Holopherne, Achior ne revient pas sur ses propos. Contrairement aux habitants de Béthulie qui envisagent de se rendre, même si cela signifie devoir adorer Nabuchodonosor (3,8), Achior le païen est prêt à risquer la mort pour avoir évoqué les hauts faits de Dieu.

    Après la décapitation d’Holopherne et le retour de Judith à Béthulie, Achior demande la circoncision (14,10). Et le récit ajoute qu’il « fut admis dans la maison d’Israël jusqu’à ce jour » (14,10). Cette conversion est loin d’être anodine car la Bible ne raconte guère de conversion de païen.

    Achior se caractérise du début à la fin du récit par son intégrité et sa fermeté qui contrastent avec la foi défaillante des autorités et des habitants de Béthulie. Finalement, non sans ironie, le récit le présente comme le seul véritable modèle du croyant [3] – Judith étant le modèle de la croyante – dont la foi ne fléchit pas dans l’adversité. Cela constitue incontestablement une provocation adressée au lecteur : est-il capable d’accueillir la conversion de l’étranger qui peut être plus méritant que lui ? Sa foi est-elle à la hauteur de celle de cet Ammonite ?

    Judith, l’héroïne

    Judith, l’héroïne qui donne son nom au livre, est de loin le personnage le plus étonnant du récit. Il est vrai que dès son entrée en scène, elle casse tous les clichés : bien que veuve, elle est belle et riche, gouvernant sa maison de manière indépendante. Elle n’a pas eu d’enfant mais ne s’est pas remariée et vit retirée du monde. Cependant, elle est au courant de ce qui se passe dans la ville. Malgré son jeune âge, les anciens de la ville se rendent à son invitation et l’écoutent, y compris quand elle leur reproche leur manque de foi, avant d’annoncer que par son entremise, « le Seigneur visitera Israël » (8,33).

    Avant de se rendre dans le camp ennemi, Judith adresse à Dieu une longue prière. A-t-elle été entendue ? Le récit ne le dit pas car la seule mention de Dieu dans les propos du narrateur se limite au chapitre 4, au moment où l’armée assyrienne se dirige sur Jérusalem et que la population prie ardemment : « Le Seigneur entendit leur voix et regarda leur détresse. » (4,13) Mais cette unique mention n’est pas suivie d’une description de l’agir divin et les habitants de Béthulie n’ont pas la possibilité de savoir si Dieu les a entendus. De son côté, le lecteur sait que Dieu a vu et entendu, mais il ignore ce qu’il va faire…
    Au moment de trancher la tête d’Holopherne endormi, Judith se tourne de nouveau vers Dieu : « ‘‘Fortifie-moi en ce jour, Seigneur Dieu d’Israël.’’ Elle frappa deux fois sur son cou de toute sa vigueur et lui ôta la tête. » (13,7-8) Peut-on prier Dieu pour lui demander assistance dans un plan impliquant la tromperie, qui plus est la tromperie d’un hôte ? Peut-on demander à Dieu l’assistance pour tuer un ennemi endormi ? De nouveau, le récit ne dit pas que Dieu entend. Le lecteur est donc laissé à son propre jugement en ce qui concerne la suite du récit.

    Force est de constater que Judith réussit son entreprise, ce qui relève quasiment du miracle : après avoir coupé seule la tête d’Holopherne en deux coups – un véritable tour de force pour une « faible » femme – c’est sans encombre qu’elle et sa servante parviennent à regagner Béthulie, la tête d’Holopherne dans leur panier à provision.

    Une fois parmi ses concitoyens, Judith leur raconte son équipée, attribuant à Dieu la réussite de son plan (13,11.16). Et le peuple considère, de même, que c’est Dieu qui est à l’œuvre par la main de Judith (13,17). Ozias, une des autorités de Béthulie, bénit Judith en ces termes : « Bénie sois-tu, ma fille, par le Dieu Très-Haut, plus que toutes les femmes qui sont sur la terre, et béni soit le Seigneur Dieu, lui qui a créé les cieux et la terre, lui qui t’a conduite pour blesser à la tête le chef de nos ennemis » (13,18). De même, après la victoire sur les Assyriens, c’est vers Dieu que monte la louange de Judith, relayée par les hommes et les femmes d’Israël (15,12 – 16,20).

    La fin de Judith n’est comparable à aucune autre et achève de confirmer la lecture que l’héroïne fait des événements : malgré les particularités qui la caractérisent (bien que célèbre, Judith choisit de se retirer dans sa propriété ; malgré de nombreux prétendants, elle ne se remarie pas et reste donc sans descendance) cette fin de vie est présentée, sans ambiguïté, comme celle d’une personne juste (16,23-25).

    Cependant, le récit ne dit pas explicitement si c’est vraiment Dieu qui a guidé la main de Judith. Si l’héroïne elle-même l’affirme, si tout Israël la croit et si le cours du récit tend à montrer que Judith a raison d’agir tel qu’elle le fait, il revient, en dernier recours, au lecteur d’adhérer ou de ne pas adhérer à la lecture croyante des personnages, dans un récit finalement ouvert [4] et destiné à interpeler qui le lit ou l’entend : reconnaîtra-t-il, comme Achior l’étranger, Dieu à l’œuvre dans la succession des faits, le courage, la ruse de Judith et la confession de foi des fils d’Israël ?

    [1] Historiquement, il s’agit de Sargon II (722-705).

    [2] Voir Dt 23,4-7; Jg 3, 12-14 ; 1 S 11, 11 ; 2 S 10, 1-12, 31 ; 1 R 11, 7 ; Jr 49, 1-6 ; Am 1, 13 etc.

    [3] En ce sens, il peut être rapproché du livre de Ruth qui évoque la conversion d’une Moabite et du livre de Jonas qui décrit la conversion de toute la ville de Ninive.

    [4] Sur la caractérisation de Judith comme un « récit ouvert » voir M. BAL, Head Hunting : ‘Judith’ on the Cutting Edge of Knowledge, dans JSOT 63 (1994) 3-34, p. 13-14.

    Catherine Vialle

    source www.interbible.org

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  • Homélie du 24ème dimanche du temps ordinaire

    Abbé Jean Compazieu 

    PARDONNER 70 FOIS SEPT FOIS

    Textes bibliques : Lire

    Les lectures bibliques de ce dimanche nous parlent du pardon. Bien avant la venue de Jésus, Ben Sirac écrivait : « Rancune et colère, voilà des choses abominables ou le pécheur s’obstine ». L’auteur dénonce la vengeance et recommande le pardon. C’est un combat de tous les jours contre nos tendances naturelles. Mais la Bible nous dit que Dieu ne pourra pas nous pardonner si nous-mêmes nous ne pardonnons pas aux autres. 

    L’apôtre Pierre pensait être très généreux en pardonnant jusqu’à sept fois (sept est un chiffre symbolique qui signifie « sans limite »). Mais Jésus va bien plus loin : il nous dit qu’il faut pardonner jusqu’à 70 fois 7 fois. La mesure du pardon c’est d’être sans mesure. Le vrai pardon ne compte pas ; on n’a jamais fini de pardonner et d’être pardonné. Le Christ ne tolère aucune concession sur ce point : c’est absolument incontournable. Pour y parvenir c’est vers la croix de Jésus que nous nous tournons : livré aux mains des hommes, il a été torturé, bafoué et mis à mort, mais il a pardonné. Lui seul peut nous donner la force et le courage d’aller jusqu’au bout du pardon.

    Pour nous aider à mieux comprendre cet appel, Jésus nous raconte une parabole. Il compare Dieu à un roi qui décide de régler ses comptes avec ses serviteurs. On lui en amène un qui devait dix mille talents (soixante millions de pièces d’argent). C’est une somme énorme, absolument impossible à rembourser. En nous racontant cette parabole, Jésus veut nous faire comprendre où nous en sommes envers Dieu. Cette démesure de la dette n’est qu’une image de ce qui se passe entre Dieu et nous. Devant lui, nous sommes tous des débiteurs incapables de rembourser.

    Et pourtant, quand nous le supplions, Dieu ne se contente pas de nous accorder un délai. Il va jusqu’à nous faire grâce, tout cela au nom de l’amour qu’il nous porte. L’Évangile nous dit qu’il est « saisi de pitié ». C’est une expression que nous rencontrons souvent, par exemple quand Jésus se trouve devant un malade, un lépreux, un paralysé. C’est le cœur qui parle. Le pardon est donné pour permettre un avenir à celui qui n’en a pas d’autres possibles.

    Tous l’Évangile nous dit que Dieu est « pardonneur ». Ce mot n’existe pas dans nos dictionnaires mais il définit très bien qui est Dieu. « Nos péchés les plus graves, disait le curé d’Ars, ne sont qu’un grain de sable face à la montagne de miséricorde du Seigneur. » Oui, Dieu pardonne ; il n’en finit pas de pardonner ; il ne fait pas payer. Jésus n’a pas fait payer à la femme adultère, ni à la samaritaine, ni à Pierre qui l’a renié, ni à ses bourreaux. Ce qu’il nous demande aujourd’hui, il l’a vécu jusqu’au bout.

    Si le Seigneur se comporte ainsi à l’égard des hommes c’est pour nous apprendre à suivre son exemple en pardonnant à ceux qui nous ont fait souffrir. C’est vrai que l’offense d’un frère nous fait mal. Mais elle est bien peu de choses par rapport à tous nos manques envers Dieu. Cent euros, c’est insignifiant par rapport aux soixante millions que je dois. Malheureusement, trop de gens sont fâchés jusqu’à la mort. On enferme l’autre dans son passé et sa réputation. On ne lui laisse aucune chance de faire un geste de paix. Mais quand on reste enfermé dans la rancœur, ça ne donne rien de bon : on souffre et on fait souffrir.

    Comprenons bien : il ne s’agit pas d’oublier mais de tendre la main à l’offenseur pour l’aider à se relever. Pardonner c’est aimer, c’est repartir ensemble sur de nouvelles bases. Dieu est un Père qui aime chacun de ses enfants. Le grand désir d’un père et d’une mère c’est que leurs enfants s’entendent bien et qu’ils soient unis et solidaires. C’est pour cela que Jésus nous a laissé son grand commandement : « aimez-vous les uns les autres COMME je vous ai aimés » (autant que je vous ai aimés, jusqu’au pardon.

    En parlant du pardon, nous n’oublions pas que Jésus nous a donné un sacrement pour l’accueillir. Chaque fois que nous nous adressons à un prêtre pour le demander, c’est Jésus qui est là pour nous tendre la main. Il ne demande qu’à nous décharger de nos fautes pour nous rapprocher de Dieu. Il vient renouveler en nous la grâce du baptême. C’est ainsi que nous retrouvons notre place d’enfants de Dieu. Dans la seconde lecture, saint Paul nous dit que « nous ne nous appartenons  pas à nous-mêmes » ; nous vivons et nous mourrons pour le Seigneur. Avec lui, tout est cadeau. Sa miséricorde est source de joie, de sérénité et de paix. Elle nous ouvre à l’espérance d’être aimés pour toujours malgré nos limites et nos péchés. Pour toutes ces merveilles, nous pouvons chanter : « Gloire à Dieu, paix aux hommes, joie du ciel sula terre. AMEN

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    source http://dimancheprochain.org/

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  • Noémi : une leçon de résilience

    Noémi

    Noémi
    Gertrude Crête, SASV
    encres acryliques sur papier, 2000
    (photo © SEBQ) 

    Lire le livre de Ruth

    Partie avec son mari et leurs deux fils pour les Champs de Moab parce que, ironiquement, une famine sévissait dans la « Maison du Pain » (sens du nom Bethléem), Noémi rentre avec sa belle-fille Ruth. Morts, les hommes de la famille! La vie a basculé dans l’amertume pour Noémi au point que son identité en est ébranlée. « Est-ce bien là Noémi? » s’exclament les femmes de Bethléem en la voyant. Elle leur répond de ne plus l’appeler Noémi, « ma douceur »,  mais Mara, l’« amère » (Rt 1,19-21). Et sa plainte en dit long sur sa manière de voir les choses : elle tient Dieu pour responsable de ses malheurs. Elle s’inscrit ainsi dans cette vieille mentalité biblique selon laquelle tout vient de Dieu, le bonheur comme le malheur. Si tout est ainsi fixé par Dieu, aussi bien se laisser aller à une passivité résignée, non?

    La femme dans les coulisses

    Eh bien non! Car la vie continue malgré tout. Et la solidarité des deux femmes permettra de surmonter le malheur. Ruth, fidèle à la mission que porte son nom, « l’amie », se propose d’assurer leur subsistance à toutes deux en partant glaner dans les champs.

    Certes, on s’attend à ce que Ruth prenne une part active au récit dont elle est l’héroïne. Mais on peut se demander si, tout compte fait, Noémi ne serait pas la vraie protagoniste de l’histoire. Tout d’abord, notons comment Ruth elle-même se soumet à son autorité en obéissant à tous ses conseils. Ensuite, même si elle reste cantonnée à la maison, elle infléchit au moment opportun le cours des événements. Car elle sait tirer parti des informations qu’elle détient et suggérer la bonne action au bon moment.

    Le hasard faisant bien les choses − ce qui n’a rien de surprenant dans un conte, ce qu’est le livre de Ruth d’un point de vue littéraire − Ruth va justement glaner dans les champs de Booz [1]. C’est ce que Noémi découvre en questionnant sa bru à son retour des champs. Elle s’empresse aussitôt de l’informer que cet homme est un parent du côté de son défunt mari et qu’il a un droit de rachat sur elles (2,20). Le texte juxtapose en fait ici deux traditions, la loi du rachat (devoir de racheter des parents réduits à l’esclavage par la pauvreté, ou encore leurs biens) et la loi du lévirat (devoir d’épouser la veuve de son frère ou d’un parent proche pour lui assurer une descendance). Noémi encourage donc Ruth à continuer de fréquenter les champs de Booz.

    Et passe la saison de la moisson de l’orge, puis de celle du blé. Il y a urgence à agir, car bientôt les deux femmes seront sans recours.

    Un stratagème audacieux

    Noémi se sent une vraie responsabilité pour sa belle-fille et la veut heureuse (3,1). Elle lui suggère donc un habile stratagème. Booz, comme c’est la coutume, dormira sur l’aire la nuit où l’orge est vannée. Lavée et parfumée, Ruth devra discrètement découvrir ses pieds et se coucher près de lui (3,4). L’idée peut nous sembler bizarre ; il s’agit en fait d’un geste très audacieux et fort compromettant. En effet, dans la Bible, les pieds sont parfois un euphémisme pour les organes génitaux masculins [2]. Le plan de Noémi équivaut en fait à risquer le tout pour le tout. Booz ne se formalise pas de l’initiative de Ruth et ne profite pas non plus de la situation. Il entre plutôt en dialogue avec elle et accepte d’étendre sur elle un pan de son manteau, autrement dit de l’épouser.

    Après quelques rebondissements, Booz prend Ruth pour femme et bientôt elle conçoit et enfante un fils. Les femmes de Bethléem s’adressent une nouvelle fois à Noémi, comme si elle était la première concernée par cet événement. Et en fait, oui, peut-être l’est-elle. En épousant Booz, Ruth a consenti à donner une descendance à ses premiers beaux-parents. Et nommant elles-mêmes l’enfant, les femmes intègrent pleinement cette étrangère dans le peuple d’Israël et en font une ancêtre du grand roi David (4,17.22). Et elles ont bien raison de dire que oui, « il est né un fils à Noémi » (4,17). La résilience et l’intelligence de Noémi ont chassé toute amertume et fait triompher la vie.

    [1] Son nom, qui signifie « en [lui] la force », est également celui de la colonne située à gauche de l’entrée du Temple de Salomon. (1 R 7,21). Le nom peut également s’écrire Boaz.

    [2] Certaines traductions édulcorent un peu le geste en parlant de « dégager une place à ses pieds ».

    Anne-Marie Chapleau

    source www.interbible.org

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